Séparation entre Alain Llorca et le «Moulin de Mougins»

Mougins (06) C'est la fin d'une belle histoire. Le chef Alain Llorca, qui avait repris en novembre 2003 «Le Moulin de Mougins» créé par Roger Vergé à la fin des années soixante, vient de quitter cette adresse emblématique de la gastronomie, membre de Relais & Châteaux.

Un différend courait depuis plusieurs mois, pour «divergences» sur les méthodes de gestion, entre le chef doublement étoilé, président du conseil d'administration, et ses actionnaires. Cette séparation survient à un moment où la conjoncture n'est guère favorable à de nombreux restaurants et constitue, pour la ville de Mougins, un facteur d'incertitude quant à sa renommée gastronomique, du moins à court terme. Techniquement, la société d'exploitation du Moulin de Mougins (1) a été placée en redressement judiciaire le 5 décembre, une période d'observation de six mois devant permettre à l'établissement de poursuivre son activité.

Pour sa part, Alain Llorca «tourne la page». Il étudie déjà d'autres projets, notamment la possibilité de reprendre, à Vallauris, le «Café Llorca», dont le concept est une réussite et qu'il pourrait dupliquer même s'il n'en détient pas le nom, déposé par la holding Flora, propriétaire du «Moulin». Il serait en outre en contact avec un groupe hôtelier de la Côte.
 Talent en quête d'établissement de qualité d'un côté, autre époque pour une adresse célèbre de l'autre, la question de l'orientation du «Moulin de Mougins» est aujourd'hui posée. Les actionnaires du Moulin de Mougins, auxquels doivent se joindre de nouveaux associés, vont prochainement présenter un plan de continuation à l'administrateur judiciaire. Il serait notamment question d'une séparation d'activités entre le Café Llorca, qui pourrait faire l'objet d'un appel d'offres, le restaurant gastronomique et l'hôtel, qui compte aujourd'hui onze chambres, rénovées et redécorées au début de l'été 2008 et dont le nombre pourrait être triplé.

Indissociable de Mougins

Ces turbulences touchent une adresse «historique» de la gastronomie sur la Côte d'Azur. Roger Vergé, son créateur, père de la «cuisine du soleil», avait apporté jusqu'à cinq étoiles à Mougins (3 au Moulin, 2 à L'Amandier), formé plus d'un chef de renom (Ducasse, Maximin, Chibois, Morisset...) et fait du Moulin une adresse à la réputation internationale, particulièrement en période de Festival de Cannes, recevant stars et personnalités du monde entier. Alain Llorca avait perpétué cette renommée tout en actualisant le décor et la cuisine. Enfin, l'image du Moulin est indissociable de celle de Mougins. Depuis trois ans, en septembre, le festival gastronomique «Les Etoiles de Mougins» y organise démonstrations culinaires et soirée de gala. Le maire, Richard Galy, a donc réagi à cette nouvelle donne : «Ce qui s'est passé m'attriste. Alain Llorca, que j'apprécie beaucoup, avait su assumer l'héritage de Roger Vergé, concilier la tradition gastronomique du Moulin et un style de cuisine très apprécié. Je serai donc attentif au devenir d'un établissement qui est lié à la vie et à l'économie de Mougins depuis quarante ans. Notre festival gastronomique repose en effet en partie sur cette collaboration et je souhaite qu'un chef de notoriété, sinon étoilé, puisse préserver la réputation gastronomique et l'aura de cette adresse».
Le «Moulin» continue, les menus de fêtes et les cartes du début d'année seront assurés par le second, Stéphane Arnal, mais pour la première fois depuis cinq ans sans Alain Llorca et, au-delà, sans les deux étoiles Michelin, attachées à sa cuisine. Un motif ou une obligation de reconquête, s'ils maintiennent ce cap, pour les nouveaux dirigeants, qui devraient préciser prochainement quelle orientation ils entendent donner au Moulin de Mougins.
 

(1) La société est filiale de la Holding Flora, dont les autres actifs sont le «Café Llorca» à Vallauris et «Les Gourmandises du Moulin» à Mougins-Tournamy (pâtisserie-chocolaterie-traiteur), l'ensemble des établissements employant une soixantaine de personnes.