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du 1er décembre 2005
VIE PROFESSIONNELLE

AU CONGRÈS 'LO MEJOR DE LA GASTRONOMIA' À SAN SEBASTIEN

UNE AUTRE FAÇON DE VOIR LA GASTRONOMIE

Espagne Une fois de plus, les participants au congrès Lo Mejor de la Gastronomía, qui s'est tenu à San Sebastien du 21 au 24 novembre, ont eu l'occasion de s'enrichir en découvrant les idées et les savoir-faire de jeunes auteurs et des plus grands du monde la gastronomie. Ainsi, Ferran Adrià, en plus de ses nouvelles découvertes et créations, a révélé sa définition de la gastronomie, et Joël Robuchon, invité vedette de cette édition et honoré par le 2e prix LMG, en a profité pour démontrer toute l'importance de la transmission du savoir-faire pour faire perdurer la gastronomie.
De notre envoyée spéciale Bernadette Gutel à San Sebastien


Rafael Garcia Santos, initiateur du congrès Lo Mejor de la Gastronomía, rend hommage à Joël Robuchon, l'invité vedette de cette 7e édition, qui s'est vu remettre le 2e prix LMG.

Ferran Adrià, le chef espagnol le plus médiatique, a confié qu'il était lassé d'être considéré comme 'le chef de la gastronomie moléculaire'. "Il est vrai, a-t-il reconnu, qu'en 1993, j'ai été le premier à demander aux scientifiques de m'expliquer ce qui se passe lorsqu'on réalise, par exemple, une mayonnaise, et que je continue à travailler en étroite relation avec eux. Mais, je fais avant tout de la gastronomie. Beaucoup de personnes me demandent quelle est ma définition de la gastronomie. J'ai réfléchi, et je me suis rendu compte que lorsque des journalistes faisaient un reportage sur ma cuisine, ils s'intéressaient à moi et à mon équipe, mais pas du tout à mes clients. Personne n'a jamais interrogé ni filmé les clients de El Bulli. Alors, je l'ai fait." Ferran Adrià a donc demandé à une de ses connaissances de filmer un couple d'amis en train de déguster ses mets pendant 4 heures, et en a fait une vidéo de quelques minutes intitulée A Meal in the life. Une définition, en images et sans mot, que tout le monde - quelle que soit sa nationalité - peut comprendre. Une belle opération de communication. Les visages de l'homme et de la femme, filmés en gros plan et sur fond musical, d'abord concentrés, attentifs, deviennent souriants de plaisir et de complicité, étonnés et surpris, puis éclatants et roses de bonheur et de rires. "La gastronomie, a-t-il expliqué, c'est donner de l'émotion, du bonheur, c'est étonner, provoquer… Et tout ceci, on l'obtient avec les meilleurs produits, de nouvelles techniques, de la recherche, de la créativité…"

Ferran Adrià : le dialogue avec les scientifiques des IAA
Quand les cuisiniers français travaillent en collaboration avec les Industries agroalimentaires (IAA), c'est pour les aider à mettre au point des plats cuisinés, des soupes, des pâtisseries… et, dans bien des cas, de les aider à vendre ces produits en prêtant leur nom dans le cadre d'un accord financier. Ferran Adrià, lui, fait le chemin inverse. Il a décidé de profiter des résultats des recherches effectuées par les scientifiques des IAA pour faire évoluer sa cuisine. "Jusqu'alors, explique-t-il, il n'y a pas eu de véritable dialogue entre les cuisiniers et ces scientifiques, et je pense que cette décennie, ainsi que les prochaines, sera celle du dialogue entre les IAA et les cuisiniers. Je trouve cela très fascinant. Je pense d'ailleurs qu'au cours des 2 années à venir, au moins 25 produits vont révolutionner la cuisine." Au cours de l'année 2005, Ferran Adrià a notamment travaillé sur des produits qui gélifient à chaud contrairement aux gélifiants utilisés jusqu'alors en cuisine comme la gélatine ou l'alginate, qui se solidifient à froid. Ces produits sont : le kappa, la gomme xanthane, la méthylcellulose extraite de la pulpe des arbres, etc. Dans les mois à venir, pour amplifier ses recherches, il va se rapprocher du chef américain Wylie Dufresne, aussi passionné que lui par ces produits issus du monde de l'industrie. Wylie Dufresne, lui, a particulièrement étudié la méthylcellulose et une enzyme, l'enzyme trans-glutaminase ou TG (lire encadré ci-contre). Mais Ferran Adrià ne se contente pas d'effectuer des recherches sur des produits jusqu'alors réservés aux IAA : il en emprunte les technologies. Il a étudié cette année la lyophilisation. "J'ai, dit-t-il, utilisé cette technologie, non pas pour déshydrater un produit comme le font les IAA notamment pour le café ou les fruits, mais pour déshydrater des préparations comme la mousse. J'ai obtenu ainsi une nouvelle texture, peu commune en cuisine : la texture sèche." Ceci lui a notamment donné l'idée de faire, par exemple, un amuse-bouche composé d'un socle de mousse de roquefort lyophilisé, surmonté d'une couche de mousse de roquefort : une nouvelle alliance de textures, sèche et moelleuse-fondante.


