Denis Hennequin vise la pole position "sur tous les continents, à l'exception des États-Unis"

En novembre dernier, Denis Hennequin était nommé président directeur général du groupe Accor en remplacement de Gilles Pélisson, L'arrivée de cet homme de la restauration rapide, au sein d'un des plus grands groupes hôteliers du monde, suscitait beaucoup d'attente. Le mois dernier, il présentait la nouvelle stratégie du groupe, en dessinant les principaux axes de changement.

Publié le 23 avril 2013 à 11:30

L'Hôtellerie Restauration : Vous avez été nommé à la tête du groupe Accor l'année dernière. Comment vous sentez-vous dans vos nouveaux habits d'hôtelier ?

Denis Hennequin : parfaitement bien. Ma nomination date d'il y a onze mois. Il en aura fallu neuf pour accoucher d'un nouveau projet. Cette nouvelle stratégie donne, je pense, un nouveau souffle au groupe, lui construit une nouvelle ambition et remet l'innovation au coeur de l'entreprise. Si je devais résumer la vie du groupe, je dirais que le groupe Accor a vécu trois cycles : le cycle 'pionnier', celui du 'recentrage', et vient aujourd'hui le temps de la 'dynamisation', avec l'hôtel comme seul sujet de nos préoccupations.

Pour quelles raisons avoir capitalisé autant sur la marque ibis ? En quoi est-ce innovant de décliner trois types d'ibis ?

La nouvelle stratégie de l'hôtellerie économique n'est qu'une première étape. Le pôle économique est en effet le plus rentable pour le groupe. Il représente 50 % de notre Ebit [excédent brut d'exploitation, NDLR] et constitue l'une des grandes différences par rapport à nos principaux concurrents, chez qui ce segment n'existe pas. Quant au processus d'innovation, il ne portera pas uniquement sur les marques et les chambres, même si c'est déjà une innovation majeure, mais aussi sur les espaces collectifs que nous allons transformer en espaces de vie, ainsi que sur les façades qui vont évoluer. C'est dans les espaces communs et les services généraux que le vrai travail de fond va se faire sentir, et principalement dans les ibis 'classiques', puisque ces espaces à vivre seront repensés et les chambres, comme nous l'avons dit conservés et déployés, avec la Coquelicot pour ibis et la Cocoon pour Etap.

De manière anecdotique, nous avons, depuis cette annonce, suscité un intérêt au Royaume-Uni de nouveaux franchisés, convaincus par notre changement d'enseigne. Voilà, très concrètement, une première démonstration et une preuve d'efficacité de la nouvelle stratégie des marques économiques.

Vous avez parlé de 150 M€ d'investissement. À quoi vont-ils servir ?

La problématique n'est pas la même pour chaque marque. Ces investissements vont servir aux enseignes et à toute la logistique ainsi qu'à la rénovation des espaces collectifs de nos filiales. Pour les ibis styles (ex-all seasons), il n'y a que très peu de travaux à réaliser puisque ce sont des hôtels neufs ou rénovés. Quant aux ibis budget (ex-Etap Hotel), qui devaient de toute façon engager un vaste programme de rénovation, nous allons faire en sorte que 90 % du parc soit équipé de la chambre Cocoon d'ici à 2013. Nous allons profiter du déploiement prévu pour la rénovation de ces chambres et l'élargir à une rénovation plus globale à moindre coût.

Nous savons ce que le groupe va dépenser, mais quelle va être la part des hôtels ?

Pour ceux qui n'ont que le 'bedding' [le confort du lit, NDLR] à revoir, le coût reste limité et sera variable en fonction du travail à réaliser. Pour les ibis classiques, il faudra compter environ 500 € du m² lorsqu'ils auront à rénover leurs espaces collectifs. Quant aux ibis Budget, un processus de rénovation était déjà engagé avec le déploiement de la chambre Cocoon, qui coûte environ 7 000 € la chambre (rénovation des espaces communs incluse).

Les hôtels mettront donc la main au porte-monnaie. Vous avez parlé d'un fonds marketing. Quel en est le plafond et comment va-t-il fonctionner ?

Ce fonds existe mais il n'a pas fonctionné comme il le devrait. J'ai suggéré qu'il soit géré en partenariat, cogéré avec la Fédération des franchisés Accor, et qu'il fonctionne par marque. Il fonctionnera comme un GIE [Groupement d'intérêt économique, NDLR] et de nouveaux budgets pourront, si nécessaire, être décidés de manière concertée. Je souhaite pour ce fonds une gestion collaborative. Pour mémoire, en 2010, le fonds accusait un déficit de 50 M€ ; à fin 2011, il sera revenu à l'équilibre.

Vous venez de la restauration. Pourtant, vous n'avez dévoilé que très peu de choses sur les nouvelles formes de restauration…

Nous n'avons pas encore pu finaliser les démarches concernant la restauration. Cependant, j'ai quelques idées. Là encore, il n'y a pas de réponse globale. Pour les marques haut de gamme et luxe, comme Sofitel, je pense 'glocal'. Il est clair qu'un partenariat, au coup par coup, avec un grand chef, porteur d'un savoir- faire français mais ouvert à la cuisine locale s'impose. C'est le cas au Sofitel Vienne ou au Sofitel Grand d'Amsterdam, par exemple.

