Actualités

Page d'accueil
 Sommaire
du 13 septembre 2007
PIONNIERS

Dans les années 1960, toute une génération d'entrepreneurs - véritables pionniers dans la profession, au parcours souvent aventureux, parfois hors normes, a chamboulé l'histoire de l'hôtellerie. Portrait de l'un d'entre eux.
Michel Kosossey

Raouf El Kateb

Un entrepreneur hors pair


Hôtel et résidence Aziza à Hammamet.


Promotion Vatel en 1961 : Raouf El Kateb (entouré). On reconnaît Jacques Roux, le 4e en partant de la gauche au dernier rang. La photo est bien en vue sur le mur de son bureau.

Dans les années 1960 en Tunisie, la capacité d'hébergement était quasiment nulle, et les hôteliers tunisiens, rares. Quelques grands professionnels, compétitifs au plan international, ont pourtant émergé dans ce pays, en proposant des équipements dont la qualité est le trait dominant. Raouf El Kateb est l'un d'eux.
Né dans l'île de Djerba en 1939, d'une famille modeste, Raouf El Kateb bénéficie d'une bourse qui lui permet de suivre le cycle de trois ans de l'École hôtelière de Paris (EHP). Il emploie son temps libre à effectuer des extras, envoie de l'argent à sa famille, ce qui est peu banal dans cette école où les élèves sont souvent des fils et filles de familles aisées. Sa scolarité est une grande expérience, un véritable déclencheur : la découverte du métier d'hôtelier est pour lui une seconde naissance. Raouf El Kateb a trouvé sa vocation.

Un parcours d'exception
Doté d'une incroyable énergie, Raouf entre dans la profession par la petite porte, mais dans son propre pays, ce qui sera pour lui la ligne directrice de toute sa trajectoire professionnelle. L'office national de tourisme tunisien lui propose de rejoindre la chaîne Hilton aux États-Unis pour perfectionner ses connaissances dans le domaine de la gestion. Raouf choisit une autre voie et travaille au Tunisia Palace à Tunis, établissement aujourd'hui disparu, comme serveur. Il se fait très vite remarquer, et quelques mois plus tard, il devient assistant de direction à l'hôtel Les Palmiers à Monastir. Là, il va déployer une puissance de travail incroyable. Il est partout, en cuisine, en salle, à la réception. Il fait les courses au marché, il arrête les caisses tous les soirs. Il devient un professionnel reconnu et affirme très vite ses capacités de leader. Raouf se souvient de cette période comme d'un moment privilégié où il s'est construit des bases solides, notamment auprès de son directeur, Amédée Richard.
Il est alors sollicité pour ouvrir un restaurant haut de gamme à Tunis, Le Maalouf. Face au succès, on lui demande d'engager une troupe musicale et des danseuses. Estimant que ça n'est pas son métier, il claque la porte et prend la direction d'un hôtel à Skanes, puis la direction régionale d'un groupe de cinq hôtels. Raouf El Kateb n'a pas encore 30 ans ! En 1972, on lui propose de s'occuper de la construction du Phenicia à Hammamet (supervisée par le groupe allemand Neckermann), il en devient le directeur, puis s'occupe de la construction - encore une - du Sahara Beach à Monastir.

LES ÉTABLISSEMENTS DU GROUPE DE RAOUF EL KATEB


L'Hôtel Kanta.

Hôtel Méditerranée Thalasso Golf (Hammamet)
Résidence Aziza Thalasso Golf (Hammamet)
Hôtel Kanta (Port El Kantaoui)
Centre de thalassothérapie Biorivage (Hammamet)
Friguia Park (Bouficha)
Golf Citrus (Hammamet)

