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Editorial
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Aimer se faire mal

Paris, 28 juillet, avis de pollution sur la capitale, la canicule remplit les terrasses. Bars et restaurants en profitent, ils vont peut-être réussir à rattraper le retard pris en juillet pour cause de mauvais temps. Il est 23 heures, c'est la fin de la journée et c'est surtout la fin du service. 400 couverts dans les jambes pour les serveurs mais surtout... 400 couverts à 35 °C pour le personnel de cuisine... Ils étaient en poste dès 9 heures du matin, ont assuré le service du déjeuner, ont fait passer le temps pendant la coupure pour reprendre à 18 heures. Le service a commencé dès 19 heures, les premiers touristes étrangers aiment dîner de bonne heure. Les commandes de viandes et poissons grillés se sont succédé pendant près de 5 heures. Fin du service, les cuisiniers n'ont pas le temps de souffler, ils rangent, nettoient, et ne quitteront ces lieux qu'une fois le ménage terminé.
Il sera près de 1 heure du matin quand ils sortiront de cette fournaise. Et pourtant, l'établissement est neuf, aux normes, parfaitement bien équipé, rationnel. Autant dire que la situation est considérée comme parfaitement normale par tout le monde... Dans le quartier, il y a tellement pire ! Ça se passe comme ça dans les restaurants !

Et de me remémorer le plaisir pris par un restaurateur parisien de renom, étoilé, lui-même cuisinier pourtant, à la visite de ses sous-sols de cuisine au cœur de l'hiver, en compagnie d'un ministre. Il y faisait alors seulement 30 °C et le restaurateur prévenait que chez lui, l'été, on savait tenir jusqu'à 40 °C. Une fierté, un défi, une habitude...
Pas besoin d'études chiffrées pour dire combien il est difficile aujourd'hui de trouver du personnel en cuisine, tous les restaurateurs le savent. Faute de combattants, certains ferment des salles de restaurant quand ils ouvrent la terrasse, simplement parce qu'ils ne trouvent pas le personnel saisonnier pour assurer l'augmentation de la demande. "Redorer l'image de nos métiers", demandent certains, proposant campagnes de communication auprès du grand public, visite de professionnels dans les lycées pour attirer les jeunes. Mais jamais on ne pense que si l'on savait améliorer les conditions de vie, les conditions de confort des salariés au sein des entreprises, on se donnerait peut-être davantage de chance pour les fidéliser. Installer l'air conditionné en cuisine apparaît comme une idée parfaitement saugrenue aux yeux de la plupart des chefs d'entreprise. C'est pourtant la meilleure manière de permettre aux équipes de fournir une constante qualité de travail, de se sentir bien dans ce qu'ils font tout en préservant la qualité de la marchandise qui, elle aussi, doit aujourd'hui supporter les 35 °C ambiants... A l'heure où l'on construit, en série, les voitures avec air conditionné, où l'on propose l'équipement pour 1 franc de plus, que n'a-t-on compris que, dans la vie quotidienne aussi, les gens attendent ce confort ? Faudra-t-il que l'on ne trouve plus personne pour travailler dans ce secteur pour que l'on remette en cause son mode de fonctionnement ?
PAF zzz80

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L'Hôtellerie n° 2729 Hebdo 2 Août 2001

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