Doucement mais sûrement, les femmes investissent les fourneaux. Etre chef de cuisine et propriétaire pour une femme n'est certes pas chose facile, mais c'est de toute évidence possible, et certaines vivent ce quotidien avec beaucoup de bonheur, dans la mesure où ce métier est leur passion. Flora Mikula est de celles-là.
Lydie Anastassion
"Je fais une cuisine élargie à la
Méditerranée", déclare Flora Mikula.
Dire que tout a été facile
pour Flora serait mentir... Mais tout se mérite, et Flora a accepté les règles du jeu
qu'on n'a cessé de lui imposer. D'aussi loin qu'elle s'en souvienne, la cuisine a
toujours été ce qu'elle voulait faire. "A l'école, je n'aimais pas beaucoup les
études générales, j'étais une manuelle, j'avais besoin de bouger, et plus je
découvrais la cuisine, plus je découvrais que c'était ce qui allait me convenir",
explique-t-elle. Initiée à la cuisine par sa grand-mère, Flora Mikula entre, à 16 ans,
à l'école de cuisine de la chambre de commerce et d'industrie d'Avignon. Elle avait bien
essayé d'y entrer avant, mais gentiment, on l'avait renvoyée chez elle, à ses chères
études générales où, pourtant, elle trouvait le temps long. "tu es encore
jeune pour faire un tel choix, passe ton bac, tu reviendras voir si c'est toujours ce que
tu veux", lui conseillait-on alors. Elle n'a pas voulu attendre plus longtemps
et, l'année suivante, sa ténacité paya et on l'accepta sur les bancs de l'école.
C'était la première année où les filles étaient admises. "Par chance, les
professeurs nous ont tout de suite orientées vers la gastronomie. Ce qui était
extraordinaire, c'est que jusqu'alors médiocre élève en maths, en langues, parce que je
suivais les cours que je voulais, que j'apprenais la cuisine, eh bien, je me suis mise à
travailler les matières d'enseignement général et j'ai considérablement progressé,
c'était super !", raconte-t-elle.
Flora était conquise, la cuisine était bel et bien sa passion et elle n'allait pas
s'arrêter là. A la fin de ses études, elle traverse la Manche, direction Londres, où
il était plus facile pour une femme de trouver une place. "J'ai travaillé au
Ramada Hotel, puis au Méridien où j'ai rencontré Jean-Michel Lorain. De retour à
Paris, j'ai poursuivi mon apprentissage auprès de Jean-Pierre Vigato, puis d'Alain
Passard." Autant dire que Flora ne fait que de très belles rencontres, des
cuisiniers jeunes, créatifs qui, certes non sans surprise, vont jouer le jeu et
l'intégrer dans leur équipe, répondre à ses questions. Entre temps, la blonde
cuisinière s'accordera un intermède professionnel aux Caraïbes puis à New York.
Au fil des années, le désir de s'installer s'affirme. En 1996, c'est chose faite. Avec
son compagnon, Raphaël Peraud (un ancien de l'Arpège), elle s'installe avenue de Ségur
à Paris. Et s'offre, avec son restaurant qu'elle baptise Les Olivades, un retour aux
sources.
Pas besoin de soleil pour se croire en Provence. Sous les poutres apparentes du
restaurant Les Olivades de Flora Mikula, c'est tous les jours le dépaysement. Les tresses
des oignons, les motifs réalisés au pochoir sur les murs, les santons, les tissus
colorés et les carreaux de Salerne donnent le ton. "La décoration, c'est tout
moi", précise le chef. Quant à la cuisine, c'est sa Provence, pleine de
parfums, d'herbes, d'aromates, de légumes et de poissons... sans crème. "Tout
pousse en Provence, ce qui permet de faire une cuisine variée au niveau des légumes et
diététique. J'aime les alliances qui évoluent entre harmonies et contrastes, à
condition toutefois qu'elles ne soient pas contre nature. Des alliances que je réalise
avec des épices ou des produits de la région", écrit-elle en avant-propos de
son livre Ma Provence dans votre assiette, publié aux Editions Aubanel (lire
encadré). Non contente de passer sa vie en cuisine, d'aller elle-même aux Halles à
Rungis pour faire son marché - "pour avoir du poisson comme je l'aime, il faut y
être dès 3 heures du matin, après c'est trop tard", prévient-elle -, Flora
s'est offert le luxe de mettre au monde un adorable bambin et d'écrire un livre de
cuisine... Installé dans son transat, le petit Stanislas, âgé de quelques mois, a
presque volé la vedette à sa mère de chef, lors de la présentation de son livre à la
presse le 2 octobre dernier. Tout blond comme sa maman, il a attiré les regards d'une
bonne partie de la gent féminine pendant la séance de dédicaces. Quand a-t-elle eu le
temps de l'écrire ce livre ? Tout sourire, Flora vous répondra "Pendant mon
congé de maternité, j'ai travaillé en cuisine jusqu'au 7e mois. Après mon second a
pris la suite, je l'avais amené avec moi à Rungis pour qu'il connaisse mes fournisseurs,
pour qu'il apprenne à marchander, à ne pas se faire avoir et, ensuite, je lui ai passé
le flambeau. Pendant ce temps, j'ai écrit mon livre de cuisine." Et voilà, rien
de plus simple, Flora a réponse à tout...
D'elle, le Guide Rouge, qui lui a accordé une fourchette, dit : "Un lieu
qui fleure bon l'huile d'olive, avec son appétissante cuisine d'inspiration méridionale.
La salle à manger fraîche est ensoleillée de motifs provençaux." Son
restaurant marche bien, mais elle veut aller encore plus loin, continuer à travailler
l'assiette.
Un restaurant, un mari, un bébé, et maintenant un livre. Flora Mikula sait concilier ses
passions. Avec succès.
Les Olivades
41, avenue de Ségur
75007 Paris
Tél. : 01 47 83 70 09
Fax : 01 42 73 04 75
Souvenirs d'enfance et recettes
De son enfance dans le Sud de la France, entourée d'une mère lorraine et d'un père
polonais, Flora Mikula a gardé un souvenir de métissage culinaire. |
Premières asperges vertes aux dernières truffes du mont Ventoux
Ingrédients
(pour 4 personnes)
1 kg d'asperges vertes
1 truffe de 30 g
1 jaune d'uf
10 cl d'huile d'arachide
5 cl d'huile de truffe
1/2 citron
Sel, poivre
Préparation
* Laver et éplucher les asperges. Couper le bout des queues.
* Attacher-les en botte et déposer-les debout, tête haute, dans une casserole d'eau
bouillante salée.
Les faire cuire 20 mn environ selon leur grosseur. Lorsqu'elles sont cuites, éponger-les
à l'aide d'un papier absorbant et réserver-les au chaud sur un plat de service.
* Brosser soigneusement la truffe et mixer la moitié au robot.
Dans le bol du mixeur, incorporer le jaune d'uf et le jus du demi-citron. Saler,
poivrer.
* Verser l'huile d'arachide et l'huile de truffe en très mince filet.
Fouetter énergiquement et sans arrêt. Vous devez obtenir la consistance d'une
mayonnaise. Rectifier l'assaisonnement.
* Server la sauce sur les asperges encore tièdes et râper le reste de truffe sur les
asperges.
Vos commentaires : cliquez sur le Forum des Blogs des Experts
L'HÔTELLERIE n° 2695 Magazine 07 Décembre 2000