Chez Pullman, puisque l'on s'adresse davantage à des voyageurs d'affaires internationaux, je suis plus enclin à travailler sur un concept de restauration qui se déclinera dans tous les hôtels. Il faut qu'il y ait là une identité commune à tous les restaurants. Chez Mercure, chaîne non standardisée, il faut reprendre les anciens concepts qui ont fait la notoriété de la marque avec une restauration plus locale, type plat du jour, et continuer à décliner une carte autour des vins du terroir et de ceux du monde entier. Chez Novotel, qui est un concept plus normé, deux types de formules différentes peuvent être étudiées, l'une pour les hôtels de centre- ville, et l'autre pour les hôtels situés en périphérie de ville, pour lesquels la demande n'est pas obligatoirement identique. Quant à ibis, je vois davantage le déploiement d'une restauration sous forme de partenariat afin de bénéficier du savoir-faire d'une marque.

Votre travail sur ibis va-t-il se répéter sur les marques milieu et haut de gamme ?

En termes de nombre de marques, non, je pense que nous avons des marques fortes sur ces créneaux. Elles ont leur identité propre et se suffisent à elles-mêmes. Je ne pense pas qu'elles soient trop nombreuses, d'autant que, plus on monte en gamme, plus la segmentation hôtelière est fine. Par conséquent, je ne transformerai pas MGallery en 'Small Sofitel' ou Mercure en 'Novotel Lifestyle'.

En termes de développement, en quoi vous démarquez-vous de votre prédécesseur ?

Tout d'abord par l'affirmation de la conviction que nous ne serons jamais un groupe uniquement franchiseur et que nous n'aurons pas le même mode de développement sur toutes les enseignes et sur tous les marchés. J'explique souvent que nous devons fonctionner sur trois jambes : à la fois franchiseur, opérateur sur tous les segments et propriétaires, mais uniquement sur l'économique et plus spécialement en Europe. La raison en est simple. L'économique est notre secteur le plus rentable en Europe. Il dégage des marges importantes, un Roce de 20 % ['Return On Capital Employed', retour sur capital investi, NDLR] ce qui justifie le fait que nous soyons propriétaires, même si, a contrario, des hôtels dits économiques, comme ceux de Motel 6 aux États-Unis, n'ont pas vocation à rester comme filiales, car leur Roce, à 4 %, est insuffisant.

Par ailleurs, nos modes de gestion resteront différenciés car ils sont adaptés à nos segments de marché. L'économique convient aux filiales - que nous soyons propriétaires ou en leasing - et à la franchise, le milieu de gamme est aussi bien adapté aux filiales - avec loyer -, aux franchises et aux contrats de management. Quant au haut de gamme, il est destiné principalement aux contrats de management. D'ailleurs, la plupart des murs de nos hôtels Sofitel ont été vendus et nous continuerons sans relâche notre politique d''asset-light' sur ce segment.
L'autre différence concerne notre rythme de développement, avec des chiffres d'ouverture de chambres plus élevés que nos prévisions. Ainsi, en 2011, nous avions prévu d'ouvrir 30 000 chambres, nous atteindrons 35 000 et avons annoncé l'accélération de ce rythme avec l'ouverture de 40 000  chambres par an pour 2012 et 2013.

Quelle est aujourd'hui votre nouvelle ambition ?

Être le numéro un sur tous les continents, à l'exception des États-Unis. Si l'on regarde spécifiquement le marché chinois, nous avons une carte à y jouer, compte tenu de la qualité de notre offre. Il existe pléthore de projets en Chine, et c'est est un marché particulier où les offres budget et économique ne sont pas encore différenciées. Je souhaite donc proposer des produits sous la 'méga marque' ibis. Nous sommes déjà très présents dans le haut de gamme avec Sofitel (22 hôtels et 35 en projet d'ici à 2015) et Pullman (10 hôtels et 60 en projet). Pour Accor, la création de la 'méga marque' ibis va nous permettre d'accélérer le développement.

Quel message voulez-vous transmettre à vos collaborateurs ?

C'est celui que j'ai exprimé au travers de la nouvelle signature : 'Open New Frontiers in Hospitality'. Elle illustre notre volonté d'être un groupe français avec une ambition internationale. Au-delà d'un slogan, elle sous- tend une nouvelle ambition et un vrai projet. Nous sommes passés d'un statut 'multi-métiers' à celui de 'mono-métier', ce qui nous permet d'être plus forts et de redonner plus de sens au futur de notre métier. Nous nous sommes désendettés en nous séparant d'actifs qui nous pénalisaient, cela nous ouvre de belles perspectives, et nous nous donnons pour objectif de devenir la référence de l'hôtellerie. Je pense que ce message a déjà été formidablement bien perçu par les franchisés, les partenaires et les collaborateurs qui l'ont adopté, car ils ont senti une ambition plus grande.


Publié par propos recueillis par Évelyne de Bast



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