Régis Marcon : "Ma cuisine reflète mon parcours d'autodidacte et mon approche de la nature"

Saint-Bonnet-le-Froid (43) Le restaurant Régis et Jacques Marcon défend avec brio depuis quinze ans ses 3 étoiles Michelin, dans un cadre magique au milieu de la nature. Dans Légumes, aux éditions de La Martinière, le chef se plonge dans l'univers du végétal et en donne les clés. Rencontre avec le chef qui a osé imposer une assiette végétarienne au Bocuse d'or.

Publié le 09 novembre 2020 à 13:03

L’Hôtellerie Restauration : Quand avez-vous su que vous vouliez devenir cuisinier ?

Régis Marcon : Ma mère tenait une auberge familiale sans prétention à Saint-Bonnet-Le Froid. Après le décès de mon père, je l’ai vue travailler seule, d’arrache-pied, et parfois pleurer devant les fourneaux. Ça ne me donnait pas envie de faire ce métier. Alors qu’à l’âge de 15 ans, les métiers du sport et les arts plastiques me faisaient rêver, ma mère m’a envoyé à l’école hôtelière. C’est là-bas que j’ai eu le déclic pour la cuisine. Je le dois en grande partie à ma rencontre avec un formateur pâtissier, Monsieur Blun. C’était un grand professionnel et un bon pédagogue qui a su me faire découvrir la beauté de ce métier et combler mon désir d’apprendre.

 

Comment définiriez-vous votre cuisine ?

Ma cuisine est, je pense, le reflet de mon parcours d’autodidacte, de mon approche de la nature que j’aime faire partager à mes collaborateurs et à mes clients. Mon dicton : “La cuisine ne peut être que belle et bonne quand elle nous rapproche de la nature.”

La cuisine m’a amené à être beaucoup plus curieux de la nature environnante. J’ai beaucoup appris au contact des botanistes et des mycologues. Ici, à 1 200 m d’altitude, dans un lieu plutôt hostile et au climat rude, on a retourné la situation grâce à cette nature dont on a fait un plus. Les produits donnent de la personnalité à la cuisine et amènent à une cuisine qui t’appartient et qui raconte une histoire.

 

Votre plat best-seller ?

Le best-seller de ma cuisine ? Ce sont des plats dans lesquels le champignon prend une large part. Par exemple, la brochette Margaridou était l’une des garnitures qui m’a permis de gagner le Bocuse d’or. Elle est toujours à la carte. C’est un cromesquis à base de ris de veau, de jambon de pays et de morilles, inspiré du livre de Margaridou, une cuisinière auvergnate dont j’appréciais la philosophie.

 

Votre plat préféré ?

La marinière de tricholomes prétentieux aux Saint-Jacques. Le tricholome prétentieux - Tricholoma portentosum - est un champignon qui se cache sous les pins et qui a un parfum d’huître. La tradition veut qu’on le prépare à la façon des moules marinières. Ainsi, on rétrocède au champignon son goût initial. C’est un souvenir de mon enfance. Quand j’étais enfant, nous avions l’habitude de les éplucher en famille.

 

Votre dernier livre est consacré aux légumes et racines. Qu’y apprend-on ?

Il est à l’image de mes précédents livres [Champignons, Herbes, Légumineuses et céréales, NLDR]. Dans la première partie, je décline mes réflexions sur la nature, la culture et la nutrition. Dans la deuxième partie, vous trouvez la liste des légumes que j’emploie avec leur histoire, leur typicité et la saisonnalité. Les techniques, astuces et tours de main pour bien préparer et cuire les légumes composent la troisième partie. Et pour finir, 110 recettes, la plupart d’accès facile, avec la préparation et des photos illustratives.

 

Quel est votre engagement en matière de développement durable ?

