Inclusion : hôteliers et restaurateurs s'engagent

Paris (75) Ils travaillent avec des personnes handicapées, sans diplôme ou en réinsertion. Un choix pas si évident. Pourtant, sur le terrain, la greffe prend plutôt bien. Elle va jusqu'à souder les équipes, les motiver, les dynamiser. Enquête sur ces hôteliers et restaurateurs qui pratiquent l'inclusion, à l'heure où la responsabilité sociale des entreprises devient une clé dans le positionnement d'un établissement.

Publié le 01 avril 2022 à 13:00

En 2022, quand on parle de responsabilité sociale des entreprises (RSE), inclusion et intégration font partie des priorités à instaurer sur un lieu de travail. Message reçu au sein des CHR. D’autant plus avec la crise sanitaire, qui a accéléré la mutation du secteur : recrutement, fidélisation des salariés, dynamique d’équipe… on assiste à une remise à plat des fonctionnements ‘d’avant’. Si bien que l’édition 2022 du salon EquipHôtel - du 6 au 10 novembre prochains, à Paris, porte de Versailles - s’articule autour de ‘l’hospitalité engagée’, avec une série de conférences sur la RSE en général et l’inclusion en particulier. Quant au Gouvernement, il vient de créer un baromètre national Emploi & Handicap. Présenté le 10 mars au siège francilien du groupe Accor, il permet aux dirigeants, sur la base du volontariat, de publier des données brutes sur le handicap afin de partager leur engagement en faveur de l’emploi inclusif. Un baromètre consultable aussi bien par les personnes en situation de handicap que par les employeurs, collaborateurs, partenaires économiques, acteurs de l’emploi... “Cet outil va contribuer à mettre le sujet du handicap plus ouvertement sur la table”, a commenté Elisabeth Borne. Pour la ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, “ce baromètre va également inciter les équipes RH des entreprises à le prendre en compte dans leurs pratiques, à la fois au moment du recrutement, mais aussi tout au long du parcours du salarié en situation de handicap. Ce qui devrait favoriser leur maintien durable dans l’emploi.” L’idée : montrer qu’allier emploi et handicap est possible, en créant un nouveau dialogue entre employeurs et personnes handicapées.

 

“Changer le regard sur la différence”

Dans les restaurants Le Reflet, à Nantes (Loire-Atlantique) et Paris (IIIe), faire travailler, en milieu ordinaire, des personnes atteintes de trisomie 21 était un postulat de départ. Un parti pris audacieux, courageux, qui a vite trouvé un public. Même scénario dans les Cafés Joyeux, désormais présents à Paris (Ier, IIet VIIIe), Rennes (Ille-et-Vilaine), Bordeaux (Gironde), Lyon (Rhône) et d’ici à 2023 à Marseille (Bouches-du-Rhône), Tours (Indre-et-Loire) ou encore Strasbourg (Bas-Rhin). Créée par Yann et Lydwine Bucaille-Lanrezac, cette enseigne emploie, en CDI, 85 personnes en situation de handicap mental et cognitif dans ses six cafés. Yann Bucaille-Lanrezac souhaite ainsi “changer le regard sur la différence”, comme il le confiait le 17 novembre dernier, lors de l’inauguration du Café Joyeux du boulevard de la Madeleine (Ier), en présence d’Élisabeth Borne et de Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des Personnes handicapées. Autre preuve que les politiques s’impliquent.

