Les conditions

Lorsqu’un locataire est titulaire d’un bail commercial en CHR, il peut vouloir sous-louer une partie des locaux pour les rentabiliser. La sous-location est différente de la location-gérance, qui implique un transfert de l’exploitation de l’ensemble des éléments du fonds au locataire-gérant.

Publié le 30 janvier 2023 à 17:08

Lorsqu’un locataire est titulaire d’un bail commercial, il peut vouloir sous-louer tout ou partie des locaux pour les rentabiliser.

La sous-location est différente de la location-gérance, car la location porte sur des locaux alors que la location-gérance porte sur un transfert de l’exploitation de l’ensemble des éléments du fonds de commerce au locataire-gérant.

La sous-location peut être autorisée pour les commerces, qu’ils soient des toutes petites entreprises (TPE), petites et moyennes entreprises (PME), des sociétés-mères et des filiales.

La plupart du temps, les commerçants concluent un contrat de sous-location :
- signé avec un sous-locataire concernant les locaux commerciaux ;
- ou du fait de l’existence d’un bail mixte : le bail porte sur des locaux commerciaux avec un local d’habitation attenant. Le gérant qui n’occupe pas tous ses locaux peut donc souhaiter en sous-louer une partie.
Lors de la rédaction du contrat de sous-location, il y a un certain nombre de précautions à prendre.

Une autorisation obligatoire du bailleur

Cette obligation d’autorisation du bailleur concerne tous les commerces. Le locataire qui entend sous-louer doit en demander l’autorisation à son bailleur. Cela permet à ce dernier de contrôler et vérifier l’existence, le sérieux et solvabilité du sous-locataire, et donc en pratique de le choisir.

Par précaution, le preneur négociera, dès la conclusion du bail avec son bailleur, une clause qui l’autorise à sous-louer, ou bien il obtiendra un écrit du bailleur en cours de bail.

Les autorisations verbales sont très risquées pour le locataire, même si la sous-location dure depuis plusieurs années. En effet, si un bailleur engage une action en justice car il n’y a pas eu de sa part autorisation écrite de sous location, le locataire qui a sous-loué aura du mal à prouver qu’une autorisation lui a été consentie et encourt le risque d’une procédure en résiliation de bail.

La sous-location peut être totale ou partielle. Lorsqu’elle est totale, le sous-locataire peut exercer un véritable droit au renouvellement à l’encontre de son bailleur (locataire titulaire du bail), et du bailleur des locaux à certaines conditions.

À l'expiration du bail principal, le propriétaire n'est tenu au renouvellement que s'il a, expressément ou tacitement, autorisé ou agréé la sous-location. L’article L145-32 du code de commerce étend ce droit au renouvellement du bail au sous-locataire partiel à l’égard du propriétaire des locaux, lorsque ceux-ci sont divisibles.

Si le bailleur n’a pas donné son accord pour la sous-location et qu’elle existe de fait, il a la possibilité :
- soit, s’il souhaite conserver son locataire, de simplement lui délivrer un commandement de faire cesser la sous-location, et au besoin faire ordonner l’expulsion du sous-locataire non-autorisé ;
- soit d’agir en justice pour faire résilier le bail en cours après, le cas échéant, délivrance d’un commandement d’avoir à cesser l’infraction sous peine d’acquisition de la clause résolutoire résultant du bail. Il n’aura pas à payer d’indemnité d’éviction au locataire qui a manqué gravement à ses obligations légales ;
- soit de refuser le renouvellement du bail au locataire, et donc au détriment du sous-locataire, qui ne pourra pas non plus revendiquer un renouvellement de son contrat de sous-location ni une quelconque indemnité d’éviction.

