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du 25 mai 2006
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Marrakech : chère, branchée et saturée


Ce palais, inspiré de l'Alhambra de Séville, a vu le jour après 15 mois de travaux au coeur de la palmeraie de Marrakech.

Arrivée à son apogée, la Cité ocre ? À voir le nombre de chantiers en cours au sein de Marrakech, on crie à la saturation. Dans la Médina, les riads à vendre viennent à manquer ; côté palmeraie, nouveau ghetto à émirs, difficile de trouver un hectare de terre constructible ; quant à Gueliz, la ville nouvelle, elle croît horizontalement, sur des kilomètres : bulldozers et grues grignotent le paysage tandis que Hilton, Four Seasons et Kenzi y achèvent leurs volumineuses unités. Aux environs, les zones de l'Ourika et de l'Agdal accueillent des projets de 600 chambres, livrables en 2008 pour TO. Oasiria, 1er parc aquatique du Maroc, pompe le peu d'eau qui reste tandis que pointe la sécheresse. Bulle immobilière et spéculative, tarifs exponentiels injustifiés, Marrakech change de visage : la place Djema el Fna, désormais pavée, vend 7,50 E des brochettes qu'on payait jadis quelques dirhams. Les ruelles de la vieille ville, désormais éclairées et salubres, abritent d'audacieux restaurants-concept bondés. Hors des remparts, le mojito s'affiche à 10 E dans les bars lounge et on peut finir la nuit en boîte avec la faune résidente. Un bouleversement qu'explique un brusque déplacement de typologie de clientèle : en 1996, Marrakech se limitait aux routards pour un taux de retour nul. Désormais, la Cité ocre préfère s'offrir aux people et aux charters, plus fidèles. En attendant les 10 millions de touristes, la ville dresse le bilan de 8 ans de croissance effrénée : en conclusion, c'est la fin du mythe riad, et il devient urgent de rationaliser ce développement parfois anarchique… sous peine de finir comme la Tunisie.

Une explosion liée à la défiscalisation et aux investissements trop rapides
Alain Bonnassieux fait partie des premiers migrants français de la Médina : son Dar Soukkaina acheté 35 000 E en 1999 pourrait être revendu 10 fois sa valeur d'origine. "Je ne croyais pas au long terme au produit riad. Pourtant, on est passé de 30 maisons d'hôte en 1999 à plus de 1 000", affirme le gérant. Pour lui, le phénomène se stabilise : "Le coup est encore jouable pour des jeunes sortant d'école voulant se faire les dents : un certain nombre de propriétaires cherchent désormais des gérants." Selon Alain, ces fonds de commerce se vendraient entre 90 000 et 120 000 E. "La formule devrait vite se développer, beaucoup de non-hôteliers se rendent compte de la difficulté d'exploiter et de faire du commercial. Ils font de belles réhabilitations, mais ne sont pas sur place pour offrir le service d'hôte." Marie-Noëlle Schenck qui dirige le riad Dar Doukkala avec son mari ne dit pas le contraire : "Il existe une demande d'association, car beaucoup de propriétaires en ont ras-le-bol et souhaitent mettre en gérance." Ce couple d'hôteliers s'occupe depuis 2003 d'un riad d'un de leurs amis. Ils confirment le surnombre de villas et évoquent le problème des tarifs fantaisistes qui concerne autant les riads que les restaurants de cette ville devenue aussi chère que Paris. Pour dîner, difficile de tabler sur une prestation à moins de 30 E, notamment au sein de nouveaux 'concepts' fumeux. Pourtant, l'offre en restauration reste peu diversifiée et dirigée exclusivement vers une clientèle de passage. Selon Franck Seguin, d.g. des Jardins de la Médina, le parallèle entre le développement touristique de Marrakech avec celui de Saint-Martin est à faire : "L'essor est similaire : l'explosion, liée à la défiscalisation et aux investissements trop rapides, présente des effets pervers." Selon lui, le frein probable à l'expansion économique du lieu serait l'instabilité politique. Alors, investir ou pas à Marrakech ? Pour Thierry Isnardon, propriétaire du restaurant Le Foundouk, la Cité ocre pourrait compter plus de CHR français, "à condition d'y placer des gens sérieux : pour une centaine d'ouvertures réalisée ces 5 dernières années, combien ont perduré ?", questionne le patron du restaurant français le plus populaire de la Médina. Son concept : un caravansérail rénové servant entrecôtes et tajines. Une formule efficace. Pour lui comme pour Alain Bonnassieux, les perspectives en restauration à Marrakech sont réelles si l'on vise une clientèle d'expatriés et de résidents qui possèdent un certain pouvoir d'achat. Mais le risque de saturation n'est pas loin. Et pour Alain Bonnassieux, le projet horizon 2010 est trop ambitieux : "L'expansion de Marrakech s'inscrit dans une spirale folle : absence de gestion urbaniste, constructions sauvages, problèmes d'eau, concessions aux groupes étrangers sans contrepartie de développement : le pays se dépossède de ses principaux atouts." Point de vue que tempère Thierry : "Vision 2010 est crédible si la politique commerciale est accompagnée. La ville s'est embellie, assainie, les nuisances ont diminué. Je souhaite que perdure cet engouement pour Marrakech, car son potentiel est vaste." zzz99

