Actualités

Page d'accueil
 Sommaire
du 26 octobre 2006
L'ÉVÉNEMENT

LES PRINCIPALES CONSÉQUENCES DE L'ANNULATION DE L'ACCORD DE JUILLET 2004

QUELLE DURÉE DU TRAVAIL POUR LES CHR ?

Le Conseil d'État vient d'annuler l'accord du 13 juillet 2004 sur le temps de travail des CHR, tout en conservant 3 titres de cet accord relatifs au Smic hôtelier, au statut des cadres et au régime de prévoyance qui continuent à s'appliquer. Pas facile de s'y retrouver pour les entreprises et leurs salariés sur ce qui est encore applicable ou non.
Pascale Carbillet

Les dispositions de l'accord qui restent applicables

Le Commissaire au gouvernement avait considéré que 3 titres de cet accord pouvaient continuer à s'appliquer en raison de leur caractère dissociable de la totalité de l'accord. Le Conseil d'État l'a suivi et a maintenu les titres IV, V, VIII et l'annexe 1 sur l'aménagement du temps de travail de cet avenant.

Le régime des cadres
Le titre IV relatif au statut des cadres, qui distingue et définit 3 catégories de cadre (cadre dirigeant, cadre autonome et cadre intégré), est toujours en vigueur.
Un cadre dirigeant est celui auquel sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une large indépendance dans l'organisation de son emploi du temps. Il n'est pas soumis à la réglementation sur le temps de travail. Mais ce cadre doit avoir une rémunération minimale mensuelle qui ne peut être inférieure à 1,5 fois le plafond mensuel de la Sécurité sociale, soit 2 589 E x 1,5. Ce qui donne un salaire mensuel moyen de 3 883,50 E.
Un cadre autonome relève du niveau 5 de la grille de classification. Il bénéficie d'une large autonomie dans l'organisation de son emploi du temps. Peuvent être conclues des conventions de forfait sur la base de 217 jours par an. Ce cadre ne peut avoir un salaire inférieur au plafond de la Sécurité sociale, soit 2 589 E.
Un cadre intégré est soumis à la durée collective du travail de l'entreprise. Il est possible de conclure une convention de forfait avec une référence horaire qui inclut les heures supplémentaires.
L'accord prévoit en outre une indemnité de départ à la retraite majorée pour les cadres. En effet, un cadre bénéficie d'une indemnité égale à 1 mois de salaire après 5 ans d'ancienneté et de 2 mois après 10 ans d'ancienneté,
quand la convention collective n'accorde qu'un demi-mois pour 10 ans d'ancienneté.

Le Smic hôtelier
Le calcul du Smic hôtelier instauré par l'accord, en faisant disparaître la déduction de la valeur de la demi-nourriture dans le salaire de base, est maintenu. Depuis le 1er janvier 2005, le Smic hôtelier se calcule en prenant en compte le taux horaire du Smic par le nombre d'heures de travail plus les avantages en nature nourriture. Les employeurs continuent donc à appliquer ce principe.

Le régime de prévoyance
Le régime de prévoyance mis en place par cet accord est maintenu.
Depuis le 1er janvier 2005, toutes les entreprises des CHR ont l'obligation de cotiser à un régime de prévoyance. Cette cotisation se fait sur la base de 0,80 % du salaire brut répartie à parts égales entre le salarié et l'employeur, soit une cotisation de 0,40 % pour chacun. Ce régime permet d'indemniser les salariés ou leur famille en cas d'incapacité, d'invalidité ou de décès de ce dernier. Pour gérer ce régime, les partenaires sociaux ont désigné 4 organismes assureurs (Circo Prévoyance, l'IPGM, l'Urrpimmec, l'Ocirp) qui ont été regroupés au sein d'une structure commune, un GIE dénommé HCR Prévoyance, créé dans un souci d'efficacité afin d'offrir aux entreprises et salariés un guichet unique.

Aménagement du temps de travail
L'annexe 1 de l'accord du 13 juillet 2004 relatif à l'aménagement du temps de travail a été maintenue par le Conseil d'État. Les employeurs peuvent continuer à appliquer les dispositifs prévus pour aménager le temps de travail : la modulation, le cycle, l'octroi de jours ou de demi-journées de repos.

