Autour de son directeur, David Fusté, la jeune équipe du Domaine d'Orvault à Nantes entend redonner ses lettres de noblesse à un établissement essoufflé. La nouvelle orientation (repositionnement en 3 étoiles, adhésion à Bleu Marine...) semble prometteuse pour l'avenir.
Olivier Marie
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David Fusté, le directeur du
Domaine d'Orvault souligne : "Je me souviens avoir demandé une étude de marché
sur les établissements connus sur Nantes. Le Domaine d'Orvault revenait
systématiquement". Dire que l'hôtel-restaurant le Domaine d'Orvault est une
institution sur Nantes relève de la lapalissade. Pour autant, les jugements que les
Nantais semblent porter sur cette maison convergent : "Une grande table... dans le
passé !". "C'était un très bon restaurant, étoilé je crois, mais qui
a perdu..." Oui, le Domaine D'Orvault, ancienne propriété de M. et Mme Bernard,
affichait jusqu'en 1995 un macaron au Guide Rouge. Mais depuis, la maison
commençait à décliner. Selon David Fusté, "il y a six ans, le Domaine
d'Orvault présentait un chiffre d'affaires de quelque 9 MF. Le dernier exercice affichait
environ 4 MF". Manque de motivation des propriétaires dans les lieux depuis 25
ans, gestion du personnel certainement en inadéquation avec l'activité (une vingtaine de
personnes avec jardinier et comptable etc.) peuvent expliquer ces difficultés.
Depuis le mois de septembre 1999, l'établissement connaît un renouveau grâce au rachat
du fonds de commerce (1,40 MF) par Sylvain Lejeune. Fin connaisseur du milieu hôtelier
ayant successivement occupé des postes à responsabilités chez Envergure avant de monter
sa propre société de conseil en formation et management dans l'hôtellerie Enjeux, "il
est arrivé au Domaine d'Orvault un peu par hasard. Le potentiel l'intéressait. Pour lui,
cette affaire représente un gros effort financier. C'est quelqu'un qui a le sens des
valeurs et une philosophie proche de la mienne", lâche David Fusté. Pour donner
un nouvel élan au Domaine d'Orvault, Sylvain Lejeune s'entoure d'une jeune équipe
construite autour d'un directeur, David Fusté, accompagné dans cette tâche de son
épouse, Gwenaëlle et d'un chef, Thierry Bouhier. Tous les deux ont juste la trentaine et
cette affaire représente un véritable tremplin pour chacun. Un premier poste de
directeur pour l'un et de chef pour l'autre. A l'instar de ces deux piliers, la nouvelle
orientation prise par l'établissement repose d'ailleurs fortement sur les hommes et les
rapports humains. "Nous n'avons pas totalement bouleversé l'équipe existante.
Certains sont restés, notamment les deux chefs de rang, précise David Fusté. D'autres
sont partis comme le jardinier, la comptable, une femme de chambre..."
Aujourd'hui la mentalité dans l'établissement a évolué, étonnant parfois les anciens.
"On se parle, je requiers souvent leur avis, je leur sers la main... des choses
dont ils n'avaient pas l'habitude. On a un second qui est encore là et qui, en deux ans,
n'avait jamais vu le restaurant, les chambres... Certains ont été sidérés par
l'évolution que nous avons apportée. Ce changement demande du dialogue, du temps... ce
n'est pas facile." Pour motiver le personnel, un plan formation et des
intéressements concernant l'ensemble des salariés voient le jour. L'équipe de 19
personnes passe par ailleurs aux 39 heures l'année prochaine. Nouveau propriétaire,
nouvelles méthodes. Il faut dire que le travail ne manque pas dans cet établissement qui
reste un superbe outil.
Niché dans un écrin de verdure à l'entrée de Nantes, le Domaine d'Orvault bénéficie d'un environnement idéal. "Nous sommes à dix minutes du centre de Nantes, à proximité immédiate du tramway et du périphérique et à 15 minutes de l'aéroport." La clientèle d'affaires devrait donc y trouver son compte, tout comme la clientèle touristique. Un chemin de grande randonnée borde en effet cette propriété installée dans un parc d'un hectare agrémenté de jeux pour enfants, d'un terrain de tennis, d'une piscine... Pour les accueillir, le Domaine d'Orvault décline 30 chambres personnalisées (romantique, japonisante, moderne...), un restaurant offrant jusqu'à 80 couverts (limité à 50 en individuels) et deux salons de 25 et 45 couverts. "Mais l'ensemble souffrait d'une connotation années 70 très marquée", et surtout d'une réputation élitiste dans les prix et dans la catégorie, 4 étoiles pour l'hôtel. "Ce positionnement ne se justifie plus. Les prestations proposées ne correspondent pas à un 4 étoiles et nous coupent d'une certaine clientèle. Tant qu'il n'y aura pas de casino sur Nantes, je pense qu'il n'y a pas la place pour un 4 étoiles. Et ce type de catégorie avec 30 chambres est ingérable !" D'où la décision, en arrivant dans les lieux, de repositionner l'hôtel sur un 3 étoiles et de l'affilier à Bleu Marine du groupe Envergure (franchise et ration sur le prix des chambres représentent un coût d'environ 90 000 F par an). "La chaîne apporte à l'établissement une puissance commerciale pertinente. Mais cette adhésion ne concerne que l'hôtellerie", précise David Fusté. "Nous avons opté pour Envergure car l'esprit d'entreprise, familial et personnalisé nous correspondait davantage. Pour le reste, nous demeurons indépendants."