LYO de pistache, gelée de truffe noire et mousse de mandarine, une recette imaginée par Ferran Adrià à partir de mousse de pistache lyophilisée.

Joël Robuchon : transmettre à qui, quoi, comment
À l'heure où la rénovation du CAP, l'apprentissage à 14 ans, la place des stagiaires dans les entreprises et la formation des tuteurs font l'objet de polémiques, Joël Robuchon, qui estime qu'aujourd'hui les chefs "manquent de technicité", a profité du congrès Lo Mejor de la Gastronomía pour inciter tous les congressistes à réfléchir sur la transmission du savoir-faire. "Transmettre, a-t-il précisé, n'est pas un but en soi. Il faut réfléchir à qui transmettre et comment transmettre pour que tout ce que l'on transmet - son savoir et son éthique - perdure. Transmettre à un grand nombre, c'est enseigner ; transmettre à quelques-uns dans le cadre d'une relation maître-disciple, c'est éduquer. Ce qui se transmet, ce n'est pas le geste décomposé mais le geste total. Ce ne sont pas des gestes de robot mais des tours de main, des tours de main que l'on ne peut apprendre qu'en regardant et en refaisant. Et le disciple ne peut bien apprendre que s'il le fait 'avec le coeur' et non pas 'par coeur'." Cette réflexion sur la transmission de son savoir-faire fait certainement partie des clés de sa réussite. Aujourd'hui, après avoir ouvert l'Atelier à Paris, Joël Robuchon a dupliqué ce concept à Las Vegas, Tokyo et prochainement Shangai et New York. Et se trouve sollicité par bien d'autres villes d'Asie. zzz22v

Pour en savoir plus sur le congrès Lo Mejor de la Gastronomía et connaître les chefs invités à présenter leurs savoir-faire, rendez-vous sur www.lomejordelagastronomia.com

Sciences ou cuisines

Les découvertes 2005 de l'Espagnol Ferran Adrià, du Restaurant El Bulli, et de l'Américain Wylie Dufresne, du Restaurant W.D. 50

• Avec le kappa, un produit issu des algues et une seringue, Ferran Adrià fabrique les spaghettis les plus fins du monde qu'il dépose délicatement sur des oursins.
• Il obtient 'des olives' en faisant tomber du jus d'olive enrichi de chlorure de calcium et d'un peu de gomme xanthane dans une gelée de kappa. Les 'olives' sont ensuite macérées dans un mélange de tomates, d'herbes, d'épices…
• Ferran Adrià a découvert que la gomme xanthane permettait d'épaissir à froid un jus de moule ou de viande. Non bouillis, non réduits, ces jus conservent ainsi leur goût d'origine.
• En émulsionnant du lait de noix salé additionné d'un peu de gomme xanthane et d'huile de noix, Ferran Adrià obtient un produit à la texture du beurre. "La gomme xanthane est à la crème ce que le siphon est à la mousse", a-t-il expliqué.
• Grâce à la gomme xanthane, Ferran Adrià étonne ses clients avec une sangria en suspension. Après macération des fruits, on passe le mélange pour récupérer le jus, additionné ensuite de gomme xanthane puis emballé sous vide, 2 fois de suite. Il devient alors transparent, mais on ne sait pas pourquoi. Les fruits ajoutés au moment de servir restent en suspension. On peut faire la même chose avec du jus de melon agrémenté de dés de melon et de jambon.
• Avec de la méthylcellulose, on peut coller à chaud une brunoise de cèpes ou autres, ce qui permet d'en entourer un morceau de viande par exemple.
• Grâce à l'enzyme trans-glutaminase ou TG qui permet de créer des liens dans les protéines animales, Wylie Dufresne transforme ces protéines en feuilles minces, lesquelles, une fois cuites et refroidies à l'eau, peuvent être découpées et roulées. Cela lui permet de réaliser, par exemple, des cannellonis en pâte de gambas farcis de gambas, citron, pousses de soja à l'escabèche, garnis de basilic thaï et servis avec une sauce au chorizo.

