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du 28 septembre 2006
VIE PROFESSIONNELLE

À LA RENCONTRE DU LOT-ET-GARONNE

IL Y A UNE VIE EN CAMPAGNE

S'installer à la campagne fait rêver. Dans le Lot-et-Garonne, nous sommes allés à la rencontre de professionnels récemment établis et heureux de leur sort. Peut-être l'exception qui confirme la règle…


Evelyne et Daniel Martinon ont abandonné les rythmes incessants des saisons en montage et bord de mer pour la douceur d'un petit village lot-et-garonnais.

À la lecture des guides touristiques, le Lot-et-Garonne est un "véritable pays producteur de vacances". 200 km de réseau fluvial navigable. De nombreux villages de pierres et des bastides à découvrir. Une alternance de landes et de coteaux à parcourir à pied, à cheval ou à vélo. De jolis produits à table. Pruneaux d'Agen, tomates de Marmande, noisettes de Cancon, fraises Gariguette, côtes de Duras, buzet, côtes Bruhlois, armagnac, foie gras et tourtières… Sans oublier l'ensoleillement et le climat, parmi les plus agréables de l'Hexagone. Une destination tout en douceur, dont l'activité estivale s'étend pourtant seulement en zone rurale du 20 juillet au 20 août, constate le président de l'Umih 47. "Nous sommes à 2 heures de la mer et de la montagne. C'est un département de passage proche de Bordeaux, Toulouse, le grand sud... Nous avons pourtant de multiples lieux et choses à faire partager. Quand nous arrivons à faire s'arrêter les gens, ça marche. Ils reviennent. Mais nous devons encore nous organiser pour que la durée des séjours s'étale davantage", estime Max Michelli. Actuellement, la moyenne est d'environ 2 jours. C'est peu, effectivement. Cependant, il existe aux yeux des professionnels récemment installés d'autres atouts. Jérôme et Karine Duville, 31 ans et 29 ans, ont repris en mars 2005 le restaurant qui jouxte la base ULM de Saint-Exupéry Fourcaud, au coeur du département. Une des plus importantes d'Europe. "Elle fête ses 20 ans cette année ; c'est aussi un gros centre de formation des instructeurs et pilote", explique Jérôme. "Pour nous, c'est une clientèle un peu particulière, car certains sont là pour 6 mois. Au restaurant, ils sont chez eux. Pour eux, ça nous arrive de faire le petit-déjeuner." Mais là n'est pas l'essentiel de l'activité. Le Saint-Exupéry s'adresse aux gens du cru et aux commerciaux. La grande salle s'articule autour de 2 restaurations distinctes : la brasserie, avec formule buffet, des salades et des plats du jour. "Ça sort très rapidement." Et le semi-gastro, qui fonctionne principalement au dîner. "Tout n'est pas définitif. Nous sommes encore en phase de création", s'excuse Jérôme. La réputation que le couple construit doucement - mais sûrement - devrait cependant les rassurer. L'établissement, parti de rien (c'est une création de fonds, a déjà de solides adeptes.


Max Michelli, président de l'Umih 47, travaille en étroite collaboration avec les chambres consulaires et le lycée hôtelier de Nérac. 


À 31 et 29 ans, Jérôme et Karine Duville ont posé bagages au coeur du département. Leur établissement séduit aussi bien la clientèle locale que les amateurs d'ULM.

