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RESTAURATION
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Communiquer en professionnel

L'expérience réussie d'un in dépendant

Pour un restaurateur, communiquer est une nécessité. Cela s'étudie, se réalise avec soin et avec un appui professionnel. Cela se paye aussi, mais avec un retour d'investissement. Témoignage du chef et patron du Sébastopol, à Lille.

Par Alain Simoneau

Les journalistes et les institutionnels ainsi que les clients de Lille ont à présent repéré le restaurant Le Sébastopol, place du même nom à Lille, fermé deux ans après le départ de Ghislaine et Jean-Paul Arabian. Ils reçoivent des courriers, un dépliant format lettre, des dossiers de presse cohérents dans la forme et le discours. A l'occasion de la Coupe du Monde, Jean-Luc Germond a pris l'initiative d'inviter les femmes esseulées sur un thème "musée et gourmandise". Pas par hasard. Mais parce que l'association art culinaire et beaux-arts est à la base de la stratégie de communication appliquée par la maison. Car cette modeste maison, un peu plus de 4 MF de CA avec six personnes, y compris les patrons et un apprenti, a construit une stratégie de communication.
Jean-Luc Germond a été seize ans durant le bras droit de Bardot au Flambart (2*). Il s'est installé en mars 1994 au Sébastopol avec son épouse Nicole, y a bâti une clientèle pendant ces années très difficiles pour la gastronomie nordiste : clientèle d'affaires, férus de gastronomie et clientèle de fêtes et événements. Discrètement, trop sans doute. "Je me suis aperçu qu'au bout de quatre ans de présence nous n'avions pas encore d'image ou de vraie notoriété, témoigne-t-il. Je dépensais de l'argent en publicité, cela faisait une somme, mais sans résultat." Les guides ? Le Sébastopol est au Michelin avec trois fourchettes et noté 15/20 au Gault et Millau 98. Jean-Luc Germond ne se cache pas de faire la course à l'étoile, une promotion très intéressante pour capter la clientèle lointaine. Mais, sur place, c'est le bouche à oreille qui compte. Par la qualité de la maison, mais aussi par un savoir-faire bien orienté.

Relations publiques

Germond veut sortir du coup par coup, trouver quelqu'un du métier, qui "entre tout de suite dans le vif du sujet". "Je suis aux fourneaux. On ne peut pas tout faire." Alors il saute le pas et confie sa communication à une agence non de publicité mais de relations publiques. Après une présélection (par le bouche à oreille, là encore), il choisit entre trois la proposition de Scherzo, une agence lilloise. Le budget est de l'ordre de 3,5 % du CA, soit autour de 150 000 F si nous comptons bien. C'est une somme, le coût d'un poste de travail. Christine Nacry, associée dans Scherzo et en charge du budget, travaille selon son client très près de l'équipe, presque à l'intérieur. C'est une présence constante. "Au départ nous avons établi un diagnostic. Le chef a une ambition de haute qualité, de créativité. Le restaurant est un peu excentré, ce qui est un handicap. Mais il se trouve tout près du Musée des beaux-arts qui vient d'ouvrir après quatre ans de remise en état et qui connaît un succès inattendu. Nous avons donc fondé notre recherche d'image sur un parallèle entre art des saveurs et art tout court." Outil de base de cette image, un dépliant de six pages format lettre standard de 210 mm x 100 mm dont la première page reprend la façade et l'entrée de l'immeuble. Le Sébastopol n'est pas situé dans le vieux Lille mais dans l'élégant quartier début de siècle qui entoure la rue Solférino.

Cibles et Coupe du Monde

Puis il fallait choisir les cibles. Ce sont les "publics prescripteurs", et les relais d'information : la presse, les comités régional et départemental du tourisme du Nord, les offices du tourisme des grandes villes de province et tout un plan de réseau local et régional sur lequel Christine Nacry ne dit sans doute pas tout. Et ce sont aussi les métiers voisins comme l'hôtellerie, ou complémentaires comme les taxis. "Nous avons travaillé avec le Club hôtelier. D'abord pour mieux se connaître, puis pour établir un lien fonctionnel avec les réceptionnistes, détaille Jean-Luc Germond. En janvier nous avons invité l'ensemble des réceptionnistes du Club hôtelier autour d'une galette des rois". Le résultat, c'est qu'à quelques ratés près (attention aux stagiaires de remplacement mal formées aux réceptions), les clients des hôtels savent trouver Le Sébastopol. Le restaurant a également pris contact avec le responsable de la compagnie des taxis avec lequel il a monté une opération de prise en charge du voyage aller hôtel-restaurant pendant la Coupe du Monde.
Cette opération Coupe du Monde a évidemment été l'occasion de prendre contact avec la presse. Le résultat est là. En radio avec des journaux de midi, et du matin et avec les quotidiens et hebdomadaires régionaux.
Auparavant, d'autres opérations ponctuelles avaient joué. Le chroniqueur du journal Le Soir de Bruxelles, attentif, s'est déplacé en janvier, attiré par ce maître cuisinier de France. Il a titré un article très positif « cuisine vérité ». Avec Thalys et Eurostar, Lille devient une destination gastronomique intéressante pour les Bruxellois et les Londoniens. Les prochains travaux de communication seront sans doute adaptés à l'étranger. Mais cela demandera un travail de démultiplication via les CRT et CDT et un effort des restaurateurs lillois pour s'unir. Jean-Luc Germond est très favorable au projet de création d'un club de restaurateurs. Communiquer seul est une nécessité. Cela reste insuffisant.


Autour de Jean-Luc Germond, Christine Nacry à gauche (Scherzo), conseil en relations publiques, et Nicole Germond, chargée de l'accueil au restaurant. La cuisine est traditionnelle à forte ambition, l'accueil soigné.


L'HÔTELLERIE n° 2586 Magazine 05 Novembre 1998

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