Complément d'article 2953p38
Le discours de Joël Robuchon :

LA TRANSMISSION

Être chef de cuisine et appartenir à l’élite étoilée de la gastronomie mondiale ne se résume pas à dominer la technique et la créativité, c’est aussi s’impliquer à transmettre aux futures générations. Voici à mes yeux une formidable mission, conséquence de la reconnaissance de mes pairs.

Mais "Transmettre" Qu’est-ce que cela veut dire ?
De grandes questions nous interpellent :
"Que peut-on transmettre ?"
"À qui transmettre ?"
"Pourquoi transmettre ?"
"Que possédons-nous ?"

Que peut-on transmettre, en effet ? Ce que l’on possède, bien sûr, ou ce que l’on a acquis. Un savoir, un capital, quelque chose de matériel, de technique ou d’immatériel, de spirituel : une morale, une éthique.

Mais ce que nous transmettons, comme une technique de cuisine, voire une recette par exemple, nous échappe-t-il ?
Est-ce que l’on passe le relais ou est-ce que l’on perd quelque chose ?
Est-ce que nous gagnons quelque chose, quelle est notre récompense ? Par exemple les étoiles qui sont à l’arrivée ?

En fin de compte, il existe deux types de chefs de cuisine : ceux qui veulent transmettre et ceux qui s’y refusent.

Pourquoi certains ne veulent-ils pas transmettre ? Ils ne veulent pas transmettre pour deux raisons :
- Apparemment en transmettant, ils laisseraient échapper quelque chose, et se faisant, cela les appauvrirait, ils seraient dépouillés. C’est-à-dire que ce qu’ils possèdent ou ce qu’ils savent a une valeur concurrentielle et constitue leur identité.
- Deuxième raison : non seulement cela leur échapperait et s’ils craignent cette perte, c’est probablement qu’ils veulent savoir à qui transmettre.

Donner à un inconnu ou donner à un fils, ce n’est pas la même chose. Donc transmettre soit, mais à qui ?
Je perds l’unique propriété de ce que je transmets si je le donne à un inconnu, à un concurrent, à un adversaire, à quelqu’un qui va en effet me dépouiller.
Alors que ce que je transmets me fait exister davantage, me fait durer, me fait reconnaître de mes pairs si je le donne à qui j’ai choisi de donner. Il s’agit bien de possession, d’héritage et d’identité.

Un chef japonais réputé et ami me l’a dit ainsi : " Je transmets à mes cuisiniers tout ce que je sais, tout ce que je crois.Nous nous lions de manière indéfectible.Ils s’en vont travailler dans un autre restaurant. Ils ont à leur tour des cuisiniers et ainsi mon savoir dure et perdure à travers ce que j’ai donné et qui se multiplie. Je transmets et je m’enrichis c’est-à-dire que j’existe ailleurs et plus longtemps ".

Transmettre n’est pas un but en soi, mais c’est le choix de à qui, comment et pourquoi transmettre qui est déterminant pour durer, pour s’enrichir, pour se faire plaisir…
Ceux qui ne veulent pas transmettre, veulent garder et durer. Ils pensent que s’ils partageaient, s’ils donnaient, ils se mettraient en danger… Dans le monde de la cuisine, c’est parfois vrai.
Nous connaissons tous des histoires de cuisiniers.