 

“Les permanents trouvent un deuxième sens à leur métier”

En coulisses, c’est un engagement de tous les instants. Ce n’est pas Domitille Flichy qui dira le contraire. En 2009, elle a créé un concept de boulangerie artisanale, durable et solidaire, baptisé Farinez-vous. Aujourd’hui, cette entreprise d’insertion, membre du Collège culinaire de France, compte trois boutiques et deux espaces de production à Paris, où près de la moitié des 18 employés sont issus d’un parcours durant lequel ils ont été éloignés de l’emploi, voire désocialisés. “Nous travaillons beaucoup sur la notion d’équipe et sur la gouvernance”, explique Domitille Flichy. Car il faut que la greffe prenne entre les différents profils de salariés. “Les permanents trouvent un deuxième sens à leur métier et certaines personnes en insertion transforment leur CDD - qui ne peut pas dépasser deux ans - en CDI”, constate l’ancienne juriste, qui vient de faire une levée de fonds pour poursuivre le développement de Farinez-vous.

En pratique, elle paye les mêmes charges qu’un boulanger classique, mais elle a droit à une aide de 10 000 € par an et par personne en insertion. En contrepartie, elle accompagne, conseille et forme au sein d’une école qu’elle a fondée. Un travail de fond et de longue haleine, récompensé par une clientèle fidèle. Même engouement de la part des clients à l’hôtel Babel. “Sur Booking.com, on a 9,5/10 pour l’accueil et le personnel”, indique William Attal, le directeur de cet établissement “solidaire et responsable” situé au cœur de Belleville, à Paris (XXe). Ici, le social et la dynamisation du territoire local sont des priorités. L’hôtel est même officiellement certifié Entreprise à mission. Le recrutement, mené avec le soutien de la mairie du XXarrondissement et les associations du quartier, donne leur chance, notamment, à des réfugiés. À l’instar de cet ancien journaliste palestinien, désormais réceptionniste de nuit au Babel. William Attal parle d’un recrutement “très humain” et reflet de l’âme d’un quartier populaire, ouvert, cosmopolite. “C’est ce qui plaît aux clients, souligne-t-il. Car ils viennent chez nous pour retrouver un Paris authentique.

“Une formation initiale diplômante et inclusive”

Les groupes s’engagent, eux aussi. L’inclusion fait partie de leur charte RSE. Depuis longtemps pour Accor. Plus récemment, par exemple, pour Evok. Mais ce groupe français, en plein développement en Europe, n’a que huit ans d’âge. De son côté, Best Western France propose désormais “une formation initiale diplômante et inclusive”. Explication du directeur général, Olivier Cohn : “Nous trouvons des candidats via les missions locales, nous les formons en nous appuyant sur des CFA pour les cours de cuisine, nous leur proposons un contrat de professionnalisation dans l’un de nos établissements, et ce dans la perspective de les embaucher ensuite.” Une première promotion d’une quinzaine de personnes va expérimenter le dispositif dès la rentrée de septembre 2022. Autre vivier de futurs talents : le CFA des chefs, premier centre de formation des apprentis inter-entreprises (Accor, AccorInvest, Adecco, Korian et Sodexo), qui compte 17 % d’apprentis en situation de handicap.

Le groupe Hyatt, en partenariat avec l’association Les Déterminés, propose quant à lui à des jeunes sans emploi ni formation de reprendre confiance en eux, de se former et d’avoir accès à un emploi à l’issue de sept mois d’une formation sur mesure. “Ces jeunes n’ont jamais mis les pieds auparavant dans un hôtel de luxe. On leur ouvre la porte parce qu’ils ont envie, ils sont motivés”, souligne Michel Morauw, à la tête de Hyatt France. Une première promotion RiseHY de 15 jeunes, parmi les 50 qui vont participer au programme dans les dix-huit prochains mois, vient de se constituer. “Mais, d’ici à 2025, Hyatt France souhaite former quelque 250 jeunes, poursuit Michel Morauw. Une démarche qui s’inscrit dans l’engagement historique de notre enseigne pour l’inclusion.” Les initiatives se multiplient, donc. Elles deviennent même des axes de communication, au même titre que la ‘green attitude’, par exemple. C’est bon signe. Pour Sophie Cluzel, “une étape est franchie : le handicap en entreprise n’est plus tabou”.

 

inclusion Emploi et handicap RSE


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Publié par Anne EVEILLARD



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