L’actualité
L’édito
WK\WJZM
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Les professionnels
Les restaurants de plage
de La Baule et
La mise en application du texte de 2006 va conduire à la
disparition de nombreux établissements pourtant très prisés des
touristes français et étrangers.
L
es plages font partie du domaine
public maritime (DPM), qui
est par nature inaliénable et
incessible. En principe, il ne peut
y avoir d’occupation privative mais
la loi permet des concessions. Avant le
décret plage de 2006, l’État accordait
la concession pour une durée maximale
de quinze ans. Le concessionnaire (la
commune par exemple) pouvait à son
tour sous-traiter 30 % de la surface à des
exploitants (moyennant une redevance).
Pour les plages artificielles, la durée
maximale pouvait aller jusqu’à trente
ans, voire quarante ans pour des travaux
d’importance exceptionnelle, et la surface
sous-traitable était fixée à 75 %.
En raison de l’évolution de l’environnement
juridique - notamment avec la loi relative
à l’aménagement, la protection et la mise
en valeur du littoral du 3 janvier 1986 qui
encadre l’aménagement des côtes et prône
le libre accès du public sur les sentiers
littoraux -, et du développement du
tourisme sur les plages, ces dispositions
ont été modifiées.
Le décret plage de 2006 sur les
concessions en détermine les conditions
d’application.
Dès sa publication, ce texte a été contesté.
Les plagistes lui reprochent une trop
grande sévérité en matière de densité
maximale d’exploitation de la plage, de
durée annuelle d’exploitation, d’exigence
de démolition des constructions en dur et
d’obligation de démontage annuel.
Les principales dispositions
Le décret s’applique lors du
renouvellement des concessions.
La Fédération nationale des plages
restaurants (FNPR) se bat depuis 2006
afin d’obtenir des aménagements. Selon
son président,
René Colomban
:
“Nous
ne remettons pas en cause l’intégralité du
décret mais nous dénonçons son aspect
trop restrictif ainsi que les effets néfastes
prévisibles de son application pour
l’économie touristique.”
Â
La concession qui lie la commune
à l’État est accordée pour une durée
maximale de douze ans
, que la plage soit
naturelle ou artificielle.
Â
L’exploitation est autorisée dans
la limite de 20%du linéaire et 20%
de la surface
Un minimum de 80 % de la longueur
du rivage par plage et de 80 % de la
Fin de l’été indien pour
les restaurants de plage
E
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Les établissements de la baie guérandaise, ouverts à l’année, ont
été assignés par la préfecture à fermer le 12 novembre au plus tard.
I
l existe une douzaine de restaurants
de plage ouverts à l’année entre La
Baule et Pornichet (44). Fin août, le
préfet,
Henri-Michel Comet
, leur a
adressé un courrier recommandé dans
lequel il leur demande de fermer
“pour
des raisons de sécurité”
et de
“retirer
tous les éléments démontables au plus
tard le 12 novembre 2014”.
Principe de
précaution, lié aux tempêtes qui se sont
abattues l’hiver dernier sur le littoral,
et mise en œuvre du décret plage. Le
tollé est immédiat. “
Nous sommes
dans le non-sens social, économique
et touristique. En 2006, l’État nous
avait conféré le droit d’exploiter et de
maintenir nos installations sur site dès
lors où nous étions ouverts 48 semaines
par an”,
rappelle
StéphaneMalhaire
,
gérant du Nossy Bé à La Baule (44).
“Depuis dix-sept ans, nous organisons
des événements majeurs pour les Baulois
et les touristes qui visitent la station hors
saison. J’emploie neuf salariés à l’année.
Le chiffre d’affaires réalisé de novembre à
mars est déterminant dans la rentabilité
de notre établissement. Comment pallier
le manque à gagner ? Les engagements
financiers auxquels notre société doit faire
face restent les mêmes !”
La décision est d’autant plus mal vécue
qu’un dialogue était en cours avec la
municipalité et que le futur gestionnaire
des concessions maritimes pour La Baule
n’est toujours pas connu.
Soutien des clients
Démonter en totalité ces établissements, en
dur dans la plupart des cas, est quasiment
impossible.
“Ce ne sont pas des paillottes
mais de vraies structures qui paient une
taxe foncière et une redevance annuelle”,
constate
François Effling
, longtemps
président national des saisonniers de la
CPIH. Il craint en outre un effet négatif
pour la station, un sentiment largement
partagé par StéphaneMalhaire.
“Hors
saison, si les restaurants de plage ferment,
l’attractivité va être divisée par trois ou
quatre.”
Plusieurs pétitions pour défendre
la cause des restaurants ont vu le jour et
une page Facebook intitulée ‘Contre la
fermeture des restaurants de plage l’hiver
à La Baule’ amême été créée par des
clients sous le choc.
Laurent Joneau
, chef
et patron du restaurant La Signature du
Lors du conseil des ministres du 1
er
octobre, le nouveau
secrétaire d’État chargé des Transports, de la Mer et de la
Pêche,
Alain Vidalies
, a indiqué son attachement à
“une
politique maritime au service de l’emploi, de l’environnement,
de l’innovation et de l’éducation”.
Il a parlé de croissance
et d’emploi liés à la marine marchande, aux grands ports
maritimes et au
“soin apporté au tourisme littoral”
.
À un an et quelques jours de la date d’application du
décret qui remet en cause l’activité commerciale des
établissements de plage,
allant jusqu’à la fermeture définitive
de certains restaurants, notamment sur la Côte d’Azur,
comment la profession doit-elle réagir ? Avec optimisme,
incrédulité, scepticisme, confiance ? La réunion entre les
différents acteurs concernés annoncée avant l’été pour
septembre a été reportée suite au récent remaniement
ministériel et les professionnels sont toujours dans l’attente
d’une date. Quelques tournures de phrase dans un discours
officiel n’ont malheureusement plus l’impact escompté. Sur le
terrain - ou plutôt le sable - l’inquiétude et l’incompréhension
grandissent.
La France a-t-elle aujourd’hui les moyens de se priver
d’activités commerciales et d’emplois existants ?
Le législateur, en 2006, n’avait pas de boule de cristal pour
mesurer la réalité sonnante et trébuchante de la France des
années 2014-2015... Des solutions - oui, ici aussi - doivent être
trouvées. L’avenir de ces entreprises a une influence directe
sur l’attractivité des destinations. Et ce n’est pas parce qu’elles
sont très connues qu’elles vont pouvoir conserver leur attrait
sans les établissements qui ont contribué à leur succès.
SYLVIE SOUBES