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du 29 mai 2003
SOCIAL

Syndicalisme et esprit d'entreprise au sein du groupe Accor

LES DÉLÉGUÉS CFDT LANCENT LE DÉBAT, JEAN-MARC ESPALIOUX PARTICIPE

Hasard du calendrier, la CFDT avait choisi de longue date le 14 mai pour organiser la rencontre nationale des délégués du groupe Accor. La grève des transports parisiens a compliqué l'organisation, mais le président du directoire, Jean-Marc Espalioux, était là et a pleinement joué le jeu du débat.

Le thème général de la journée était syndicalisme et esprit d'entreprise. Deux termes antinomiques pour un certain nombre d'employeurs, mais de toute évidence, pas pour Jean-Marc Espalioux qui s'est dit convaincu de l'utilité de la force de proposition que représente les délégués CFDT au sein du groupe Accor.
C'est Claude Boulbès, secrétaire fédéral en charge du tourisme à la CFDT, qui a ouvert la journée de débat : "On parle différemment selon l'activité de l'entreprise à laquelle on appartient, mais les revendications ne sont pas les mêmes dans tous les cas de figure. Ce n'est pas parce que l'on travaille dans une petite entreprise que l'on a des petits droits."

Emploi et formation : l'analyse de la CFDT
Un constat : face à la dégradation de l'économie, l'emploi se dégrade et le chômage atteint le niveau de 10 %. Premiers accusés de cette situation par la CFDT : les plans sociaux de ces derniers mois. Un satisfecit toutefois pour les plans sociaux qui ont eu lieu au sein du groupe Accor, les délégués syndicaux considèrent que "ceux-ci ont été bien faits". Et d'analyser la situation : "Un des paradoxes des difficultés de recrutement dans notre secteur entraîne une dégradation des conditions de travail dans l'entreprise. Des difficultés dues à la spécificité de ces métiers avec le travail le week-end, le soir, les coupures et les faibles rémunérations. On n'est pas aidé du côté des employeurs en général qui ne font rien pour faire évoluer la profession." Et de faire référence à l'annulation de l'accord sur la RTT dans les CHR signé notamment par la CFDT. "Le groupe Accor est responsable de l'échec de la réduction du temps de travail dans les CHR. S'il y a baisse de la TVA, cela doit se traduire par une amélioration en termes d'emplois et de rémunérations." Le discours est incisif, il ne fait pas de cadeau, ce qui donne certainement une autre dimension aux sujets de satisfaction qui ne sont pas passés sous silence par les représentants de la CFDT : "Pourtant au sein du groupe Accor, nous avons obtenu 6 jours fériés, la réduction des coupures, et en cas de rémunération au pourcentage service peu élevé, le retour à un système de rémunération au fixe."

Quel dialogue social chez Accor ?
La volonté affichée du groupe est d'être "le meilleur employeur de France, de rendre le groupe attractif par ses conditions de travail et de salaires, et avoir un dialogue constructif avec les syndicats".
Mais pour les délégués, "c'est un rêve. Dans les faits, nous constatons que les conditions de travail et les relations avec la hiérarchie sont de plus en plus difficiles. Les salaires sont peu attractifs avec des grilles de classification inopérantes, et les organisations syndicales sont mises devant le fait accompli dans de nombreux domaines".
En conclusion, le travail de développement doit s'intensifier dans les secteurs qui sont en phase de lancement et être consolidé dans les sections syndicales plus matures. Les échanges doivent être plus importants, notamment avec la mise en place de la coordination Accor. Et surtout, il faut améliorer la formation et l'information des militants et adhérents.

La CFDT au sein du groupe Accor
Avec 182 délégués, la centrale, présidée par François Chérèque, est la seconde organisation syndicale au sein du groupe Accor, juste après FO qui compte 215 élus.