Une première tranche de travaux de 1,20 MF est donc rapidement entreprise. Elle
concerne en premier lieu l'accueil, entièrement repensé dans un style plus moderne et
chaleureux. Certaines chambres (dont trois entièrement refaites), une salle de séminaire
et le restaurant qui arborent désormais de belles statues en argile, bénéficient d'un
rafraîchissement nécessaire. Par ailleurs, le Domaine d'Orvault propose désormais à sa
clientèle un ensemble de prestations inhérentes à un beau 3 étoiles comme une salle de
remise en forme-sauna, des équipements de communication (prises Fax et modems, bureaux
plus grands, tous les téléphones changés...), des TV équipées de Canal + et du
câble, des petites valises séminaires, etc. "Certaines prestations correspondent
en effet aux normes Bleu Marine, d'autres sont plus personnelles et permettent de nous
singulariser."
En cuisine, la nouvelle équipe (resserrée autour de 4 personnes) entend aussi se
démarquer de l'existant. Ayant travaillé dans des établissements de renom (Arrambide,
Meneau...) Thierry Bouhier propose une "cuisine qui repose sur des bases
classiques avec une touche très personnelle", respectant une homogénéité et
une honnêteté dans le produit. A 31 ans, il occupe donc son premier poste de chef et a
carte blanche pour attirer une nouvelle clientèle et récupérer l'ancienne. Pour ce
faire, outre le talent du chef, le restaurant proposera des prix plus raisonnables (ticket
moyen à 250 F) avec notamment un menu Retour de marché à 135 F, un menu Saveurs à 195
F, Délice à 275 F et des originalités comme ses plats diététiques, son menu enfant
etc. Sur un plan plus professionnel, Thierry Bouhier adhère à l'Association Cuisinerie
Gourmande, présidée par Gérard Ryngel "qui m'a notamment aidé en me
renseignant sur quelques petits producteurs", explique le chef. L'association
travaille avec Qualité France, une éthique professionnelle en accord avec la nouvelle
orientation du Domaine d'Orvault. "Nous pensons également à la norme Iso 9001.
C'est très contraignant, mais nous allons travailler dans ce sens." En cuisine
comme ailleurs, les objectifs ont le mérite de la clarté. David Fusté ne s'en cache
pas, "nous aimerions retrouver le macaron Michelin..."
Ces objectifs en cuisine s'inscrivent dans une politique plus générale. La nouvelle orientation devrait permettre de toucher une clientèle plus large et mixte, "sans pour autant mélanger le tourisme, les affaires (effort particulier pour capter la clientèle séminaire) et la famille. Nous avons des potentialités, à nous de contenter tout le monde." Cette démarche demande donc une intense activité commerciale (le budget commercialisation représente 350 000 F la 1re année) avec notamment la création d'un site Internet et une deuxième tranche de travaux (3 MF) en 2001. Aujourd'hui, deux orientations se détachent : augmentation du potentiel de 12 chambres ou rénovation de l'existant. L'essentiel étant tout d'abord de rééquilibrer l'établissement en renforçant l'hôtellerie représentant 40 % de l'activité. "Nous voulons arriver à un 50/50", insiste David Fusté qui poursuit sur les chiffres, "nous visons un chiffre d'affaires de 5,50 MF avec un TO de 60 % (il est actuellement de 41 %) représentant 15 chambres en moyenne par jour, pour un RBE de 20 %." Mais David Fusté reste néanmoins prudent en avouant, "nous avançons sur des bases fragiles que nous ne maîtrisons pas encore parfaitement. Chaque mois reste pour nous une découverte". Mais, si les travaux futurs sont à l'avenant de ce qui a déjà été réalisé, on ne voit pas comment le Domaine d'Orvault et ses nouveaux responsables échoueraient dans leur pari.
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L'HÔTELLERIE n° 2695 Magazine 07 Décembre 2000