Reprendre un fonds de commerce en redressement judiciaire : mode d'emploi

La reprise d'un fonds de commerce en redressement judiciaire intervient lorsque son dirigeant est dans l'impossibilité d'en assurer lui-même le redressement et qu'un plan de cession apparaît être la seule alternative pour poursuivre l'activité et maintenir les emplois. Tiphaine Beausseron avec Baptiste Robelin, avocat au sein du cabinet DJ.

Publié le 03 juin 2020 à 11:13

► Comment connaître les affaires en redressement judiciare à vendre ? 

Ces ventes font l’objet d’une publicité obligatoire imposée par le code de commerce. Vous pouvez retrouver ces annonces en ligne via des sites spécialisés tels que CNAJMJ, ASPAJ, mais également dans la presse écrite. Les agents spécialisés en transaction de fonds de commerce peuvent aussi être une bonne source car ils connaissent bien le marché. Certains d’entre eux, comme Century 21 Horeca Paris, Point de vente ou encore CHR Home, disposent d’agents spécialisés dans la reprise en procédure collective. 

 

► Qui sont les acteurs de la cession en redressement judiciaire ?

• L’administrateur judiciaire est un interlocuteur incontournable. C’est lui qui fixe la date limite de remise des offres de reprise, qui vous transmettra toutes les informations utiles à votre stratégie de reprise (bilans, l’état des nantissements et privilèges, l’inventaire du matériel, le bail commercial ) et à la rédaction de votre offre, et c’est à lui que vous devrez remettre votre offre.

• Vous serez peut-être également amené à travailler étroitement avec un agent immobilier spécialisé dans la cession de fonds en procédure collective, notamment pour vous aider à déterminer le juste prix. 

• Se faire accompagner par un avocat est également conseillé, notamment pour bien mesurer l’étendue de ses engagements juridiques (en particulier dans le cadre des contrats repris avec le fonds tels que crédit bancaire, contrats commerciaux, contrats de travail…), construire et circonscrire l’offre de reprise, respecter les délais et être représenté à l’audience (même si la représentation par avocat n’est pas obligatoire). 

• Le tribunal de commerce va recevoir et analyser les offres et écouter les repreneurs potentiels, pour finalement désigner le repreneur. 

 

► Qui peut faire une offre de reprise ?

Toute personne peut déposer une offre, sous réserve d’apparaître crédible vis-à-vis du tribunal. En revanche, afin de moraliser le processus, le dirigeant de l’entreprise en redressement n’est pas autorisé à déposer d’offre, tout comme les membres de sa famille - parents, grands-parents, enfants, petits-enfants, frères et soeurs et leurs alliés -, qu’ils agissent directement ou par personne interposée, sous peine d’encourir des peines d'emprisonnement et d'amende, la nullité de l'acquisition, et d’avoir à payer des dommages-intérêts. Le tribunal opère un contrôle et exige en conséquence une attestation selon laquelle le candidat ne tombe pas sous le coup de ces incapacités (article L642-3 du code de commerce)

 

► Y a-t-il une date limite pour déposer son offre de reprise ? 

Oui, la date limite est fixée par l’administrateur judiciaire (art. R631-39 du code de commerce).

Une fois les offres réceptionnées, l’administrateur judiciaire dépose son rapport auprès du greffe du tribunal qui fixe une date d’audience à J + 15 au plus tôt. En cas de renvoi à une audience ultérieure, la présentation de nouvelles offres ou l'amélioration des offres préalablement déposées est alors possible.

 

► A-t-on connaissance des offres concurrentes ? 

Oui, lorsque l’administrateur judiciaire a déposé les offres de reprise au greffe du tribunal de commerce, celles-ci deviennent publiques et les candidats découvrent le projet de reprise des autres repreneurs potentiels. Ils peuvent améliorer leur offre de reprise jusqu’à 2 jours ouvrés avant la date d’audience. C’est une différence majeure avec la procédure de reprise en cas de liquidation judiciaire où les offres sont en principe présentées sous pli cacheté, sans qu’il n’existe normalement de phase améliorative pour les candidats. 

 

► Améliorer son offre signifie-t-il nécessairement augmenter le prix d’acquisition ? 

