Christopher Coutanceau : la passion du monde marin

La Rochelle (17) À 30 ans, le chef rachète le restaurant de son père avec son associé, Nicolas Brossard. Dix ans plus tard, dans le cadre contemporain et marin dont il a rêvé, il souhaiterait y voir briller une 3e étoile Michelin.

Publié le 04 juillet 2018 à 13:04
L'Hôtellerie Restauration : Quand avez-vous su que vous vouliez devenir cuisinier ?

Christopher Coutanceau : Mon rêve, comme celui de beaucoup de petits garçons, était de devenir joueur de football professionnel. À 12 ans, j'ai intégré le centre de formation du FC Nantes. J'aime la compétition, mais c'est le collectif qui m'intéressait. Avec mes parents, nous habitions une chambre au-dessus de leur restaurant, si bien que j'ai été initié très tôt au métier. Et je faisais les saisons, car ils voulaient nous donner le sens des responsabilités et de l'argent. Cela a mûri lentement et un jour, sans prévenir mes parents, je me suis inscrit au lycée hôtelier de La Rochelle. Je suis une sorte d'électron libre dans la famille. Au lycée, j'ai tout de suite fait des concours comme Le Boeuf, les races à viande ou les Olympiades des métiers où je suis allé en finale internationale. On rencontrait des grands chefs. Nous étions coachés et on apprenait énormément. C'était très motivant. Comme pour le foot, j'ai eu envie de progresser et de faire un jour partie des meilleurs. Si je n'en avais pas été convaincu, je serais devenu pêcheur, ma deuxième passion.

 

Comment définiriez-vous votre cuisine ? 

Une cuisine de sincérité, d'extrême fraîcheur, ancrée dans mon territoire, la mer, tout en respectant le produit par rapport aux stocks et aux saisons. À chaque saison son produit phare, qui est un diamant dont on doit sublimer le goût tout en racontant une histoire. Je suis né à 100 mètres du restaurant, qui fait face à la mer. J'ai grandi les pieds dans l'eau, j'allais à la pêche notamment avec mon grand-père et je suis toujours passionné. Je connais le poisson sur le bout des doigts. Tous les matins, à 7 h 30, je suis à la criée pour choisir moi-même le poisson et dénicher quelques perles rares. Cela me donne des idées. L'océan, le body board, le surf, le ski nautique, la navigation, la pêche… C'est synonyme de liberté pour moi. 

 

Vous militez pour la préservation des ressources marines. Quelles actions préconisez-vous ? 

Mon engagement a débuté avec le combat contre l'élimination des dauphins pris dans les filets de pêche mené par une association rétaise, Ré nature environnement. Puis l'association Bloom a pris contact avec moi pour dénoncer la pêche électrique qui fait des ravages en tuant sans discernement tout ce qui tombe dans ses filets. La France devait se prononcer sur son interdiction dans les eaux nationales. Il fallait convaincre le Gouvernement. J'ai décidé de bouger. En cinq jours, 300 chefs de 21 pays ont signé un manifeste par lequel ils déclarent qu'ils n'achèteront plus de poissons issus de la pêche électrique. C'est le monde entier qui doit se mettre à pêcher responsable ! 80 % des poissons pêchés sont rejetés à l'eau. C'est un scandale ! Il faut continuer le combat : respecter le repos biologique des poissons pendant leur période de reproduction ; ne pêcher que ceux qui ont atteint une taille minimale assurant qu'ils se sont déjà reproduits plusieurs fois, arrêter de polluer avec les déchets et les plastiques. En nous fixant ces trois objectifs, nous sauverons les océans !

 

En janvier 2017, vous vous êtes doté d'une toute nouvelle salle. Quel était votre cahier des charges ? 

Avec mon associé, Nicolas Brossard, nous avons racheté le restaurant en 2007. Nous avons commencé par rembourser les emprunts. Dès la première année, nous avons réalisé 50 % de chiffre d'affaires de plus que mes parents en une vingtaine d'années. Nous sommes une entreprise saine. Puis nous avons pris le temps de concevoir le restaurant tel que nous le souhaitions, en parfaite harmonie avec la cuisine. Nous voulions que le client, dès l'arrivée, vive une immersion totale dans l'univers marin. Couleur sable sur les murs, plafond inspiré des fonds marins dont les 800 pampilles étincellent comme les rayons du soleil sur la mer - avec des variations selon la luminosité extérieure -, la moquette bleu abysse, le tout avec vue sur l'océan Atlantique. Sans oublier la table du chef avec une ouverture vitrée sur la cuisine selon le désir du client. La verrerie Zalto, qui est d'une grande finesse, les assiettes Sylvie Coquet créées pour nous, celles en gouttes d'eau trouvées au Japon, les couteaux inspirés de celui des pêcheurs, le mobilier sur mesure dont le chariot à pain d'inspiration panier à crevettes contemporain... tout a été pensé dans le moindre détail. Après dix-huit mois pour la conception, un mois et demi de travaux et 1,3 M€ d'investissement, nous avons la salle dont nous rêvions.