S’il obtient l’expulsion de son locataire, le propriétaire peut demander à fixer une indemnité d’occupation mensuelle provisionnelle à son bénéfice (et non un loyer car il n’y a plus de bail) et directement à la charge du locataire et du sous-locataire (exemples : CA Paris, 30 janvier 2019, n° 18/15509 à propos d’un entrepôt ayant sous-loué illégalement à des sociétés ; CA Paris, 6 mars 2019, n° 18/21601, boutique ayant sous-loué sans autorisation du bailleur à un restaurant).Généralement, cette indemnité d’occupation est équivalente au montant du loyer, mais pas obligatoirement.

Dans l’hypothèse où le bail a été résilié judiciairement et que le sous-locataire s’est maintenu dans les lieux malgré le départ du locataire principal, il sera redevable de la totalité de l’indemnité d’occupation (Cour de cassation 3e civ 9 juillet 2020 n° 19-15.874).

Les formalités

Le bailleur doit par ailleurs être appelé, par acte d’huissier ou lettre recommandée avec accusé de réception, à concourir à l’acte de sous-location, même si une clause l’autorise (sauf clause contraire).

Si une clause du bail commercial énonce : “Les lieux loués pourront être sous-loués sous la seule responsabilité de la preneuse qui fera son affaire personnelle des sous-locations, le bailleur ne devant jamais être inquiété à ce sujet”, cela n’exclut pas l’obligation d’appeler le bailleur à concourir à l’acte. Une éventuelle renonciation par le bailleur nécessite une formulation qui n’est pas ambigüe (Cour d'appel, Paris, pôle 5, chambre 3, 26 février 2020 – n° 18/05192).

Si une clause autorise la sous-location sans réserve (notamment sur le choix du sous-locataire), et si le bailleur refuse la sous-location, le preneur peut alors envisager de signer le contrat de sous-location en outrepassant son refus. L’action aux fins de résiliation du bail qu’intenterait le bailleur contre le locataire sera alors vaine, et le bailleur pourra même être condamné à des dommages et intérêts au profit du locataire.

Enfin, une clause du bail peut autoriser la sous-location, mais à certaines conditions (par exemple relative à la solvabilité du sous-locataire.). Si les conditions émises par le bail ne sont pas respectées par le locataire, les sanctions sont les mêmes que celles indiquées ci-dessus (à propos de l’absence d’accord du propriétaire sur la sous-location) : acquisition de clause résolutoire ou résiliation du bail. Bien entendu, ces conditions posées par le bail ne doivent pas être abusives.
Dans l’hypothèse où le bailleur n’a pas été appelé à l’acte de sous-location et qu’il a obtenu la résiliation du bail à l’encontre du locataire, il sera tout de même possible pour le sous-locataire de se maintenir dans les lieux, si le bailleur a consenti à le faire bénéficier d’une convention, par exemple d’occupation précaire orale moyennant le paiement d’une indemnité d’occupation (CA d’Aix-en-Provence 13 juin 2019 n° 16/18821).

S’il existe des difficultés entre le locataire et le sous-locataire sur la nature du contrat, et que le sous-locataire a occupé le terrain loué avant même la signature du contrat, le locataire ne peut pas reprocher au bailleur son opposition à la sous-location (CA Amiens, 5 février 2019, n° 17/01246).

Les formalités pour le locataire

Si le locataire est autorisé à sous-louer dans le bail ou en cours de bail, il doit en principe prévenir le bailleur. Il lui est conseillé de le faire oralement, mais aussi par huissier afin d’éviter toute difficulté ultérieure, même si cela peut être fait par lettre recommandée avec accusé de réception. Le bailleur doit être appelé à concourir à la signature du contrat de sous-location, que celle-ci soit autorisée ou connue de lui.

Dès réception de la demande, le bailleur a 15 jours pour indiquer s’il entend user de sa faculté de participer au contrat de sous-location. S’il ne répond pas, la sous-location est autorisée de fait.