Les principales dispositions qui ont été annulées

Le principe des heures d'équivalence à 39 heures
L'arrêt du Conseil d'État a annulé les dispositions relatives à la durée du travail fixée à 39 heures par semaine, mais aussi aux durées maximales de travail, au contingent annuel d'heures supplémentaires, ainsi qu'aux majorations applicables au titre du paiement d'heures supplémentaires ou de leur récupération.

Attention ! Le Conseil d'État ne tire pas les conséquences de sa décision en fixant la nouvelle durée du travail applicable dans la profession. En effet, il ne précise pas clairement que la profession doit être soumise aux 35 heures, alors que le Commissaire au gouvernement avait précisé, dans ses conclusions, qu'un décret de mars 1999 n'avait toujours pas été abrogé, et donc restait en vigueur. Ce décret prévoit une durée du travail à 43 heures mais payées 39 heures.

Il appartient donc à la profession d'examiner les 2 hypothèses qui peuvent être envisagées.
1re hypothèse : la durée du travail dans les CHR serait désormais la durée légale de droit commun, soit 35 heures par semaine.
Dans ce cas-là, les heures effectuées à partir de la 36e heure sont considérées comme des heures supplémentaires.
Les salariés pourraient ainsi obtenir de façon rétroactive le paiement des majorations applicables de la 36e à la 39e heure de travail depuis le 1er janvier 2005.
Ces majorations seraient de 10 % pour les entreprises, dont les effectifs sont inférieurs ou égaux à 20 salariés, et de 25 % pour les entreprises dont les effectifs sont supérieurs à 20 salariés. Cependant, pour les organisations pa
tronales, le coût de ce rappel serait compensé en tout ou partie selon la taille de l'entreprise et la durée du travail de chaque salarié en raison de la disparition de la 6e semaine de congés payés et des 2 jours fériés supplémentaires (lire le tableau chiffré démontrant cette compensation en page 4).
Mais l'application de la durée légale du travail a également des conséquences sur les durées maximales de travail. Un salarié peut être amené à effectuer des heures supplémentaires, à condition que son temps de travail ne soit pas supérieur à la durée journalière maximale de travail, qui est fixée à 10 heures, et à la durée hebdomadaire
maximale qui est de 44 heures sur une moyenne de 12 semaines avec une limite absolue fixée à 48 heures par semaine. L'accord permettait d'aller jusqu'à 48 heures et 52 heures en absolu.
En outre, un employeur peut faire effectuer des heures supplémentaires à un salarié, dans la limite d'un contingent annuel qui est de 220 heures par an et par salarié.
L'accord du 13 juillet 2004 antérieur à la loi Fillon, qui avait relevé ce plafond à 220 heures, fixait ce contingent à 180 heures.

2e hypothèse : le décret du 31 mars 1999 relatif à la durée du travail dans les HCR, qui fixait à 43 heures la durée du travail et qui n'a jamais été abrogé, trouverait à nouveau application.
Ce décret permettrait ainsi de maintenir la durée du travail à 39 heures par semaine. Il ferait également obstacle à toute rétroactivité au titre des heures supplémentaires.
Compte tenu de ces 2 hypothèses, il appartient aux parte
naires sociaux et aux pouvoirs publics de prendre les mesures conventionnelles ou réglementaires indispensables pour sécuriser définitivement la branche d'activité et définir la durée du travail applicable.
Face à cette incertitude juridique, l'Umih et le Synhorcat conseillent à l'ensemble de leurs adhérents de continuer à faire travailler leurs salariés en poste sur la base de 39 heures par semaine, et d'éviter de leur faire effectuer des heures supplémentaires. Par contre, pour les nouveaux embauchés, ces 2 organisations patronales conseillent, par application du principe de précaution, de leur établir des contrats à 35 heures avec une rémunération calculée sur cette base.

Analyse chiffrée du coût de la suppression de la 6e semaine de congés payés et d'un jour férié par rapport au paiement majoré des heures effectuées entre la 36e et la 39e heure.
Pour un salarié à temps plein payé sur la base du Smic
  Effectif inférieur ou égal à 20 salariés Effectif supérieur à 20 salariés
Valorisation des majorations sur les heures accomplies entre 36 et 39 heures par semaine Du 1er janvier 2005 au 30 juin 2005 :
26 semaines x 4 heures x 10 % x 7,61 E = 79,14 E
Du 1er juillet 2005 au 30 juin 2006 :
52 semaines x 4 heures x 10 % x 8,03 E = 167,02 E

Du 1er juillet 2006 au 15 octobre 2006 :

15 semaines x 4 heures x 10 % x 8,27 E = 49,62 E

Ce qui représente une somme totale sur la période de 295,78 E.

