du 26 juin 2008 |
SPÉCIAL EUROPE |
LA MARGE DE MANOEUVRE DE NICOLAS SARKOZY VUE PAR LES CHEFS DE FILE DE LA PROFESSION
L'EUROPE AVEC LES EUROPÉENS, MAIS AUSSI POUR LES EUROPÉENS
Pour les dirigeants des organisations syndicales patronales du secteur, l'Europe présidée par Nicolas Sarkozy s'inscrit dans un tournant où dynamisme et résultats palpables doivent faire bon ménage. Cela dit, il y a le 'mais' de l'histoire… De TVA en lourdeur administrative.
André Daguin. |
Qui croire et que croire dans le dossier TVA, premier sujet auquel on pense lorsqu'on évoque la restauration et l'Europe ? Pour André Daguin, un rappel s'impose : "Nous avons longtemps travaillé en France pour obtenir l'équité fiscale. On s'est aperçu que beaucoup de ministres des Finances depuis dix ans - donc pas forcément du même bord politique - se servaient de l'Europe pour nous promener. On ne peut pas impunément dire l'Europe refuse notre demande quand on ne l'a pas formulée. On ne peut pas déplorer le refus alors qu'on a tout fait pour le provoquer…" Ce constat à l'égard des différents acteurs du Gouvernement a toutefois un bon côté. "Nous nous sommes organisés pour avoir des yeux et des oreilles à Bruxelles. C'est l'Hotrec. Par ailleurs, des chaînes de restauration ont signé des contrats avec des cabinets d'avocat pour creuser ce qui est possible et ce qui ne l'est pas, dans l'optique France." Pour le président confédéral de l'Umih, la directive est en "bonne voie". "Force est de constater, aime-t-il répéter, que depuis le 23 juillet 2007, Nicolas Sarkozy fait ce qu'il a dit qu'il ferait." Le chef de file de la rue d'Anjou mise ensuite sur les Ecofin de fin d'année, "qui pourront alors décider pour les pays qui le souhaitent de passer au taux réduit une liste d'activités dans laquelle figurera la restauration".
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"Une opportunité"
pour la CPIH
Côté CPIH, la
présidence française à l'Europe est "une opportunité"
dans un sens large. "Nicolas Sarkozy a déjà un an de présidence
nationale derrière lui. Il mesure les problèmes franco-français.
La crise conjoncturelle n'est pas plus favorable à un secteur qu'à
un autre. Il y a nous, mais il y a aussi les pêcheurs ou les transporteurs…
On est dans une démarche européenne. Je pense, par exemple, qu'il doit
impérativement assister à l'ouverture des Jeux olympiques à Pékin.
Il va être l'ambassadeur de l'Europe, l'homme fort de l'Europe. Et ce n'est
qu'en se positionnant ainsi qu'il pourra, de toute façon, influer sur le
reste du monde et les problèmes identitaires des populations. Cette position
de force est nécessaire dans le cadre d'une construction judicieuse de l'Europe.
Il doit être sur tous les terrains mondiaux, et avoir une image de conquérant
pour maintenir le cap d'une baisse de la TVA en faveur des métiers de main-d'oeuvre
non délocalisables comme les nôtres. Nos entreprises, et notamment les
TPE, sont plombées par les coûts salariaux. Parallèlement, elles
font partie de l'échiquier économique planétaire", constate Jean-François
Girault. L'univers des saisonniers, représenté par la Fagiht, montre,
quant à lui, une certaine amertume face à l'Europe. Et pourtant, leur
patron, Jacques Jond, est un Européen convaincu de la première
heure. Mais lui aussi s'inquiète des tournants négociés plus ou moins
à la hâte au fil de l'élargissement. "L'Europe, fondamentalement,
depuis mon plus jeune âge - je suis un enfant de la guerre, j'ai vu le déchirement
-, représente un immense espoir. Durant tout mon parcours politique, notamment
auprès de Robert Schuman, j'ai soutenu que l'idée européenne
devait apporter la paix. L'Europe du marché commun a fait son travail. Mais
depuis Maastrich, ça accroche. Prenons l'euro, sincèrement, j'attends
qu'on m'en démontre les bienfaits. On nous dit que cela nous permet aujourd'hui
de répondre aux augmentations du coût du pétrole, c'est nous croire
au ras des pâquerettes. L'Europe oublie de prendre le temps de digérer
ce qu'elle met en place." Et d'accuser : "La Commission européenne s'est
substituée au vrai pouvoir qui devrait guider l'Europe. Nous avons des hauts
fonctionnaires qui prennent des décisions à la place des États.