L’autorisation du bailleur à la sous-location peut être soumise à certaines conditions de forme par le bail. La Cour d’appel de Paris a considéré que lorsqu’un bail impose au locataire principal de “faire constater par acte authentique (la sous-location) dont copie exécutoire sera remise au bailleur sans frais pour celui-ci”, cette formalité doit être respectée. En l’espèce, le juge a considéré que le fait de ne pas communiquer ledit acte au bailleur, malgré une sommation, est constitutif d’un motif “grave et légitime”, permettant au bailleur de refuser le renouvellement du bail sans offrir d’indemnité d’éviction (Cour d'appel, Paris, pôle 5, chambre 3, 10 avril 2019 – n° 17/15629).

L’autorisation peut être non écrite mais, dans ce cas, elle doit résulter d’une attitude claire du bailleur. Attention : la simple connaissance par le bailleur de l’existence d’une sous-location et le fait qu’il n’ait pas réagi ne peuvent pas en principe s’interpréter en un accord. En revanche, un comportement du bailleur, telle une lettre au sous-locataire qui l’autorise à réaliser des travaux, peut constituer un accord tacite de la sous-location.
Si la sous-location n’est pas permise, les sanctions possibles sont celles indiquées ci-dessus.

Les formalités pour le sous-locataire

Avant ou en même temps que le contrat de sous-location est signé, le sous-locataire devra demander au locataire de s’engager à procéder et à justifier auprès de lui la signification de l’acte de sous-location au bailleur. Après conclusion du contrat, le sous-locataire doit demander à son locataire de justifier de l’accomplissement de ces formalités.

En cas de doute, le sous-locataire peut prendre l’initiative de demander au bailleur une telle autorisation, pour rendre l’acte opposable à toutes les parties.

La sous-location de chambres meublées

De nombreux hôtels pratiquent la sous-location de chambres meublées pour quelques jours, à la semaine, au mois ou à l’année. Par exemple, une entreprise peut vouloir sous-louer pour 6 mois une chambre pour un cadre ou ouvrier travaillant loin de son domicile.
Il faut en principe l’accord du bailleur pour sous-louer ces chambres meublées, soit une fois à titre général pour toute la durée du bail, soit à chaque signature par l’hôtelier d’un contrat de sous-location. Cette dernière solution est extrêmement lourde.

L’hôtelier a donc tout intérêt à bien négocier et le prévoir dès la conclusion du bail, car une demande en cours de bail peut l’exposer à un refus ou à un accord moyennant une augmentation de loyers.

Le coworking

Certains restaurateurs souhaitent mettre à disposition leur cuisine moyennant une rétribution.

L’activité de coworking pourrait s’apparenter, aux yeux d’un bailleur propriétaire des murs, comme de la sous-location (par exemple, sous-location d’une cuisine à une autre personne pour y préparer des plats) et donc requérir son accord. Comme indiqué, sauf s’il y a une clause contraire du bail, la sous-location totale ou partielle est interdite, sauf accord du bailleur (article L145-31 alinéa 1er du code de commerce). À défaut, ce dernier peut obtenir la résiliation du bail aux torts de son locataire (ou l’acquisition de la clause résolutoire prévue au bail).

Le propriétaire devra aussi être appelé à l’acte et y concourir (voir ci-dessus). Il est donc conseillé de demander l’accord du propriétaire si l’exploitant du commerce compte sous-louer uniquement ses locaux, sauf stipulation contraire prévue au bail.

Cependant, une autre possibilité existe : la mise en location-gérance à durée déterminée de l’établissement. Depuis l’entrée en vigueur de la loi Soilihi, le propriétaire d’un fonds de commerce peut mettre celui-ci en location-gérance sans l’avoir préalablement exploité (auparavant, il fallait une condition d’exploitation du fonds de commerce pendant deux ans).

Dans de nombreux baux, la sous-location des locaux est interdite sans l’accord du bailleur, mais la location-gérance du fonds est permise. Il faut donc vérifier qu’il n’existe pas de clause interdisant au commerçant de conclure un contrat de location-gérance ou soumettant à accord du bailleur la personne du locataire-gérant.



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