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Hôtel Carayon
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Un hôtelier "saisonnier" à l'année

Perdu dans le sud de l'Aveyron, l'Hôtel Carayon, charmant
2 étoiles familial, accueille tout sourire les clients douze mois sur douze. Une activité à l'année rendue possible grâce à d'importants investissements financiers, mais aussi grâce à la mise en avant de produits touristiques naturels et le démarchage des têtes grises.

Claire Cosson

Il arrive en coup de vent et ne tient pas en place. Elle, penchée sur le planning de la semaine, vérifie un à un le nombre de groupes enregistrés au cours des prochains mois avant d'aller saluer les clients, tout juste installés dans le restaurant panoramique pour déjeuner. "Claudette, qu'en penses-tu... ?", lance Pierre Carayon à son épouse, une nouvelle idée en tête toutes les dix secondes. Avec le ton gentil pour le dire, elle lui répond à voix basse, le sourire aux lèvres : "Pierre, tu as raison... mais tu me fatigues !" Suivre ce fils et arrière-petit-fils d'aubergiste s'avère, de fait, parfois véritablement épuisant. Bon pied mais aussi bon œil, notre homme a en effet une pêche d'enfer !
Levé à six heures du matin pour aller au marché, il lui arrive souvent de se coucher aux aurores afin de partager pleinement les soirées dansantes qu'il concocte pour ses clients. Ce qui n'empêche jamais pour autant ce dynamique quinquagénaire de se ruer sur le téléphone dès la première sonnerie, de parcourir chaque jour son domaine hôtelier en voiturette de golf (parc de 3 hectares), s'inquiétant des travaux effectués par le jardinier, ou bien encore de faire sans cesse des allers et retours au
rectorat de l'académie de Toulouse où il a été récemment nommé conseiller de l'enseignement technologique. Sans oublier ses fréquents déplacements dans les salons touristiques (Mit International) et ses très nombreuses visites chez les autocaristes.
Même son père, aujourd'hui âgé de 92 ans, qui lui rend visite quotidiennement, l'avoue volontiers : "C'est un courant d'air." Un courant d'air qui sait néanmoins parfaitement dans quel sens il doit prendre le vent. Ce n'est pas un hasard du reste, si dans le village et aux environs, Pierre Carayon fait des envieux.

Savoy, Dorchester...

Pierre Carayon déclare : "Afficher actuellement presque complet de Pâques à la Toussaint et réaliser un chiffre d'affaires annuel de l'ordre de 8 millions de francs", à Saint-Sernin-sur-Rance (290 m d'altitude), petit bourg de 500 âmes, perdu au fin fond du sud de l'Aveyron, relève encore de nos jours de l'exploit. Alors, imaginez vingt-cinq ans en arrière... La chose était réellement inconcevable ! D'autant que Pierre Carayon, certes né au numéro 8 de l'auberge familiale (créée en 1876), n'envisageait guère en ce temps-là d'endosser la tenue d'hôtelier-restaurateur. "Ma licence d'anglais en poche, je me destinais plutôt à l'enseignement", confie avec malice l'intéressé. Et d'ajouter : "Mais quand mon frère aîné a choisi d'orienter sa carrière ailleurs que dans l'hôtellerie, j'ai facilement changé mon fusil d'épaule." Le jeune homme avait, évidemment, maintes fois travaillé avec ses parents le week-end. C'est donc sans grandes difficultés qu'il suit une formation à l'école hôtelière de Toulouse. Il veut toutefois en connaître davantage. Alors Pierre Carayon s'en va faire ses classes à Paris chez Maxim's, puis franchit la Manche pour se faire la main dans de prestigieuses maisons comme le Savoy, le Dorchester... A vingt-cinq ans, l'enfant du pays revient gonflé à bloc au village afin de reprendre les rênes de l'affaire familiale. Très vite, le chef de cette petite entreprise décroche les récompenses culinaires : fina-
liste du concours national de la Cuisine régionale organisé par les Logis de France dont il est devenu membre, 13 au Gault et Millau, une étoile au Bottin Gourmand, répertorié au Guide Rouge... Mieux encore ! Notre cuisinier entre au sein de l'Entente des cuisiniers et hôteliers de métier.

Taper le carton durant les soirées d'hiver

Reste que la gastronomie ne nourrit pas toujours suffisamment son homme. "Je disposais de 20 chambres à peine, mais je voulais aller de l'avant ! Or la saison ne dure guère plus d'un mois et demi. Il m'était donc impossible de prétendre rentabiliser l'entreprise sur une aussi courte période", se rappelle Pierre Carayon.
En clair, il était impératif de rallonger la saison touristique pour éviter de taper le carton durant les longues soirées d'hiver. Un problème qui relevait à l'époque presque d'un casse-tête chinois. Car, malgré ses richesses naturelles et culturelles, cette région de France était encore assez peu approcher. "C'était comme si j'agressais les paysans du coin lorsque je leur avait parlé de mon projet de monter des circuits découverte au départ de mon hôtel et de les y impliquer", raconte le patron de l'Hôtel Carayon. A la fin des années 80, vendre les produits du terroir et mettre en avant le tourisme rural n'était de fait pas très tendance. Qu'à cela ne tienne ! L'Aveyronnais pure souche y croit, lui, dur comme fer et persiste. D'autant plus que l'hôtel constituait réellement une bonne base de départ pour des excursions (nature, gastronomie, culture) à même de bien se commercialiser, tant en automne qu'au printemps, auprès d'une clientèle de groupe (notamment les personnes dites du 3e âge). Aujourd'hui d'ailleurs, les touristes francophones (Belges, Suisses, Français) aux cheveux gris défilent bien sûr en nombre important dans l'établissement 2 étoiles de Saint-Sernin-sur-Rance. "On est traité ici comme des rois", témoigne M. Baderot, président de l'association vosgienne UNRPA. Et de conclure en riant, "les excursions sont intéressantes et la table excellente". Pierre Carayon n'a pas été élu, en 1995, vice-président national des Tables de charme et traditions pour rien.