J’ai la chance d’être né ici, à Saint-Bonnet-le-Froid, et de profiter des bienfaits et des ressources de ce territoire. Aussi, il était naturel pour nous d’être sensibles à tout ce qui touche au développement durable. Cela se retrouve dans notre gestion des cueillettes des champignons et d’herbes, qui sont ramassés de façon raisonnable, seulement en fonction des besoins. Il y a aussi l’approche culinaire respectueuse des produits, en évitant le gaspillage. Je tiens de ma mère cette habitude de ne pas gaspiller. Par exemple, la partie haute du poireau, du fenouil...peuvent être utilisées dans les bouillons ou farces ; c’est le cas de la plupart des légumes.

Il y a cinq ans, mon fils Jacques a souhaité créer son propre jardin. J’étais dubitatif. Il se trouve à 800 m d’altitude, sous des conditions climatiques plus favorables qu’à Saint-Bonnet-le-Froid. Deux personnes à temps plein s’occupent de ce jardin. Il avait raison : nous avons des légumes exceptionnels. On est presque en autosuffisance et c’est un atout supplémentaire pour notre cuisine.

De plus, la démarche haute qualité environnementale [HQE] de notre maison répond aux quatorze cibles obligatoires en termes d’environnement. N’oublions pas l’humain dans ce dispositif, qui consiste à concilier les nécessités économiques avec le plaisir de travailler ensemble.

 

Quel manager êtes-vous ?

Je pense être un manager optimiste. J’aime inspirer, entraîner mes collaborateurs avec moi, en toute humilité, dans cette aventure pour laquelle je me passionne. Je prends le temps d’expliquer ma cuisine, le sens que je lui donne, pour deux raisons : afin qu’ils s’imprègnent de ces connaissances pour répondre aux clients qui ont choisi notre cuisine et pour que cela leur serve plus tard, comme une solide expérience dans leur future carrière.

 

Quels conseils donnez-vous aux jeunes qui viennent en stage ou en apprentissage chez vous ?

Ils doivent être sûrs d’avoir fait le bon choix. Cultivez votre motivation, restez curieux et attentifs, soyez ponctuels et montrez votre intérêt ! Ne vous isolez pas ! Communiquez avec nous, avec vos professeurs et ne perdez surtout pas vos rêves, votre projet initial ! C’est cela qui vous fera avancer. Nous, nous saurons vous encourager.

 

Qu’est-ce qui vous motive aujourd’hui ?

L’avenir, mes projets, sources de sens, sont mon moteur. De même que mon engagement pour faire bouger les choses dans le domaine de la formation et du partage des connaissances me motive.

 

Comment la Covid-19 a affecté votre restaurant ?

Comme nous tous, nous avons été très affectés par l’épidémie de Covid-19 en termes de chiffre d’affaires. Mais avec cette deuxième vague, c’est surtout l’impact psychologique sur nos équipes que je redoute. Je ressens de l’anxiété et la peur du lendemain. Mon caractère optimiste me fait dire que cette période a été propice à la réflexion. Notre métier demande à être réinventé dans son rapport à la nature, dans ses valeurs de partage avec nos collaborateurs, nos clients. Je m’en tiens à cette citation du philosophe Alain : “Le pessimisme est d’humeur ; l’optimisme est de volonté.”

 

 

Restaurant Régis & Jacques Marcon

Nombre de places assises : 60

Nombres de couverts par jour : 120

Effectifs 16 personnes en salle, 25 en cuisine

Prix des menus : 170 €, 230 €

Ticket moyen : 300 €

Ouverture (nombre de services par semaine) : 10

Jours de fermeture : mardi, mercredi.

Période de fermeture : mi-décembre à début avril.

 

L’équipe

Chef : Jacques Marcon

Second : Romain Masset

Directeur de salle : Jérémy Clavel

Chef pâtissier : Arnaud Montrobert

Chef sommelier : Laurent Blanchon

 

Gastronomie étoiles Michelin #régismarcon# Jacques Marcon #saintbonnetlefroid#


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Publié par Nadine LEMOINE



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