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Ce restaurant doublement étoilé, ouvert il y a 230 ans, provoque toujours l’émerveillement des clients.
Supervisée par le directeur de salle, la brigade de salle a à cœur de transmettre ses connaissances dans ce
haut lieu de la gastronomie parisienne.
PAR HÉLÈNE BINET
A
rrivé en janvier 1991,
ChristianDavid
garde un
mauvais souvenir de ses
débuts au Grand Véfour. Lui
qui venait de travailler dix ans
en tant que maître d’hôtel chez
Jacques
Cagna
, dans
“une ambiance conviviale
et détendue”,
se retrouvait directeur de
restaurant dans un lieu
“qui, en salle,
avait besoin de retrouver de la sérénité.
Il fallait insuffler du renouveau.”
La
donne change avec l’arrivée, six mois plus
tard, d’un nouveau chef :
GuyMartin
.
Les deux hommes sont posés, à l’écoute
et communiquent.
“J’ai accroché avec le
personnage, sa philosophie, sa cuisine.
Il fallait ressouder les liens
, confie
Christian David, passionné de musique
et de peinture comme GuyMartin.
Nous avions un objectif commun : les
trois étoiles [la troisième a été obtenue
en 2000 et perdue en 2008, NDLR].
On ne pouvait pas se contenter d’un
endroit anonyme.”
Vingt-trois ans plus
Christian
David
,
vingt-trois ans
de maison au
GrandVéfour.
tard, l’équipe de salle est composée de
17 personnes (dont trois maîtres d’hôtel,
deux chefs de rang, quatre sommeliers,
quatre commis et trois apprentis). Elle
est aujourd’hui très unie. La jeune
génération apprend de l’ancienne (cinq
salariés ont plus de vingt ans de maison).
Et vice-versa. Cette complicité se ressent
en salle. “
J’ai travaillé sur le potentiel
humain, la personnalité de chacun. J’ai
aussi mis en place un briefing quotidien,
avant le service dumidi. Quand je vois
une erreur, je la signale même si je dois
répéter”,
poursuit-il. Le chef explique et
fait goûter ses plats à la salle à chaque
changement de carte (quatre fois par
an).
“Il est important de bienmaîtriser la
composition des recettes, la connaissance
des produits et leur histoire.”
Le leitmotiv de Christian David, c’est
la communication avec le client, qui
débute avant la prise de commande. Le
client est accueilli par le directeur de salle,
le chef et l’hôtesse, puis entend, à table, un
petit historique du Grand Véfour afin d’avoir
“tous les éléments qui puissent éveiller ses
sens”.
Le maître d’hôtel prend la commande
des apéritifs, avant de donner la carte :
“il
faut trouver la personne qui se met en avant
pour la carte à prix”.
Se déroule ensuite
le service où il suffit d’un
“simple regard”
entre le personnel pour se comprendre. Un
cardex indique toutes les particularités des
habitués. Le service, qui peut durer jusqu’à
quatre heures, fait 45 couverts maximum. Le
restaurant est ouvert du lundi au vendredi,
midi et soir. Il n’y a donc pas de roulement
de personnel.
“Tout le monde a son week-
end”,
souligne Christian David. Le maître
d’hôtel a, par ailleurs, mis en place un
plateau avec une bougie pour apporter le
gâteau lorsqu’un client fête son anniversaire.
La table est prise en photo et le client la
reçoit à son départ.
“Cela suscite toujours
l’étonnement”
, assure-t-il en souriant.
Q
© JÉRÔME MONDIÈRE
© JÉRÔME MONDIÈRE
La salle du Grand
Véfour est l’une
des plus anciennes
salles de restaurant
de Paris, inaugurée
en 1784.
Retrouvez les
dates clés
de Christian David
ou flashez ce QR code
Au
Grand Véfour
, une équipe de salle
soudée autour de
Christian David
Le conseil du jour
“Il ne faut pas penser que seule la notion d’argent existe : ce sont les valeurs
humaines qui doivent primer ! Il faut être colporteur du savoir-faire acquis, pour
transmettre à son tour. C’est un élément essentiel. Ce métier n’est pas facile mais
il apporte beaucoup. On passe plus de temps au travail que chez soi, alors il faut
trouver un équilibre dans sa vie.”