Sur 4 ans, les chaînes hôtelières superéconomiques ont peu augmenté leurs tarifs et ont globalement suivi le cours de l'inflation. Leurs scores de remplissage exceptionnels ne leur ont pas fait perdre la tête et elles se sont condamnées à ajouter des services pour retenir leur clientèle.
Malgré une reprise vitaminée de leur activité, les chaînes
hôtelières superéconomiques (0 et 1 étoile) ont donné un coup de pouce très timide
à leurs tarifs. C'est ce que révèle la dernière étude sur les prix affichés,
réalisée par Coach Omnium auprès de 762 hôtels avec le Guide Fernagut des hôtels
de formule économique, qui recense 12 des 13 chaînes 0 et 1 étoile présentes en
France. Ainsi, entre 1995 et 1998, la progression des prix moyens affichés n'a été que
de 6,4%, soit une hausse quasiment parallèle à celle de l'inflation sur cette période.
Les augmentations les plus marquantes l'ont été en région parisienne, avec 9,1% de
relèvement, contre 5,8% en province. Le prix du petit-déjeuner n'a, quant à lui,
grimpé en moyenne sur quatre ans que de 1 à 2 francs, selon les enseignes. Souvent, il
n'a pas bougé. On peut être surpris de cette sagesse anti-hausse des prix, alors que les
hôtels superéconomiques de chaînes ont réalisé l'exploit de parvenir à 71,1% de taux
d'occupation en 1997, pour une évolution de leur Revpar de 8,3% par rapport à 1996.
Depuis le début de l'année, ce n'est pas mal non plus. A la fin septembre 1998, les
chaînes hôtelières
0 et 1 étoile affichent au cumul 76% de taux d'occupation, soit une hausse de près de
3 points par rapport au cumul de l'année précédente. Ces envolées d'activité et la
forte demande n'ont donc pas encore donné lieu, contre toute attente, à une flambée des
prix. Seule exception, des initiatives isolées durant la Coupe du Monde, suivies d'un
retour à la normale dans les tarifs après l'événement.
On avait connu les chaînes superéconomiques moins frileuses mais leurs choix sont guidés par leur spécificité : le prix bas justement, celui qui attire. C'est un des éléments les plus sensibles dans cette gamme d'hôtels. Quand les responsables de chaînes souhaitent augmenter leurs prix affichés, ils marchent sur des oeufs. On sait aujourd'hui qu'une forte partie de la clientèle de l'hôtellerie superéconomique peut décrocher pour une simple hausse de 10 francs. Formule 1 en avait fait l'amère expérience il y a trois ans pour avoir transgressé cette règle. La chaîne avait vécu ses premières baisses significatives de taux de remplissage. Maintenant, elle veut être la moins chère sur chaque site pour retenir ses clients. D'autant plus qu'elle doit lutter contre la plupart de ses concurrents qui offrent un équipement plus fourni pour un prix de quelques francs de plus.
Pour autant, se contenter de suivre l'inflation pour justifier des augmentations tarifaires ne satisfait pas non plus à la clientèle. Pour faire accepter une hausse de leurs prix, les chaînes ont compris qu'elles devaient ajouter de la valeur. Autrement dit, il leur est apparu qu'il fallait enrichir la prestation. Toutes les expériences ont prouvé que le client est effectivement souvent prêt à payer un peu plus (raisonnablement), pour en avoir plus. A condition qu'il s'agisse de prestations jugées utiles par la clientèle. Ainsi, Première Classe par exemple a pu faire passer récemment une hausse de ses prix en installant Canal+ dans ses chambres. Une sorte de contrepartie en somme. Elle n'avait pas touché à ses tarifs depuis deux ans. Tel autre réseau va améliorer son buffet de petit-déjeuner et oser modestement 2% d'augmentation. Toutes les chaînes cherchent à innover et à ajouter des petits plus qui feront la différence, sans faire s'écrouler leurs marges qui sont fragiles dans cette gamme de prix : prise téléphonique pour le branchement des modems d'ordinateurs, téléviseur avec 11 chaînes, accueil des animaux sans supplément, distributeurs de repas ou de boissons, radio-réveil,...
En ce qui concerne les formules de tarifications, les chaînes superéconomiques
quittent de plus en plus le prix uniforme valable sur tout le réseau pour pratiquer
"le cas par cas". Il peut y avoir jusqu'à 80 francs d'écart entre deux hôtels
sous la même enseigne, soit 50% de différence. Les prix sont maintenant adaptés au
marché local, tenant compte du niveau de la demande et de la concurrence. Par ailleurs,
Formule 1 et Etap Hôtel sont pour l'instant les seuls à pratiquer des variations
tarifaires saisonnières, ce qui est nouveau dans ce milieu. Mais une généralisation de
cette pratique pourrait conduire la clientèle à trouver les tarifs trop compliqués à
comprendre alors que cette hôtellerie a justement du succès parce qu'elle est simple.