De l'importance de l'accueil
"Il faut absolument goûter le Pavé de canard laqué au Monbazillac et poivre de Sechuan", affirme l'un d'eux, attablé devant une assiette particulièrement alléchante. "Voyez aussi la carte des vins", ajoute-t-il. Intitulée 'Notre Sélection Sud-Ouest', celle-ci met en avant le nom des producteurs, suivi d'un résumé du vignoble et des caractéristiques des cuvées sélectionnées. Pas de liste. Mais une succession d'encadrés, qui donnent envie de goûter. "Nous essayons de promouvoir la bouteille (non terminée) à emporter. Les Anglo-Saxons s'y prêtent. Les Français ont encore beaucoup de mal", remarque Karine. Cette prestation, même si elle est loin d'être ancrée dans les moeurs, fait pourtant partie de l'accueil. "La clientèle a besoin de se sentir accueillie. Il faut la mettre à l'aise, lui faire partager un bon moment. Il faut lui donner confiance et la distraire. Pour moi, c'est ça la restauration." Le Saint-Exupéry propose également des soirées thématiques. Espagnoles, choucroute, créoles… Personnel habillé aux couleurs de l'événement et animations au diapason. Ainsi, pour la soirée country, professeurs de danses folkloriques, musiciens et chevaux battaient la mesure. Les résultats, au bout d'une année d'exploitation, sont 8 % au-dessus des prévisionnels. Prometteurs donc pour ce couple issu du cursus hôtelier classique et qui a posé bagage volontairement dans le 47. "Ici, c'est un choix. On voulait le Sud-Ouest. Montpezat, c'est l'épicentre du Lot-et-Garonne." Le village de Montpezat se dresse à quelques minutes à vol d'oiseau des engins volants. Un moulin séculaire et le début de La guerre de Cent Ans pour repères historiques. On y croise aussi des descendants du baron Casimir Dudevant, mari de George Sand. Un seul restaurant, l'Origan, entre pizzas et solides magrets, tenu par Daniel et Evelyne Martinon. Originaires de Saint-Étienne, ils ont trouvé leur bonheur sur cette butte en 2000. Avant cela, des années en tant que saisonniers, en Savoie l'hiver, à Port-Leucate l'été. Entre autres. De formation charcutier-traiteur, Daniel avait envie de renouer avec le travail du foie gras, des terrines… Lui et son épouse cherchaient un établissement à mettre en route avec des investissements limités. "C'était un bistrot qui faisait casse-croûte, commente Daniel. Quand on a visité, on a eu le coup de foudre. Ce n'était pas trop grand, il y avait la terrasse. On pouvait faire quelque chose de mignon, et même les jours de mauvais temps, on serait au-dessus des nuages. On l'a vu le lundi, le mardi on a signé." Daniel et Evelyne ont cherché un confort de vie. "Et nous l'avons trouvé", lancent-ils en souriant. Une soixantaine d'oiseaux gazouillent joyeusement dans les cages qui ornent la terrasse. Daniel a racheté des ruches et fait son miel. Evelyne, bilingue, fait la causette avec les Anglo-Saxons qui ont acheté dans le coin. L'offre ? "Une carte qui part du principe qu'on exploite seulement à deux, et qui tient compte des habitués." Comprenez des plats de poissons et de viandes avec des pizzas et des plats de pâtes. 70 % de clientèle locale, 30 % de touristes anglais. "Au printemps et en été, nous avons des Anglais qui viennent là presque tous les soirs. On a les propriétaires et leurs locataires. Et quand les propriétaires prêtent leur villa, ils le font à deux conditions, qu'ils fassent leurs courses chez Annick, l'épicière, et que lorsqu'ils vont au resto, ce soit chez nous." Vrai de vrai. "Les Anglais sont très viandes ou pâtes fraîches. Les tagliatelles à la carbonara font recette. Les gens n'aiment pas trop les changements de carte et mangent moins en quantité. Pour nous, le travail est complètement différent. Bien sûr, on a divisé les prix vers le bas. On faisait 12 000 couverts en 60 jours à Port-Leucate. Ici, c'est du mi-temps. On a levé le pied tout en faisant ce que nous aimons. Pour un cuisinier, c'est un pays de cocagne. Chaque saison apporte son lot de bonnes choses."


Baptême du feu, cet été, pour Lydie Manet (ici avec son mari) qui a quitté le métier de comptable pour tenir un restaurant de Sainte-Livrade.