Le second d’un grand de la cuisine monte son affaire, mais pas exactement aux conditions que le grand aurait souhaitées. Ils finissent par s’en vouloir à mort tous les deux, le jeune parce que son ex-patron, son père spirituel n’a pas été suffisamment présent – il lui faisait tellement confiance qu’il a complètement délégué au point de l’oublier un peu – et le maître parce qu’il reproche au jeune d’avoir fait des choses sans lui et du coup de l’avoir trahi…
Ces relations filiales se dégradent et deviennent alors des rancoeurs inextinguibles. C’est en un sens une transmission manquée : celui qui a reçu est accusé d’avoir pris et l’autre de n’avoir pas su le retenir.

Transmettre alors est s’adresser à un successeur qui prendra le relais. En ce sens, transmettre, c’est accepter la mort et vouloir survivre simultanément ; se dire " j’aurai un successeur qui pourra faire fructifier ce que je lui ai donné ".
C’est pour cela donc que la transmission est toujours transmission personnalisée. On ne transmet pas à n’importe qui, et on transmet à quelqu’un que l’on a choisi pour successeur. C’est bien pourquoi le modèle même de la transmission est à l’image de la vie.
Comme mettre un enfant au monde, c’est d’une certaine manière accepter que nous ne sommes pas éternels.
En cuisine, transmettre n’est pas seulement enseigner ou instruire.
Enseigner, instruire passent par une méthode, par une technique, par une recette : on peut enseigner une recette mais ce que l’on transmet va bien au-delà de la recette.
Une méthode consiste à décomposer un geste. Un geste est décomposé en séquences successives et substituables.
Si je dis à quelqu’un tu découpes ton poulet ainsi, je décompose le geste en séquences, ces séquences sont substituables.

La preuve, c’est qu’à la rigueur je peux dire qui découpe les ailes, qui découpe les pattes etc. Tout ce qui est découpable est substituable et sera même substituable par une machine.
C’est ainsi que je peux séquencer tous les gestes et remplacer chaque séquence potentiellement par une machine jusqu’à ce qu’à la fin je fasse l’économie même de la présence d’un ouvrier.
Alors que ce qui se transmet et qui nous met évidemment du côté de l’artisanat ce n’est pas le geste décomposé, mais le geste total. C’est agir en conscience et non comme un robot.

Pour prendre le geste, il n’y qu’une seule manière : regarder et refaire.
C’est ce qui distingue l’enseignement de la recette et la transmission du tour de main. Et évidemment la transmission du tour de main est la relation maître/disciple et pas seulement la relation professeur/élève. C’est de l’acquis conscient.
La relation maître/disciple est une relation qui repose toute entière sur la valeur de l’exemple, de celui que je vais regarder – car on apprend en regardant, en observant.
Cette transmission passe aussi par le corps, puisqu’il est imitation du geste total. En ce sens enseigner n’est jamais complètement distinct d’éduquer.
Mais si enseigner peut s’adresser de manière impersonnelle, mécanisée, anonyme, à un grand nombre de gens, éduquer ne peut se faire qu’à un petit nombre et ne peut se faire que par l’apprentissage des corps, ou alors si vraiment je dressais les corps de trois cent mille personnes ce serait du dressage au sens propre du mot. Éduquer, transmettre, ce n’est pas apprendre par cœur mais apprendre avec le cœur.
D’où une autre différence fondamentale entre transmettre et instruire, c’est que transmettre suppose une identification forte.
On transmet non seulement un savoir mais aussi des valeurs.
Cela veut dire qu’autant que professionnelle la transmission est éthique et spirituelle. Ainsi la transmission est plus près de l’initiation.
Je pense qu’il faut bien préciser que toute transmission suppose au minimum un couple : celui qui transmet et celui qui reçoit.
En ce qui concerne celui qui reçoit, voici une petite histoire 
Au lever du jour, un maître et son disciple un très jeune moine se promènent ensemble dans la campagne.
Le moine demande au maître "  Maître comment puis-je m’engager sur la voie ? ".
Le maître lui montre alors le torrent dont le flot saute de pierre en pierre et lui dit " Entends-tu le bruit de ce torrent, là est la porte ".