 

Vous formez un duo avec Nicolas Brossard. Comment fonctionnez-vous tous les deux ?

J'ai toujours été convaincu qu'il fallait un patron dans la salle et un dans la cuisine. Nicolas Brossard et moi sommes associés à parts égales. C'est un très grand professionnel. Chacun gère sa partie et comme nous communiquons en permanence, cela fait bientôt onze ans que notre duo marche à merveille. Avoir un associé aussi investi que moi dans cette maison était une évidence. Savoir que l'on peut compter sur quelqu'un, c'est un confort dans le travail. Nos collaborateurs sont aussi chez nous depuis des années. Si l'on veut gagner, comme au foot, on ne peut pas changer d'équipe tous les dimanches. L'équipe doit être fidèle et nous avons cette chance.

 

Quel est votre plat best-seller au Coutanceau ?

Le civet de homard, un plat intemporel et gourmand qui a vingt ans et sur lequel j'ai collaboré avec mon père. Il ne fait plus partie du menu dégustation, mais il reste à la carte car les clients y sont très attachés. Avec le homard, un ravioli de champignon, sauce gingembre, citron vert au jus de homard et des petits légumes de saison. 

 

Quel est le plat de votre carte que vous préférez ? 

La sardine de la tête à la queue au bouffi [hareng fumé entier avec la tête, NDLR]. Personnellement, je préfère les poissons bleus. La sardine a l'avantage de se manger jeune : elle présente peu de mercure, contient un gras sain pour la santé et est délicieuse. Certes, il est plus facile de faire un grand plat avec un poisson noble qu'avec une sardine, mais c'est possible. Et puis, sur un poisson, on a souvent 50 % de déchet, et avec la sardine, j'ai réussi à faire un plat avec zéro déchet. Il y a un côté pédagogique dans notre restaurant.

 

Quel est votre rapport à la viande ?

J'avais toujours un ou deux plats de viande comme un pigeon à la broche, un lièvre à la royale ou un foie gras de canard chaud. Maintenant, nous n'avons plus de viande du tout. Mon foie gras est à la lotte ! En supprimant la viande, alors qu'elle ne représentait que 1 % des ventes, j'ai simplement voulu aller au bout de l'histoire marine que nous racontons à nos clients. 

 

Vous avez des projets en vue ?

Nous avons ouvert La Yole de Chris en juin dernier grâce au rachat du local attenant au restaurant. Il s'agit d'un restaurant avec un bar de 18 mètres de long derrière lequel les cuisiniers cuisent les poissons à la demande, à la plancha, au four à bois, au barbecue argentin… en version tapas, demi-ration ou ration. Il y a 90 places à l'intérieur et autant en terrasse. Le ticket moyen est de 45 €. Il est conçu comme un lieu de vie convivial où les clients peuvent aussi acheter les produits de notre nouvelle gamme d'épicerie fine.

 

Un rêve à réaliser ? 

La troisième étoile Michelin, c'est comme la victoire au Top 14 pour un rugbyman : il tombe à genoux et il pleure [Christopher Coutanceau a aussi joué au Stade Rochelais, NDLR]. C'est la récompense suprême d'un travail d'équipe. Ce serait une fierté et un hommage pour mon père et notre région.

 

_________________________________________________________ 

Restaurant Christopher Coutanceau

Nombre de places assises : 55
Nombres de couverts/jour : 80
Effectifs en salle/en cuisine : 16 en cuisine / 14 en salle 
Ticket moyen : 170 €
Prix des menus : 70 € et 145 €
Ouverture (nombre de services par semaine) : 10 services

Directeur du restaurant : Nicolas Brossard (associé)
Chef adjoint : Vincent Schmit et Florian Pineau.
Chef pâtissier : Benoît Godillon
Chef sommelier : Nicolas Brossard assisté de Damien Beghuin

Christopher Coutanceau #Coutanceau# #NicolasBrossard# #LaRochelle# #2ÉtoilesMichelin#

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Publié par Nadine LEMOINE



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