Groupe français dont les actionnaires sont étrangers
Jean-Marc Espalioux a entendu, à lui de prendre la parole. C'est par un état des lieux qu'il débute : "Accor a une histoire. Parti de 2 personnes, il dénombre aujourd'hui 137 000 collaborateurs en France. C'est un groupe qui possède une culture du franc-parler et du dialogue direct, et qui s'inscrit dans la continuité. Il s'agit d'un groupe français, mais dont les actionnaires aujourd'hui sont étrangers. Il faut en être conscient." La situation économique se doit d'être rappelée : "On est dans un environnement délicat, le mois d'avril est le pire que nous avons eu, pire que le mois d'octobre 2001. Il n'y a plus d'investissement ni de voyages en raison de la guerre en Irak notamment. D'un autre côté, on est au pire du pire, mais la catastrophe n'est pas là. On sait que depuis quelques années, l'action Accor varie énormément en oscillant de 10 à 54 e. Malgré cela, nous restons sereins, mais il existe des risques de déstabilisation importante. Il faut faire des économies, qui se traduisent par une adaptation et une valorisation. Notre point fort est une tradition de dialogue. Dans notre secteur, nous avons une hiérarchie basée sur un mode militaire, il faut donc compenser cela par le dialogue.
Nous avons une vision de la carrière à long terme. Vision qui peut sembler ringarde pour certains. Mais on peut entrer chez nous à 17 ans et finir à 60 ans en ayant travaillé dans un éventail très diversifié de postes. Nous avons un métier spécifique qui ne plaît pas à tous, mais pour les 20 % qui l'aiment, nous devons les retenir. Cette vision à long terme marche si l'escalier de la promotion fonctionne, et qu'à tous les stades, il est possible d'évoluer."
Une fois le préambule clairement cadré, Jean-Marc Espalioux répond aux sujets évoqués :
è Amélioration des rémunérations : "C'est la raison pour laquelle nous sommes à 39 heures afin de ne pas mettre tout le paquet sur la réduction du temps de travail. Nous sommes conscients qu'il faut faire des efforts sur la rémunération. Mais il y a aussi des injustices, des fossés très importants. Nous avons des progrès à faire."
è Mobilité et formation : "On se gargarise sur la mobilité et la formation, mais, dans certains endroits, cela ne se passe pas comme cela. Il faut améliorer notre attractivité, on ne peut pas plaire à tout le monde, mais il faut motiver nos jeunes embauchés. Il faut que toutes les entreprises du groupe puissent bénéficier de la formation et pas seulement certaines. Il faut aussi mettre en valeur la multicompétence pour favoriser la promotion. Mais cela ne doit pas se traduire par une mauvaise version de la polyvalence, c'est-à-dire prendre quelqu'un pour lui faire faire tout et n'importe quoi. La multicompétence accompagnée d'une formation doit permettre de faire passer un individu qui le souhaite de la salle aux étages ou réciproquement."
è Réactivité aux problèmes : "Nous devons être meilleurs. Nous n'avons pas été très réactifs aux informations de la base concernant la gérance-mandat. Nous avions des torts sur le sujet. Quant à la sous-traitance, il y a 3 à 4 ans que le sujet a été soulevé, et nous n'avons pas été assez réactifs non plus. On pensait que pour certains hôtels, le recours à la sous-traitance était inévitable, et l'on n'a pas vu le problème. Avec les partenaires sociaux, on a fait une charte et c'est très bien, mais elle nous coûte une fortune."
On le voit, le président du directoire du groupe Accor a choisi de mettre cartes sur table et de considérer les délégués CFDT comme des partenaires. "Vous avez compris qu'en étant constructif, on pouvait améliorer la situation. Il faut admettre que des salariés peuvent vouloir travailler plus pour gagner plus. Il faut une remontée de l'information plus précise et en temps réel. Je pense que le bilan est positif. Les dirigeants d'entreprise ne doivent pas dialoguer uniquement entre eux ou avec les actionnaires, mais aussi avec les salariés. En tant que délégués syndicaux, vous faites partie de la famille, même si vous êtes des éléments turbulents, mais on compte sur vous", a-t-il conclu.
P. Carbillet zzz74v

Questions-réponses

Un délégué regrette que les actions de formation profitent principalement aux cadres du groupe et pas suffisamment aux autres membres du personnel qui voudraient eux aussi profiter de ces formations.
Jean-Marc Espalioux : Vous évoquez le problème de différence entre le discours et la réalité. Vous mettez l'accent sur le fait que la formation a surtout bénéficié aux cadres en raison de la mise en place du nouveau système informatique. Mais la formation de ces cadres doit également servir à former leurs collaborateurs. Tout le monde ne peut pas aller suivre une formation à Evry, c'est à ceux qui y sont allés de former sur site.

Actualité oblige, un délégué évoque le problème de la retraite et la possibilité pour les salariés de pouvoir partir après 40 ans de travail et avant 60 ans.
Jean-Marc Espalioux : Dans notre groupe, les seniors sont les bienvenus, et l'on ne pousse pas les gens dehors entre 58 et 60 ans. Quant au problème de la retraite, je partage à 95 % le point de vue de la CFDT. Il nous faut une réforme, on ne peut pas reculer sur ce dossier et le laisser à nos enfants. Il faut une réforme mesurée. Tout le monde peut se rallier à une réforme de la retraite avec un niveau minimum de celle-ci proche du Smic. Vous êtes les seuls à pouvoir négocier sur le sujet.

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