Non, en matière de redressement judiciaire, le tribunal rend un jugement d'homologation au mieux-disant, qui n'est pas forcément le plus offrant, le maintien des emplois étant au coeur du dispositif. Une offre peut donc théoriquement être considérée comme améliorée si le candidat repreneur indique par exemple reprendre davantage de salariés. 

 

► Que doit contenir l’offre de reprise ? 

Elle doit comporter tous les éléments fixés par l'article L642-2 du code de commerce : la désignation précise des biens, des droits et contrats inclus, des prévisions d'activité, le prix offert et les modalités de règlement, les garanties souscrites en vue d’assurer son exécution… L’administrateur judiciaire peut être amené à demander des précisions en contactant parfois directement le repreneur. Le tribunal peut également demander des compléments d'information en chambre du conseil. 

Attention : le candidat à la reprise s’engage à reprendre l'activité en l’état, dans les conditions détaillées dans son offre de reprise, sans possibilité de soumettre la reprise à une condition d'obtention du crédit ou de négocier après coup le prix à la baisse. 

 

► Reprend-on les contrats de travail ? 

Oui. Plus précisément, il est envisagé la reprise de postes de travail (et non la reprise de salariés nommément désignés) car l’objectif du plan de cession est la poursuite de l’activité et le maintien du maximum d’emplois. La loi prévoit ainsi le transfert automatique des contrats de travail choisis par le repreneur. Le repreneur peut toutefois décider de ne pas reprendre les postes non nécessaires à son projet de reprise.

Si le tribunal adopte la proposition de cession, il précisera dans son jugement qu'il autorise le licenciement des salariés non repris. L’administrateur judiciaire procèdera alors au licenciement des salariés correspondant aux postes non repris, pour motif économique, conformément à l’ordre des licenciements prévu par la loi.

 

► Quel est le sort des contrats commerciaux ?

L’ensemble des contrats nécessaires à l’activité suivent la cession (le bail commercial, les contrats de fourniture, d’approvisionnement, de crédit-bail, etc.). Le candidat repreneur doit indiquer dans son offre la liste des contrats qu’il estime nécessaires à la reprise (art. L642-2 du code de commerce). Le tribunal, s’il est en accord avec cette liste, ordonnera le transfert de ces contrats et en dressera la liste sans que les cocontractants puissent s’y opposer.

 

► Le repreneur est-il solidaire des arrières locatifs ? 

Non, depuis la loi Pacte du 22 mai 2019, les clauses dites de ‘solidarité inversée’, qui en cas de redressement judiciaire permettent au bailleur d’être payé, par le repreneur du bail, des arriérés de loyer du débiteur en redressement, ne sont plus applicables (article L622-15). L’idée est de ne pas dissuader les candidats à la reprise d’une société en faisant peser sur eux le poids de l’impayé locatif en cas de redressement judiciaire. Cela se comprend dans un souci d’ordre public économique, puisque la reprise en cas de redressement judiciaire a essentiellement pour but le maintien de l’activité et des emplois afférents.

 

► Reprend-on également le crédit bancaire du précédent exploitant ? 

Oui, en principe, le repreneur reprend les échéances futures des crédits bancaires ayant servi soit à financer l’acquisition du fonds de commerce, soit à financer les travaux d’aménagement et d’amélioration dudit fonds, à condition toutefois que la banque bénéficie d’un nantissement ou d’une hypothèque (art. L642-12 du code de commerce).

 

► Quand doit-on verser le prix d’acquisition ?

Le repreneur doit être en possession d’un chèque de banque ou à défaut d’une garantie bancaire de la totalité du prix le jour de l’audience. 

 

► Le repreneur désigné par le tribunal peut-il se désengager après le jugement de cession ?

Non. Le candidat repreneur ne peut plus ni retirer son offre une fois déposée (il peut uniquement l’améliorer à la hausse), ni se désengager de l’opération s’il est désigné repreneur par le tribunal dans le cadre du plan de cession. Il ne pourra pas non plus contester l’opération en invoquant l’existence de vices cachés ou tout autre vice du consentement. 

#RedresssementJudiciaire# #Reprise#


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Publié par Tiphaine BEAUSSERON



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