Nombre de chambres multiplié par trois

Pour parvenir à séduire cette clientèle, la famille Carayon a néanmoins été amenée à faire certains choix stratégiques, lourds de conséquences financières. "A commencer par l'agrandissement de la capacité de notre hôtel", souligne Claudette Carayon. En vingt ans, les propriétaires ont ainsi multiplié par trois leur nombre de chambres, soit 60 à l'heure actuelle. Des apports financiers mutuels, des emprunts bancaires, une équipe soudée (deux collaborateurs vont prochainement recevoir la médaille du travail après plus de 20 ans de présence dans la maison) et la volonté farouche des deux époux ont également contribué au succès de ce concept.
Car, à travers l'Hôtel Carayon, il s'agit bien de la création d'un concept d'hôtellerie de loisirs inédit. "Nous avons en effet entièrement réaménagé l'affaire familiale pour la transformer en un véritable complexe hôtelier de loisirs", indique Pierre Carayon. Salle creusée dans la roche pour l'accueil des groupes et les animations, mini-golf, tennis, deux piscines agrémentées d'un toboggan aquatique, plan d'eau agencé sur les bords de la Rance pour les fous furieux de pêche, terrain de pétanque, parc avec daims en liberté, sauna, salle de remise en forme, garage privé, parking pour autocars, vélos tout terrain, salon de billard, buanderie libre-service gratuite, salle de jeux pour enfants... Chacun peut ici trouver son bonheur.

Meilleur produit touristique hors saison

Idem pour les circuits touristiques qui comprennent la pension complète (boisson comprise), un guide-accompagnateur, des animations tous les soirs, des cocktails de bienvenue et d'adieu... Baptisé "L'Aveyron au Naturel" (gorges du Tarn, cuirs de Millau, cave de Roquefort, Albi, etc.), ce produit a du reste été sacré Meilleur produit touristique hors saison aux trophées du
Tourisme Midi-Pyrénées en 1989. A noter que les séjours de 8 jours/7 nuits se négocient entre 2500 francs et 2300 francs suivant la période choisie.
Au cours des deux mois d'été (juillet/août), le champion de l'accueil de groupe en tourisme en milieu rural se consacre en effet exclusivement à ses clients habitués, parmi lesquels figurent des noms aussi célèbres que Michel Serrault, Bernard Pivot, André Pousse ou bien encore Pierre Mondy ou José Bové. Tout au long de l'année, un quota de chambres est réservé aux VRP en provenance principalement de la chaîne Inter-Hôtel, tandis qu'en périodes très creuses, l'établissement démarche d'arrache-pied les prospects "séminaire".
Un travail commercial énorme au quotidien et "un planning qui doit être tenu au jour le jour afin de ne laisser passer aucune erreur", souligne André Serin, bras droit de Pierre Carayon. Toutefois, grâce à ce savant mix-clientèle, l'Hôtel Carayon tourne finalement toute l'année. Une gageure pour certains peut-être ! Mais sûrement pas pour les 10 permanents et les 20 saisonniers qu'emploie chaque année l'entreprise. Et encore moins pour la commune qui, au bout du compte, bénéficie elle aussi de cet apport touristique. * 

 

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Le patron de l'Hôtel Carayon, fondé en 1876, travaille en équipe. De deux ses collaborateurs vont prochainement recevoir la médaille du travail.

Avec Pierre Carayon, c'est la
quatrième génération qui dirige l'hôtel
familial"

 

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En 20 ans, l'établissement est passé de 20 à 60 chambres afin de se donner les moyens de recevoir des groupes.

Champion
de l'accueil de
groupe du
troisième âge
en milieu rural"

Hôtel Carayon

- 60 chambres 2 étoiles
- 1 restaurant panoramique de 100 couverts
- 1 bar
- 1 parc de 3 hectares
- 2 piscines
- 1 toboggan aquatique
- 1 mini-golf
- 1 tennis
- Pédalos
- 1 sauna
- 1 salle de remise
  en forme

- 1 garage privé
- 1 parking
- 1 salle de billard
- 1 salle de jeux pour enfant
-- 1 buanderie libre-service gratuite

 

L'été, la clientèle habituelle peut s'adonner aux jeux d'eau avec deux piscines et un toboggan aquatique.

  


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L'HÔTELLERIE n° 2668 Magazine 1er Juin 2000

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