Selon l'étude Coach Omnium-Guide Fernagut, les enseignes qui ont le plus augmenté leurs
tarifs moyens affichés entre 1995 et 1998 sont Etap Hôtels (+9,5%), Akena (+8,3%),
Villages Hôtel (+5,8%) et Première Classe (+4,6%). Les moyennes restent raisonnables. B
& B affiche une hausse moyenne de 12,3% mais cela est dû surtout à des reprises
d'hôtels atypiques comme Ecomotel en 1997, devenus B & B City avec des tarifs plus
élevés que les
B & B originels. Mister Bed a une approche identique avec ses hôtels de centre-ville,
Mister Bed City. Pour 199 ou 229 francs, contre 149 francs en moyenne dans le réseau, les
installations y sont également plus riches. Chez Etap Hôtel, de nouveaux établissements
plus chers ont fait grimper la moyenne des prix affichés. A l'inverse, d'autres chaînes
sont restées nettement en dessous de l'évolution de l'indice des prix à la consommation
sur ces quatre dernières années, comme Bonsaï Hôtel, Nuit d'Hôtel, Formule 1.
Marmotte (une vingtaine d'hôtels) n'a pas retouché ses prix, restés à 175 francs pour
la chambre et à 27 francs pour le petit-déjeuner depuis au moins 4 ans. Elle garde la
même politique en 1999. On comprendra que si les chaînes d'hôtels superéconomiques
résistent à la tentation d'augmenter leurs prix, c'est pour mieux favoriser leur taux de
remplissage. Mais cette stratégie les pousse aussi à devoir dépenser plus, par
l'enrichissement de leurs prestations. Du coup, leurs marges s'érodent sensiblement.
Heureusement pour les investisseurs, beaucoup d'hôtels sont à présent amortis, ce qui
donne un peu plus de possibilités de largesse.
M. Watkins
LES PRIX AFFICHÉS DES HOTELS DE CHAÎNES SUPERÉCONOMIQUES | |||
---|---|---|---|
TARIFS AU 1er JANVIER 1998 | |||
Enseignes de chaînes | Prix le moins élevé | Prix le plus élevé | |
dans la chaîne | dans la chaîne | ||
w Akena | 145 F | 195 F | |
w B & B | 160 F | 240 F | |
w Bonsaï Hôtel | 149 F | 195 F | |
w Etap Hôtel * | 149 F | 225 F | |
w Formule 1 * | 119 F | 139 F ** | |
w Marmotte | 175 F | 175 F | |
w Mister Bed | 149 F | 229 F | |
w Noctuel | 149 F | 175 F | |
w Nuit d'Hôtel | 120 F | 155 F | |
w Première Classe | 155 F | 179 F | |
w Quick Palace | 145 F | 145 F | |
w Villages Hôtel | 140 F | 149 F |
Source : Coach Omnium - Guide Fernagut
* Variation tarifaire saisonnière - ** 1 hôtel à 169 francs chez Formule 1
L'ÉVOLUTION DES PRIX MOYENS AFFICHÉS ENTRE 1995 ET 1998 | |||||
DES CHAÎNES HÔTELIÈRES SUPERÉCONOMIQUES | |||||
Enseignes de chaînes | 1996/1995 | 1997/1996 | 1998/1997 | ||
---|---|---|---|---|---|
w Akena | 6,0% | 0,4% | 1,7% | ||
w B & B | 6,7% | -- | 5,3% | ||
w Bonsaï Hôtel | - 4,4% | 0,2% | 1,8% | ||
w Etap Hôtel * | 1,3% | 3,5% | 4,4% | ||
w Formule 1 * | 7,7% | - 5,4% | 1,3% | ||
w Marmotte | -- | -- | -- | ||
w Mister Bed | -- | -- | 3,9% | ||
w Nuit d'Hôtel | 3,7% | - 1,9% | 0,1% | ||
w Première Classe | -- | 4,4% | 0,3% | ||
w Villages Hôtel | -- | 4,6% | 1,2% | ||
Source : Coach Omnium - Guide Fernagut - * Variation tarifaire saisonnière |
L'échantillon : cette enquête s'appuie sur la base de données de Coach Omnium et du Guide Fernagut des hôtels de formule économique. L'échantillon concerne 762 hôtels, soit 90% des hôtels de chaînes superéconomiques en France (la chaîne Balladins est absente de l'étude). |
L'HÔTELLERIE n° 2591 Supplément Économie 10 Décembre 1998