Vision 2010, le projet pharaonique de 'M6'
10 millions de touristes en 2010 (7 internationaux) contre 4,5 en 2005
160 000 nouveaux lits portant la capacité nationale à 230 000 lits
600 000 créations d'emplois prévues (secteurs CHR, BTP et tourisme)
8 à 9 milliards d'euros d'investissements
48 milliards d'euros E de recettes espérés
 

 

Le Maroc en bref
Capitale : Rabat
Régime monarchique : Le roi est Mohammed VI, dit 'M6'
Langues : arabe, berbère, français (+ espagnol et anglais)   
Population : 30 millions d'habitants
Superficie
: 450 000 km2
Principales villes : Casablanca, Tanger, Rabat, Marrakech, Fès      
Monnaie : Dirham (DH)    
Taux : 1 E = 11 DH
Nombre de Français au Maroc :25 580 immatriculés
Marrakech devance Agadir

C'est la première capacité hôtelière nationale et le meilleur taux d'occupation du pays avec 56 %
Nuitées : 710 000 en 2005 (contre 557 000 en 2004)
Capacité en lits totale : 35 000 lits, soit 21 % de la capacité totale du pays
Maisons d'hôte : 600 à 1 000 riads/villas marocaines (294 déclarées)
54 projets en cours de réalisation : 15 hôtels, 3 VVT, 8 résidences touristiques et 28 maisons d'hôte, soit 5 200 lits et 64 projets en phase d'instruction : 26 hôtels, 3 VVT, 5 résidences touristiques et 32 maisons d'hôte, soit 9 100 lits prévus
• >Restauration : 100 restaurants, soit 7 650 couverts
• 123 agences de voyages et 148 de location de voitures
Tendance saisonnière : mois creux de juin à août et janvier
Présence française : 5 000 immatriculés, 8 000 présents à l'année.

 

L'avis de Laurent Paul Alteresco, cabinet Ramses Consulting à Rabat

Conjoncture : Le Maroc étant à la mode, le nombre de CHR en projet augmente depuis 2 ans, en majorité sur l'axe Casa-Rabat où nos clients se repositionnent. Marrakech est aujourd'hui saturée d'offres : les touristes y sont nombreux, mais
ne forment pas un potentiel de clients pour lieux ciblés prestige. Rabat, qui compte 1 million d'habitants, regroupe ministères, universités, ambassades et bourgeoisie naissante, une élite qui a entre 30 et 50 ans et peut s'offrir un repas à 60 E.
Perspectives : Les métiers de bouche sont porteurs : épicerie fine, traiteurs, tables gastronomiques. L'investissement minimal s'élève à 300 000 E. Il existe la possibilité d'associer ceux qui ont les fonds mais pas l'expérience avec ceux qui n'ont pas d'argent mais du métier.
Attention ! Nombreux sont les gens inexpérimentés porteurs d'énormes investissements qui se lancent, convaincus qu'il est simple d'ouvrir une affaire en plein boom économique. Beaucoup se sont faits déplumer, et sur 10 créations de CHR, 6 risquent de faire faillite.
Pour procéder à l'ouverture d'un établissement : Contactez d'abord la Mission économique qui peut fournir statistiques et coordonnées de cabinets patentés. Prenez un billet d'avion et venez voir sur place ce qui est réalisable. Enfin, faites une étude de faisabilité sur la base du projet.

 

L'ASSOCIATION DES CHEFS DU MAROC

Une initiative de Damien Durand, chef au Ksar, Relais & Châteaux à Marrakech


"Faire venir
des seconds et des commis français va devenir d'actualité à Marrakech", explique Damien Durand.

"Se rencontrer et faire reconnaître notre métier, c'est ce nous visons ! 25 chefs au Maroc, dont la moitié de Français, qui viennent juste de nous fédérer. Nous organiserons bientôt un dîner de gala, et nous comptons visiter les écoles pour repérer les bons éléments à recruter. Faire venir des seconds et des commis français va devenir d'actualité à Marrakech, si la ville continue de croître et d'exiger une qualité toujours supérieure. La demande pour du personnel de cuisine français est là."

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L'Hôtellerie Restauration n° 2978 Hebdo 25 mai 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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