Le moine regarde le torrent et ne répond pas. Le maître après un long silence lui dit "  Entends-tu le gazouillis de l’hirondelle ? ".
Le moine, bien qu’éblouit par le soleil désormais au zénith, suit longuement des yeux les hirondelles dans le ciel. Le maître est déjà loin, il est parvenu au sommet d’une colline escarpée et il est parmi les arbustes en fleurs.
L’ayant rattrapé péniblement et malgré son désir de poser la question, le jeune moine reste muet et il attend le moment. Il s’assied près du maître, attentif à son moindre geste, au moindre plissement de son front, au moindre changement de son regard qui pourrait être l’occasion de l’interroger.
Le soleil poursuit sa course et ses derniers rayons vont disparaître à l’horizon quand le maître se lève et le regard porté au loin demande " Sens-tu l’odeur du laurier ? ".
"Oui", dit timidement le moine étreint par l’émotion et surpris par sa propre réponse.
Après un long silence le maître toujours immobile dit : "Dans ce cas, je n’ai rien à t’apprendre."
Je dirais que la sensibilisation à l’environnement, à l’autre, et à soi même est un préalable à toute transmission, car ne peut voir que celui qui sait regarder, de même que ne peut entendre que celui qui sait écouter.
Il en est de même dans la transmission en cuisine qui est avant tout du vécu.
Exemple, il y a certains principes de cuisine que l’on ne peut expliquer ni par des mots, ni par des gestes.

L’un de ces principes est la manière de fixer, de stabiliser les odeurs, les arômes.
Lorsque je prépare un ragoût de truffes, il y a un moment, que l’on devine au parfum, où la saveur de la truffe est exaltée : c’est le moment précis où il faut intervenir et savoir ce qu’il faut faire : couvrir le récipient, ou ajouter un peu de bouillon, ou régler le feu.
S’il n’y a pas cette intervention, exactement au moment précis, tous les parfums s’envolent. Mais si l’intervention est juste, au bon moment, les parfums sont fixés.
C’est la " cuisine de l’invisibilité ", une cuisine vive, capable de fixer souverainement les odeurs et les arômes, le goût naturel
Je disais tout à l’heure que nous transmettions non seulement un savoir mais aussi des valeurs.

En transmettant son savoir, on transmet aussi des valeurs qui ne sont jamais que les nôtres et contemporaines d’une époque et d’une société.
Il s’agit, là, bien entendu des métiers de l’art, dont de la cuisine est, bien sûr.
Dans certains domaines qui touchent plus spécifiquement à la nature humaine, il existe une tradition qui véhicule des valeurs universelles comme l’aspiration au dépassement, la recherche du beau et du bien.
C’est à mon sens ce qui fait que transmettre une connaissance, au même titre que transmettre la vie, est un acte essentiel et grave.

Il est grave parce qu’il implique la responsabilité de celui qui transmet comme de celui qui reçoit. C’est le sens profond de toute transmission ; éclairer le futur à la lumière du passé, mais aussi donner corps à ce futur par l’apport de chacun des maillons successifs de cette longue chaîne que l’on appelle l’humanité.

La transmission est un don rendu à un autre. C’est ce qui me semble le point essentiel. Exemple : la transmission de la vie.
Mes enfants m’ont témoigné beaucoup de reconnaissance parce qu’ils m’ont fait grand-père, et ainsi ont démontré qu’ils avaient de la reconnaissance pour le fait que je leur ai donné la vie, en donnant à leur tour, la vie.
Un don n’est pas quelque chose que l’on rend mais quelque chose que l’on transmet.

Et on le transmet pour deux raisons :
- La première, est qu’on a conscience de l’avoir reçu, donc transmet celui qui a une dette, transmet celui qui est lui-même reconnaissant de cette dette.
- Et puis la deuxième raison pour laquelle la transmission est un don que l’on transmet à un autre, c’est qu’un don est quelque chose dont on n’est pas propriétaire.

Vous n’aimez pas que vos amis aillent revendre le cadeau que vous leur avez fait. Le don est le signe de la relation privilégiée et en ce sens, il est sacré.
En résumé, je dirais que transmettre est manifesté un acte de confiance dans l’homme et l’avenir. Ce n’est pas thésauriser mais c’est s’ouvrir au progrès et à l’innovation. Donc on ne transmet pas ce que l’on a reçu en héritage et dont on n’est pas propriétaire. On transmet ce que l’on a créé. En somme, on transmet ce que l’on est.

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L'Hôtellerie Restauration n° 2953 Hebdo 1er décembre 2005 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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