À la Maison Pic, un service trois étoiles plein d'entrain et d'originalité

Valence (26) En seize ans, Anne-Sophie Pic et David Sinapian se sont approprié les lieux pour les transformer à leur image. Des changements dans lesquels l'équipe en salle est totalement impliquée.

Publié le 02 mars 2015 à 13:05

Anne-Sophie Pic et David Sinapian ont bâti la nouvelle Maison Pic de leurs propres mains. Diplômés d'une école de commerce et âgées d'à peine 23 ans, ils ont repris, suite au décès brutal du père d'Anne-Sophie Pic, l'établissement familial situé sur l'ancienne nationale 7, à Valence (26). Cinq ans plus tard, ils deviennent "les seuls maîtres à bord, se souvient David Sinapian. De 1998 à 2014, nous avons donc fait évoluer progressivement cette maison pour qu'elle soit à notre image". Les flux ont été réorganisés : une seule entrée dessert le hall, le bar, l'hôtel, les salons, le bistrot et le restaurant, contre trois auparavant. Une transformation réalisée, pour chacun de ses différents services, par "étapes successives".

Exit le décor provençal des années 1970, pour une approche plus sophistiquée, entre classicisme et modernité. À l'image de des vieux meubles qui ont été relookés par un désigner, visibles avant l'arrivée dans la salle de restaurant. Celle-ci a été rénovée à son tour en 2010. "On a tout rasé. Seuls les quatre murs ont été gardés", sourit David Sinapian.

 

"Notre goût s'est affirmé"

Le restaurant a été reconfiguré et réduit en capacité (50 couverts) pour fluidifier l'organisation. Un lustre en cristal - la pièce maîtresse Baccarat - délimite trois espaces éclairés par de larges baies vitrées donnant sur les jardins. Avec l'appui de l'architecte Bruno Borrione, Anne-Sophie Pic et David Sinapian ont travaillé les matières. Le bois est très présent, dont du palissandre aux murs. Le lieu adopte un code couleurs plus féminin - gris et rose poudré - complété par des touches japonisantes et végétales, des détails de l'histoire de la maison.

"Notre goût s'est affirmé", ajoute David Sinapian qui détaille tout le travail invisible réalisé pour le bien-être du client : "Les 19 tables sont positionnées en fonction de l'éclairage - qui s'adapte à l'environnement extérieur. Seul le centre de table est éclairé, les convives ne le sont pas pour leur laisser davantage d'intimité. L'acoustique a été étudiée : il n'y a pas de porte battante entre la salle et la cuisine, mais ce n'est pas pour autant qu'il y a du bruit."

Cohésion des équipes salle et cuisine

David Sinapian, qui s'occupe du développement du Groupe Pic, a une entière confiance en son équipe de salle et la laisse gérer. Elle se compose de treize collaborateurs, dont deux piliers de l'établissement trois étoiles Michelin : le directeur de salle, Cyril Blache, et le chef sommelier, Denis Bertrand, respectivement 22 et 41 ans de maison ! Dernier arrivé en date, le maître d'hôtel Frédéric Morin (ex Sa.Qua.Na, Honfleur), en novembre dernier. Il ne cache pas son plaisir de travailler "dans une ambiance familiale, où l'humain l'emporte avant tout. Il y une vraie cohésion des équipes salle et cuisine. La chef a à coeur de nous expliquer ses plats, nous les faire goûter. Ce sont des échanges constructifs."

Le maître d'hôtel se sent impliqué dans les nouveaux changements, tels que la table d'hôtes. "Le client peut dorénavant manger un plat en cuisine au déjeuner ou au dîner. La brigade de salle doit le sensibiliser. Mais cela induit de revoir la circulation salle-cuisine, et l'organisation lors du service", explique-t-il. Autre nouveauté : la cuisine élabore son propre pain. La brigade a reçu un prototype de corbeille en bois, qui sera posée au centre de la table et contenant différents pains présentés au client. "On ne les sert plus à la pince. Le convive se sert lui-même et rompt son pain, c'est un geste convivial. Et il y a une explication à fournir sur les pains élaborés par la chef", renchérit-il. La brigade de salle s'occupe aussi de la finition des plats : service de jus ou de bouillon, découpe de la noix de coco (plat chaud) au guéridon, etc. "Chaque client doit sentir que l'on personnalise son service", poursuit Frédéric Morin, ajoutant que "l'échange et la pédagogie qu'on lui apporte à table", va de pair.

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Les arts de la table

Les arts de la table ont demandé près de deux ans de réflexion. Sur la table nappée, c'est la maison Raynaud qui signe l'assiette de présentation dans les tons gris et l'assiette à pain blanche en forme de dôme. "Il s'agit de la zone de dressage, base de réflexion de la cuisine d'Anne-Sophie Pic", souligne David Sinapian. Astucieux, le couteau à pain, dessiné par Catherine et Bruno Lefebvre (Forges de Laguiole), est posé à la verticale : "Cela évite de salir l'assiette à pain et la nappe !". Le couteau à la forme très design a également été imaginé par le duo pour Laguiole, et la fourchette de base est en argent et siglée ASP. Enfin, Anne-Sophie Pic et David Sinapian souhaitaient une "belle pièce" sur table : un verre à eau (à pied), élaboré par la maison Baccarat. Pas de verre à vin, ni de ménagère, seule l'orchidée fait office de décor - ou une lampe grise, le soir - pour épurer et valoriser la symbiose de la table avec la salle de restaurant.

La sommellerie

La carte offre 2 200 références pour 35 000 bouteilles, issues de vignobles français. "Il y a très peu de demandes pour des vins étrangers, admet le sommelier Alexandre Luéry. La majeure partie de nos ventes est axée sur des vins d'ici, en région Rhône-Alpes." Pour les vins régionaux, les prix vont de 45 € pour le Saint-Péray 2001 à 25 000 € pour le crozes-hermitage, Domaine Paul Jabouley 1961.

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On a aimé

- La cuvée Saint-Péray. Rares sont les établissements à proposer un vin issu de leur propre vignoble. Anne-Sophie Pic et David Sinapian sont propriétaires d'une petite vigne produisant "environ 4 000 bouteilles par an". Le client se laisse généralement séduire par la présentation des sommeliers : "un vin blanc frais, léger et acidulé."

- L'infusion-café servie pendant le repas : une technique jamais vue en salle. Anne-Sophie Pic a en effet souhaité créer des accords mets-café. Au guéridon, l'équipe de sommeliers sert le cru adéquat - selon le plat au café préparé par la chef - au chemex.


Publié par Hélène Binet • Vidéo : Cécile Charpentier



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