Du 1er janvier 2005 au 30 juin 2005 :
26 semaines x 4 heures x 25 % x 7,61 E = 197,86 E
Du 1er juillet 2005 au 30 juin 2006 :
52 semaines x 4 heures x 25 % x 8,03 E = 417,56 E
Du 1er juillet 2006 au 15 octobre 2006 :
15 semaines x 4 heures x 25 % x 8,27 E = 124,05 E

Ce qui représente une somme totale sur la période de 739,47 E.

Valorisation de la 6e semaine de congés payés et des jours fériés Du 1er juin 2005 au 31 mai 2006 : 5 jours de congé conventionnels au titre de la 6e semaine de congés payés : 5 jours x 7 h 80 x 8,03 E = 313,17 E
Du 1er juin 2006 au 18 octobre 2006 : 2 jours de congé conventionnel au titre de la 6e semaine de congés payés : 2 jours x 7 h 80 x 8,27 E = 129,01 E
Un jour férié supplémentaire depuis le 1er juillet 2006 : 7 h 80 x 8,27 E = 64,51 E

Ce qui représente une somme totale sur la période de 506,69 E.

Total Le salarié est redevable de la somme de 210,91 E. L'entreprise est redevable de la somme de 232,78 E.

Source : Ce tableau a été réalisé par le service juridique du Synhorcat. zzz60r

Annulation de la réglementation sur le travail de nuit
Dorénavant, est considéré comme travailleur de nuit celui qui travaille au moins 2 fois par semaine 3 heures entre 21 heures et 6 heures, ou le salarié qui travaille 270 heures par an entre 21 heures et 6 heures. L'accord prévoyait que le travail de nuit commençait à 22 heures pour se terminer à 7 heures, ou pour un salarié qui travaillait 280 heures par an.
Les travailleurs de nuit doivent bénéficier de contreparties au titre des périodes de nuit pendant lesquelles ils sont occupés. Cette contrepartie peut être accordée sous forme de repos compensateur ou sous forme de compensation salariale.
À titre de contrepartie, l'employeur peut décider de maintenir les 2 jours de congé supplémentaires pour ces travailleurs de nuit ou en choisir d'autres.
Mais surtout, la loi prévoit que la durée quotidienne du travail de nuit ne peut être supérieure à 8 heures (sauf circonstances exceptionnelles et autorisation de l'inspection du travail ou accord d'entreprise ou d'établissement).
Quant à la durée maximale hebdomadaire du travailleur de nuit, elle ne peut dépasser 40 heures (ou 44 heures par accord d'entreprise) sur une période de 12 semaines.

Annulation des dispositions aménageant le travail à temps partiel
Les dispositions spécifiques au temps partiel, prévues dans l'accord du 13 juillet 2004, disparaissent.
Désormais, si un employeur veut modifier les horaires de travail d'un salarié à temps partiel, il doit l'avertir 7 jours minimum à l'avance, et non plus 3 jours comme le prévoyait l'accord.
Le recours aux heures complémentaires est toujours possible, mais limité à 10 % de la durée prévue sur le contrat de travail (l'accord prévoyait 1/3 du contrat initial).
La coupure des temps partiels ne doit pas dépasser 2 heures maximum (contre 5 heures prévues par l'accord qui, en contrepartie, avait prévu une durée minimale de contrat).
Le temps partiel modulé, qui permet de faire varier, dans certaines limites, la durée hebdomadaire ou mensuelle fixée dans le contrat de travail sur tout ou partie de l'année, ou pendant la durée de la saison, est toujours possible.

Annulation de la 6e semaine et du jour férié supplémentaire
L'arrêt du Conseil d'État a pour conséquence de faire disparaître la 6e semaine de congé ainsi que le jour férié supplémentaire. Mais en ne limitant pas les effets de cette annulation seulement pour le futur, c'est-à-dire en accordant la rétroactivité, il faut faire comme si l'accord du 13 juillet 2004 n'avait jamais existé, et donc, comme si la 6e semaine et le jour férié n'avaient jamais dû être attribués.
Les entreprises pourraient ainsi prétendre au remboursement des jours de congés payés conventionnels et du jour férié supplémentaire dû depuis le 1er juillet 2006. Si, selon les calculs effectués par les organisations patronales, seules les entreprises de plus de 20 salariés seraient redevables d'une certaine somme d'argent, pour les entreprises de moins de 20 salariés, ce seraient les salariés qui devraient de l'argent à leur employeur.
Sans parler des salariés à temps partiel, pour qui la disparition de cette 6e semaine constitue une perte sèche, dans la mesure où ils ne pourront pas compenser le bénéfice de la perte de la 6e semaine par la majoration d'heures supplémentaires. Sans oublier non plus, les extras et saisonniers qui bénéficiaient de cette 6e semaine payée en bénéficiant d'une indemnité de congés payés de 12 % (au lieu de 10 %).