Baptême du feu
La région intéresse également les non-initiés. En 1988, une Parisienne, professeur de patinage, joue un quitte ou double à Sainte-Livrade, commune entre Montpezat et Villeneuve-sur-Lot. Le garage et la courette de la bâtisse achetée par ses parents sont transformés en pizzeria. En 1988, l'aménagement d'une cuisine permet d'ouvrir la carte aux osso buco et autres plats d'inspiration italienne, incluant les produits régionaux. Touristes, artisans, commerçants et VRP fréquentent l'adresse. Au printemps 2006, Carole décide de passer le flambeau. "J'aimerais que cela appartienne à quelqu'un qui ne soit pas du métier, mais qui l'aime et veuille se battre pour lui", confie-t-elle alors. Septembre 2006, la Piazza est désormais entre les mains de Lydie Manet, 33 ans, Bordelaise, comptable de formation. "C'est à la fois un rêve et un aboutissement. Il y a longtemps que je voulais tenir un restaurant. L'établissement m'a tout de suite plu. La difficulté que j'ai eue a été de réussir à convaincre les banques que j'étais capable, alors que je n'ai ni diplôme ni passé hôtelier." En cuisine, les 2 jeunes femmes en contrat de professionnalisation depuis plusieurs mois perpétuent pour l'instant la précédente carte. Laurent, serveur depuis 1 an dans l'établissement, ancien gérant de restaurant et détenteur d'un CAP pâtissier, se révèle une aide précieuse. "On travaille en binôme. Il sait très bien vendre, et il connaît bien la clientèle. Sur ses conseils, j'ai mis le midi une formule, plat, dessert et café à 12,50 E qui marche très bien." Des plats en test. "Nous allons modifier petit à petit la carte, sans tout bouleverser. Par exemple, à terme, il n'y aura que des pâtes fraîches." La carte des vins, axée sur la région, devrait aussi être étoffée. En projet, une autre salle à l'étage, destinée aux groupes et aux sociétés de la région. "On a des demandes pour une salle indépendante, qui permettrait de recevoir des groupes de travail qui souhaitent déjeuner ensuite sur place." Ouvert midi et soir, le service est dans les starters dès 19 heures, clientèles anglaise et hollandaise oblige. Le baptême du feu a-t-il été rude ? "Pour l'instant, ce qui m'importe, c'est la satisfaction des clients", lâche Lydie. Un indice ? Des athlètes de la salle omnisports du Temple-sur-Lot en ont fait leur rendez-vous hebdomadaire gourmand. Ces créations ou reprises montrent qu'il existe une vie à la campagne. Le président de l'Umih 47 en convient. Lui et les membres de son bureau s'appliquent d'ailleurs à relayer les atouts du métier auprès des jeunes. Des rencontres dans 21 collèges ont été organisées avant l'été. "Les jeunes sont intéressés, mais il faut aller au-devant d'eux", soupire Max Michelli, qui avance en étroite collaboration avec le lycée hôtelier de Nérac. "L'image de nos métiers évolue, mais on a encore du pain sur la planche", avoue-t-il. Ses chantiers départementaux ? "Il y a pléthore de marchés nocturnes, et à chaque fois, nous sommes confrontés à des restaurations incontrôlées qui portent un sévère préjudice aux professionnels installés. Quand je vois les contraintes qu'on nous impose et ce qu'on laisse faire…" À Agen, la restauration et les bars d'ambiance constituent un pôle festif autour de la place Jasmin. Les cafés ont le droit de fermer à 2 heures les vendredis et samedis soir, les discothèques à 5 heures. Ville universitaire, Agen maintient le cap sans grosse vague. Max Michelli est un fervent défenseur des vignobles lot-et-garonnais. Il milite pour le principe de la bouteille qu'on ramène chez soi, non sans obstination. "Je suis sûr que ça va rentrer dans les habitudes." Oeuvrant main dans la main avec les chambres consulaires, d'agriculture, CCI, de métiers, l'Umih 47 est présent dès qu'il
s'agit de promouvoir les productions locales de bouche. "On a une puissance gastronomique, un rapport qualité-prix super, des cuisines avec des produits magnifiques. On a vraiment toutes les possibilités, jusqu'à servir des fruits ramassés le matin même. Vous savez, toutes les régions ne peuvent pas en dire autant." Côté adhérents, le syndicat du Lot-et-Garonne affiche un taux de pénétration de l'ordre 60 %. "Et des jeunes", insiste son dirigeant.
Sylvie Soubes
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Umih 47
42 rue Lamouroux
47000 Agen
Tél. : 05 53 66 88 39
syndicat.hotelier@wanadoo.fr

Initiative Vin

L'Umih 47, la chambre d'agriculture du Lot-et-Garonne et la filière viticole du département ont proposé cette année 'Les Vins d'été de Lot-et-Garonne'. Les caves du département ont ainsi sélectionné des "vins adaptés à une consommation estivale" dédiés à la restauration. L'opération a été associée à ' Emportez votre bouteille' : des poches destinées à transporter les bouteilles non terminées par les consommateurs sont distribuées aux professionnels.

• Les vins du Lot-et-Garonne
• Côtes de duras
• Côtes du marmandais
• Buzet
• Vins de pays de l'Agenais
• Vins de pays de Thézac-Perricard
• Côtes du brulhois
• Côtes de Gascogne

Micro à…

Alain Merly, député-maire UMP de Prayssas et conseiller général

"La vraie problématique, ce sont les difficultés de recrutement. Et ça va au-delà du département. Les métiers de la restauration demandent un certain cadre, et nous sommes aujourd'hui dans le domaine de la vocation. Nous avons dans le département de grandes tables. Je pense par exemple à La Toque Blanche à Pujols, aux Loges de l'Aubergade à Puymirol… Là, ce sont des professionnels, qui ont fait leurs preuves. Malheureusement, je vois ici et là des personnes qui ouvrent un établissement et qui ne vont au bout. Vivre à la campagne fait rêver. Mais ce n'est pas si simple. Il faut apporter quelque chose, correspondre à un environnement… Le département joue une carte importante en matière fluviale. Nous aurons dans quelques années un produit phare, qui sera associé aux plaisirs campagnards. Tout cela doit être pris en considération. Nous avons déjà Walibi qui enregistre quelque 450 000 entrées. Nous devons défendre le tourisme comme une économie d'avenir. Notre tourisme à nous, c'est le pays de l'aventure douce. Et la gastronomie fait partie intégrante du schéma."

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L'Hôtellerie Restauration n° 2996 Hebdo 28 septembre 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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