Le benzaldéhyde, un composé à l'odeur d'amande, par Hervé This

Ce composé se présente sous la forme d'un liquide incolore, avec une puissante odeur qui évoque l'amande. Il peut être utilisé en ingrédient odorant essentiel, mais aussi venir en association dans une préparation.

Publié le 28 septembre 2018 à 18:15

Vous connaissez les extraits d'amandes ? Ils sont en vente dans les épiceries, à côté des extraits liquides de vanille et de l'eau de fleur d'oranger. Mais il y a des produits que l'on confond souvent, et le mot 'naturel' est souvent une source de confusion.  

Commençons par la vanille, qui est une liane dont les gousses fermentées sont les produits que l'on utilise en cuisine. J'observe d'abord que ces gousses ne sont pas naturelles, puisqu'elles ont été fermentées, et que cette étape est essentielle pour la qualité gustative des produits. Puis, de ces gousses, on obtient un extrait. Cet extrait peut être solide, auquel cas où il faut ensuite que le cuisinier le dissolve, ou bien il peut être liquide, et c'est alors plus pratique, parce qu'il s'agit d'ajouter quelques gouttes.

À propos de la naturalité de ces extraits (ce que certains nomment fautivement le 'degré de transformation'), je ne vois d'ailleurs  pas de différence avec les gousses, parce que qui peut dire en quoi une fermentation serait plus ou moins naturelle qu'un trempage dans l'eau, par exemple ? Ajoutons enfin que, dans les extraits liquides, les fabricants ajoutent souvent du caramel, pour donner de la couleur et du goût, notamment. Et puis, on a aussi la vanilline, qui est le composé odorant principal de la vanille, au point que de la vanilline dissoute dans de l'eau ne se distingue que très difficilement d'un extrait de vanille liquide… Certains s'y trompent dans une dégustation en aveugle ; parfois on détecte la différence, mais on ne sait pas toujours reconnaître l'extrait de vanille de la vanilline… (qui peut d'ailleurs être extraite ou de synthèse).

 
Extraits de fleurs d'oranger et d'amandes

Tout cela étant posé, passons à l'eau de fleur d'oranger, qui est un extrait liquide de fleurs d'oranger par entraînement à la vapeur d'eau : on fait passer de la vapeur dans un tas de fleur, et l'on récupère une eau parfumée, qui, quand elle est de bonne qualité, laisse apparaître à sa surface des gouttes huileuses, du composé odorant principal, qui n'est plus soluble quand il est abondant. Un composé essentiel de l'eau de fleur d'oranger est le linalol.

Pour les amandes, il faut également être prudent… ou faire confiance aux services de l'État, dont les fonctionnaires sont précisément compétents pour protéger le public. Observons tout d'abord que les amandes amères sont toxiques, naturellement : il en suffit de quelques unes pour mourir d'intoxication par le cyanure d'hydrogène (de même, attention aux amandes de cerise, d'abricots…). En revanche, l'amande douce est 'domestiquée', donc elle n'est plus naturelle.

Pour l'extrait d'amande, il y a souvent un solvant (par exemple de l'huile) et un composé dissous, lequel peut être un 'arôme' d'amande… mais où un composé essentiel est le benzaldéhyde.

 

On y arrive : le benzaldéhyde pur est un composé qui se présente sous la forme d'un liquide incolore, avec une puissante odeur qui peut évoquer l'amande à certains, quand d'autres reconnaissent de la cerise, la colle blanche (où le benzaldéhyde a été utilisé comme parfum), et d'autres encore la pistache.

 

Pourquoi l'utiliser ?

Parce que le goût est merveilleux, comme un son limpide de flûte. J'aime la comparaison musicale, car elle permet de mieux comprendre la question du goût. Ainsi, de la vanilline a une odeur très pure, certains diraient simples, alors que la véritable vanille, qui contient de nombreux composés odorants, a une odeur  plus complexe, tout comme une musique d'orchestre. J'ai déjà évoqué la même question dans ces pages à propos des polyphénols de raisin, que j'ai comparés à du vin : goût limpide dans le premier cas, complexe dans le second… avec une préférence de beaucoup pour le goût plus simple, même parmi des gastronomes. Pour le benzaldéhyde, même observation. Enfin, la synthèse du benzaldéhyde est extrêmement simple, au point qu'on en fait une séance de travaux pratiques pour les débutants en chimie !

 

Les précautions à prendre

Des inconvénients ? Tous les composés présents dans les aliments étant toxiques à haute dose, le benzaldéhyde ne fait pas exception… mais une quantité infime suffit pour parfumer un plat !

En revanche, c'est sur les étiquetages qu'il y a lieu d'être précis. J'ai déjà évoqué le mot 'naturel' qui est très malmené par le milieu industriel et par le milieu culinaire.

Mais la loi de 1905 revendique le commerce de produits "loyaux" : ce qui est vendu doit être ce qui est annoncé par le vendeur. En matière de naturel, je milite pour que, comme le veut la langue française et le dictionnaire, on reconnaisse enfin que les aliments ne sont jamais naturels !

D'autre part, il y a ce mot 'arôme', que l'industrie des parfums et la législation ont détourné. Un arôme est l'odeur d'une plante aromatique, et pas une préparation, extrait ou synthétique. Nous devons militer pour une autre terminologie telle que 'composition' ou 'extrait', en ajoutant éventuellement 'odoriférant' ou 'gustatif'.

À noter que les pays anglo-saxons ne font pas la confusion, eux, puisqu'ils distinguent bien le flavour, le goût, et le flavouring, cette composition ou cet extrait. Pourquoi faisons-nous moins bien que d'autres pays ?

 

Quelques idées techniques

Le benzaldéhyde peut être utilisé en ingrédient odorant essentiel, mais il peut aussi venir en association.

 

Seul, il se suffit à lui même, et je vous invite à faire la recette suivante :

1. Dans un bol, mettre un blanc d'oeuf.

2. Ajouter de l'huile neutre en fouettant comme pour une mayonnaise

3. Quand la sauce est blanche et épaisse comme une mayonnaise, ajouter du sucre et de l'extrait d'amandes ou du benzaldéhyde, plus une pincée de sel et une goutte de jus de citron (ou un peu d'acide citrique)

4. Mettre dans de jolies tasses et cuire au micro-ondes jusqu'à ce que l'on observe un gonflement

5. Servir immédiatement ces 'soufflés' que j'ai inventés il y a  quelques décennies sous le nom de 'gibbs'.

 

• Le benzaldéhyde peut venir en support d'amandes, de cerises ou de pistaches véritables, ou de préparations culinaires obtenues à partir de ces produits.

 
 • Enfin, on peut associer le benzaldéhyde avec d'autres composés purs, pour confectionner ses propres compositions odoriférantes pour la cuisine.

 
Où s'en procurer ?

Chez tous les épiciers. 


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