Les discothèques sortent du champ d'application de la CCN des CHR
Les discothèques avaient été intégrées dans le champ d'application de l'accord du 13 juillet 2004, mais suite à un autre recours émanant cette fois du Syndicat national des discothèques et lieux de loisirs (SNDLL), le Conseil d'État lui a donné gain de cause, et a sorti les discothèques du champ d'application de la convention collective des CHR du 30 avril 1997 et de ses 2 avenants. Les discothèques, qui ne bénéficient pas d'un accord ou d'une convention collective spécifique, sont soumises aux dispositions du Code du travail uniquement. zzz60t

"Génération 35 heures"
L'arrêt que vient de rendre le Conseil d'État le 18 octobre 2006 annulant l'accord sur les 39 heures dans la profession des CHR relance le débat sur les 35 heures.
Partant du constat, sans appel, qui est partagé par un grand nombre : la génération qui arrive sur le marché du travail peine à se fondre dans le moule de l'entreprise. Si les 'nouveaux entrants' revendiquent d'emblée plus de droits que de devoirs, les entreprises, de leur côté, semblent avoir beaucoup de difficultés à appréhender, tenir compte et finalement 'utiliser' les valeurs, aspirations et qualités spécifiques de cette génération.
Dans Génération 35 heures, Thibault Lanxade, jeune p.-d.g. de 35 ans, décrypte ce phénomène et propose des solutions proches du terrain, comme par exemple la création d'un service civique pour davantage d'intégration des jeunes dans la vie économique et sociale du pays. L'auteur vous propose de suivre les péripéties d'un manager avec ses jeunes collaborateurs pendant 35 heures.
Entre démotivation, impatience, revendications, mais également créativité et quête de sens des nouveaux entrants, Thibault Lanxade navigue et s'interroge sur les nécessaires adaptations à apporter aux méthodes de management traditionnelles.
Un livre pour essayer de mieux comprendre et faire travailler cette nouvelle génération. Pour l'aider aussi à prendre conscience des réalités de l'entreprise…
zzz82

Les syndicats de salariés réagissent

Pour Johanny Ramos de la CFDT, "il n'y a aucune incertitude : le décret de 1999 ne s'applique pas car il a été pris avant les lois Aubry instaurant les 35 heures. L'intervention des députés montre bien que nous avons raison et que le collège patronal a peur de devoir payer des arriérés de salaire. Cependant, je précise que nous sommes prêts à retourner à la table des négociations". En effet, d'après les calculs effectués par la CFDT, le rattrapage pour les 22 mois écoulés représenterait 788 E par salarié.
Force Ouvrière se déclare prête à reprendre au plus vite les négociations. Selon Denis Raguet, "il est urgent de se remettre tous autour de la table pour sortir de l'impasse juridique dans laquelle la profession se retrouve coincée". Comment ne pas s'inquiéter qu'un décret de 1999, annoncé par certains comme à nouveau d'actualité, puisse porter la durée hebdomadaire de travail à 43 heures ? Néanmoins, FO rappelle que si elle est résolue à négocier, elle ne signera pas n'importe quoi : "Il faudra nécessairement que les salariés récupèrent au moins, d'une manière ou d'une autre, les avantages issus de l'accord de 2004 et qu'une nouvelle grille salariale décente soit mise en place", précise Denis Raguet.


Vos questions et vos remarques : Rejoignez le Forum des Blogs des Experts

Rechercher un article

L'Hôtellerie Restauration n° 3000 Hebdo 26 octobre 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

L'Application du journal L'Hôtellerie Restauration
Articles les plus lus...
 1.
 2.
 3.
 4.
 5.
Le journal L'Hôtellerie Restauration

Le magazine L'Hôtellerie Restauration