Olivier Nasti : "Dans ma cuisine, l'émotion prime sur le visuel"

Kaysersberg (68) Près de Colmar, Olivier Nasti a inscrit sa cuisine d'auteur avant-gardiste dans le terroir alsacien dont il respecte le patrimoine. Rencontre avec le chef 2 étoiles Michelin depuis 2014 et MOF 2007.

Publié le 28 mars 2019 à 11:12

L’Hôtellerie Restauration : Quand avez-vous su que vous vouliez devenir cuisinier ?

Olivier Nasti : J’ai grandi en Franche-Comté. Tout jeune, je gagnais déjà de l’argent en vendant les poissons que je pêchais, les fruits ou le foin que je ramassais pour les paysans. Je voulais être indépendant et j’aimais les métiers de bouche, mais j’aurais pu faire un CAP en boulangerie ou charcuterie. Ce fut la cuisine et je me disais que ce métier allait justement me permettre de gagner ma vie. J’ai eu la chance de faire mon apprentissage dans un établissement 2 étoiles Michelin à l’époque, L’Hostellerie du Château Servin auprès du chef Dominique Mathy. Il m’a transmis la rigueur, la quête de l’excellence et la passion de la cuisine. Ce cocktail a été déterminant pour moi. Je l’avais aidé à préparer le concours Un des meilleurs ouvriers de France et je rêvais d’obtenir le titre à mon tour. J’ai travaillé dans l’idée d’avoir un jour mon restaurant, de faire de la grande cuisine et avec une belle hôtellerie, car j’ai une âme d’entrepreneur.

 

Que représente le concours Un des meilleurs ouvriers de France pour vous ?

Être MOF, c’est avoir une âme de combattant. C’est un titre qui se mérite. Je l’ai obtenu à la troisième tentative. Pour la première en 2000, je n’étais pas prêt. En 2004, en demi-finale, j’ai fait tomber ma timbale de macaronis et, évidemment, j’ai été éliminé. Je m’y suis remis pour 2007, parce que j’aime les challenges, parce que j’en rêvais depuis si longtemps et que je ne voulais rien lâcher. Pour moi, les MOF, ce sont de grands sportifs qui se remettent en question. J’en ai rêvé et je vois aujourd’hui les jeunes qui regardent mon col bleu-blanc-rouge avec admiration. Il fait toujours rêver.

 

Comment définiriez-vous votre cuisine ?

C’est une cuisine qui prend ses racines dans le respect et la connaissance des produits, dans son terroir alsacien et la maîtrise des bases des techniques de la cuisine française. Elle est avant-gardiste et classique par les techniques, alsacienne mais pas régionaliste. N’étant pas alsacien, je n’ai pas été bridé par le passé. J’ai un amour profond des traditions de la région et je me suis beaucoup documenté sur l’histoire de cette cuisine. Je m’en suis imprégné et je donne ma version de ces plats tout en préservant la mémoire et l’émotion. L’émotion prime sur le visuel, elle prime sur tout. Par exemple, avec les amuse-bouches, je propose un tour d’Alsace au travers de ses spécialités telles que je les conçois.

 

Vous prêchez pour la redécouverte du gibier. Pourquoi ?

Au quotidien, la nature m’est essentielle. C’est une échappatoire. J’ai beaucoup pêché dans ma vie, dans les plus belles rivières du monde. Il y a une dizaine d’années, je me suis intéressé à la chasse et au gibier. Comment vivent les animaux ? Que mangent-ils ? Quelles sont les périodes où la viande est la plus goûteuse selon les espèces, etc. En fait, le gibier a toujours été travaillé de la même façon. Or, il y a une saisonnalité du gibier comme il y en a une pour les poissons. Suivant leur alimentation, qui change en fonction de la saison, la chair n’a ni le même goût ni la même texture. Si bien que j’en tiens compte lors de la conception du plat et de ses garnitures. Un jus de cerise apporte le côté floral tandis qu’une sauce grand veneur s’accorde mieux avec une viande au goût plus corsé. Même la façon dont les animaux sont tués impacte la viande. Les chasseurs qui travaillent pour moi savent que j’exige que les bêtes ne souffrent pas, donc qu’elles soient abattues en touchant les parties vitales. Mais de janvier à mai, il n’y a pas de gibier à la carte. Ma cuisine ne se résume pas au gibier.

 

En 2018, vous avez investi 130 000 € dans une nouvelle salle. Quelle était votre motivation ?

Je sentais qu’il fallait un écrin en cohérence avec l’histoire que nous racontons. Je n’étais plus en adéquation avec la décoration. Je voulais une ode à la nature, la chasse, la pêche. La nouvelle salle recentre ma cuisine sur l’Alsace. Elle la met en valeur et peut-être que les équipes expliquent encore plus ce que nous faisons. Depuis deux ans, nous avons beaucoup travaillé sur l’expérience client. Et le restaurant, qui s’appelait jusque-là le 64°, est devenu la Table d’Olivier Nasti.

 

Votre plat best-seller ?

L’anguille du Rhin ‘au vert’ légèrement fumée et laquée aux agrumes représente tout le travail que j’ai réalisé sur le terroir. À l’origine, il s’agit d’un plat populaire du nord de la France qui a emprunté le Rhin. C’est soupe d’herbes dans laquelle est cuite l’anguille. Je m’en suis inspiré.

 

Quel est le plat de votre carte que vous préférez ?

L’endive pleine terre de Benoît, brûlée au barbecue, pamplemousse en condiment, caviar impérial Petrossian. Au fil des saisons, je garde le caviar et je change le légume : petits pois, tomates gouttes, etc.

 

Quel repas récent vous a époustouflé ?

Un repas au Cheval Blanc by Peter Knogl, restaurant du Grand Hôtel Les Trois Rois à Bâle, en Suisse. J’aime la subtilité de la cuisine de Peter Knogl [3 étoiles Michelin, NDLR]. Je me souviens d’une noisette de chevreuil sauce au sang remarquable. La limpidité de sa cuisine m’emballe.

 

Un rêve à réaliser ?

Avec mon épouse, Patricia, nous aimerions transmettre l’entreprise à nos enfants quand elle est au firmament. C’est-à-dire en bonne santé financière, avec une image positive et, si possible, 3 étoiles Michelin. Manon est aujourd’hui responsable de la qualité du service client. Quant à Clara, elle étudie à l’école hôtelière de Lausanne. 

 

Olivier Nasti Olivier Nasti #lechambard# #kaysersberg#


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Publié par Nadine LEMOINE



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