Un tempérament d'entrepreneur
Raouf El Kateb s'enrichit considérablement de cette double expérience de 'constructeur' et de directeur d'hôtel. Il a tellement donné pendant toutes ces années que la prise de conscience devient évidente : cette énorme capacité de travail doit être mise à sa disposition. Pour ses propres affaires.
Sans moyens financiers, il loue un petit local pour 5 000 dinars par an (3 000 euros environ), puis l'Hôtel Méditerranée à Hammamet un établissement situé en bord de plage. Il ne peut y faire réaliser de travaux alors que l'établissement en a cruellement besoin. L'hôtel est la propriété de 3 associés. En 1980, grâce à la crédibilité qu'il a acquise, il trouve les moyens financiers d'acheter le Méditerranée.
Raouf a alors 40 ans et va donner la pleine mesure à son tempérament d'entrepreneur. Son image est celle d'un homme courageux, intègre, autoritaire, mais surtout d'un professionnel d'exception qui sait entraîner ses troupes et mettre la main à la pâte. La société de développement de Sousse-Nord lui propose alors un site dans le développement touristique de El Kantaoui. Pas de problème pour trouver les 10 % d'autofinancement dont il a besoin, son seul nom suffit. Il ouvre alors le Kanta.

Régional d'abord
La gestion du Méditerranée et le chantier de l'hôtel ne l'occupent encore pas totalement. Raouf crée alors, avec un de ses amis, Mongi Loukil, également originaire de Djerba, une société d'exploitation, Gesthotel, qui gère 4 unités. Raouf pense qu'il n'est pas possible de circuler efficacement du nord au sud, aux portes du désert. Son partenaire et lui se partagent alors les hôtels, et Raouf El Kateb garde le Méditerranée à Hammamet et le Kanta à El Kantaoui. C'est grâce à son professionnalisme qu'un hôtelier doit construire sa clientèle et diversifier ses accords avec plusieurs tour-opérateurs et non l'inverse, qui tend à faire inexorablement diminuer la qualité des prestations des hôteliers.
Le dernier établissement ouvert par Raouf El Kateb est l'Aziza (le prénom de sa fille) qui jouxte le Méditerranée. Entre les 2 établissements, a été créé un centre de thalassothérapie offrant des services aussi complets que les meilleurs centres de thalasso français.


L'entrée du parc animalier Friguia.

Recentré, diversifié… et exigeant
Lors d'un voyage du président tunisien Ben Ali en Afrique du Sud, Raouf El Kateb a fait partie de la délégation qui l'accompagnait. De ce voyage, il ramène une idée : la création d'un parc animalier. Il recherche quelques dizaines d'hectares et loue aux Eaux et Forêts un terrain situé à mi-distance entre Hammamet et Sousse, desservi… par une gare ferroviaire dédiée !
Pour créer une animation complémentaire, Raouf El Kateb ouvre un chapiteau, le restaurant Shaka (420 places), où se produit une troupe de danseurs zoulous. La qualité du lieu est remarquable et se compare au zoo de La Palmyre, en Charente-Maritime, avec qui un partenariat est développé.
Affirmant qu'il manque au moins 6 golfs dans la région pour développer une réelle activité en basse saison, il participe à la création du golf Citrus situé à quelques kilomètres d'Hammamet.
Ses trois enfants Skander, Mohtadi et Aziza dirigent aujourd'hui les établissements avec leur père.
Raouf El Kateb a maintenant une autre passion : l'agriculture. Il loue plus de 200 hectares à Grombalia, toujours à côté d'Hammamet. Clémentiniers, mandariniers, orangers, oliviers, sont gérés de main de maître… et Raouf rêve désormais de s'installer au milieu des arbres. Il va cesser ses activités d'hôtelier cette année, comme prévu. Il a tout donné à son métier et se sent prêt à passer à autre chose. Mais le degré d'exigence de l'homme est tel qu'il parle avec passion de la façon dont le tourisme s'est développé en Tunisie, dont les professionnels se sont organisés, de l'absence de professionnalisme chez certains hôteliers. La critique est argumentée. Il sait de quoi il parle, mais se garde bien de donner des leçons. Raouf a montré la voie. Il est un exemple, un modèle pour des entrepreneurs à la mode tunisienne.
n zzz36v zzz70

Article précédent - Article suivant


Vos questions et vos remarques : Rejoignez le Forum des Blogs des Experts

Rechercher un article

L'Hôtellerie Restauration n° 3046 Magazine 13 septembre 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

L'Application du journal L'Hôtellerie Restauration
Articles les plus lus...
 1.
 2.
 3.
 4.
 5.
Le journal L'Hôtellerie Restauration

Le magazine L'Hôtellerie Restauration