Ils s'attaquent un jour au camembert au lait cru, un autre jour à la pêche
du thon rouge. Je vous signale que la Commission européenne refuse de donner
ses sources de calcul sur cette pêche. Cette approche administrative et fermée
des décisions est d'autant plus sensible que la France est un des pays les
plus administratifs au monde." Indéniable.
Jacques Jond. |
Didier Chenet. |
L'absence d'un député
européen du secteur CHR
Un des regrets aujourd'hui
d'André Daguin porte sur l'absence d'un député européen français,
dont la profession serait restaurateur ou hôtelier. "Le député
européen allemand appartient à la délégation hôtelière
et ça change beaucoup de choses. L'Europe, c'est essayer de prévoir
ce qui va nous arriver avant que ça arrive", sourit-il un tantinet moqueur.
"On sait bien pour le gras, le sel, le sucre, les personnes handicapées, les
cartes de crédit, les droits d'auteur qu'il faut être à la source…
Il faut absolument que les députés européens français soient
le reflet de l'économie et pas uniquement de la politique", estime le Gersois,
également membre du comité exécutif de l'Hotrec.
Au Synhorcat, on pense que la France à
la présidence de l'Europe va sans aucun doute marquer un changement de style.
Son président Didier Chenet en est convaincu : "Bien sûr que
certains dossiers vont pouvoir aboutir. Même si le calendrier n'est pas du
fait français. Compte tenu de la personnalité de Nicolas Sarkozy et
d'autres éléments, comme le non de l'Irlande, cela va amener l'Europe
à prendre davantage en compte la réalité quotidienne des Européens.
Notre président est tout à fait capable de mettre les points sur les
i. Il peut répondre aux différents soubresauts économiques sans s'arque
bouter derrière les grands principes qu'on nous rabâche régulièrement.
Ce qui est favorable à la baisse de TVA en restauration. Néanmoins,
nous devons être acteurs de l'Europe, et nous avons les moyens de l'être."
Projet Erasmus pour les apprentis
Le syndicat de la rue de
Gramont est porteur en France du projet Erasmus pour les apprentis. L'idée
? Qu'ils bénéficient également de ce programme qui permet aux étudiants
d'effectuer une partie de leurs études au-delà de leurs frontières.
Dans le sillage, les 2 et 3 octobre prochains, à l'initiative de la France,
le palais omnisport de Paris Bercy va accueillir 10 000 apprentis européens,
dont 1 500 en provenance du circuit CHR. Un hommage à la filière en
forme de show, au cours duquel le Synhorcat, par l'intermédiaire notamment
du CFA-Médéric, avec la collaboration des autres centres d'apprentissage
d'Île-de-France, souhaite placer le jeune professionnel au centre des préoccupations
européennes. Nicolas Sarkozy a confirmé sa présence en clôture
le vendredi. Un coup de projecteur soutenu par tous les professionnels, évidemment.
"L'Europe est un atout majeur pour la France. On ne peut plus vivre ni même
penser qu'on peut rester en autarcie. Voyons, on est content de vendre des voitures
à l'étranger. Nous, dans la restauration et l'hôtellerie, notre
façon d'exporter, c'est de promettre puis de tenir un art de vivre. Il faut
seulement qu'en face, ça avance avec cohérence", termine Jean-François
Girault. En filigrane, la nécessité d'obtenir la baisse de la TVA pour
les restaurateurs. Même conclusion pour Jacques Jond, à une nuance
près : "Cessons de nous focaliser sur un taux fixé à 5,5 % et
ne parlons pas de taux moyen pour l'ensemble des métiers. Ce qu'il faut, c'est
obtenir un taux réduit en restauration parce que le taux actuel est excessif
et que ce secteur a besoin d'un ballon d'oxygène." Didier Chenet souligne
d'ailleurs que six mois de présidence, "c'est très court", et qu'il
"existe de nombreux autres chantiers à mettre en oeuvre, comme la législation
contre le tabac ou la vente d'alcool aux moins de 18 ans".
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L'Hôtellerie Restauration n° 3087 Hebdo 26 juin 2008 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE