AU RESTAURANT
L'ANE ET LA MULE À CLAIREFONTAINE (78)
Un exemple ordinaire des
difficultés de recrutement
Pour Bénédicte Haon, pas
facile de trouver le collaborateur dont les ambitions
professionnelles et objectifs personnels coïncident avec les
fonctions de chef de partie dans son restaurant
gastronomique de 80 places (plus terrasse). À une autre
époque, l’opportunité de tirer enseignement de l’expérience
d’un chef de cuisine également chef d’entreprise, l’occasion
d’apprendre à concilier créativité, discipline et
contraintes fournisseurs, et la perspective de devenir
rapidement second, en auraient attirer plus d’un.
Aujourd’hui, le cas de Bénédicte Haon, qui a pour devise «la gourmandise c’est l’intelligence du ventre», est un
triste et banal exemple du fossé qui sépare les offres
d’emploi chez les indépendants et les exigences des
candidats.
Tiphaine Beausseron
Depuis que L’Âne et la Mule
a quitté le quai des Orfèvres (Paris Ier), pour s’installer à
Clairefontaine en Yvelines, (78), petite bourgade située
entre Rambouillet et Dourdan à 50 km au sud-ouest de Paris,
recruter du personnel est devenu une vraie galère. Certes,
Bénédicte Haon connaissait les difficultés de recrutement,
si connues dans le secteur. Mais voilà, le déménagement de
son fonds de commerce s’est fait si rapidement, que, prise
dans le tourbillon de la procédure de cession et de rachat,
elle n’avait pas pris le temps de penser au recrutement de
sa nouvelle équipe. Elle avait bien proposé à son équipe en
place de la suivre, «mais pour mon plongeur, cela
l’éloignait trop de son domicile, et mon chef de partie
n’était pas du tout attiré par ce ‘village’ très calme de
900 habitants et 2 commerces», explique Bénédicte.
Donc
depuis octobre 2006, date de son installation, dans ce
village connu pour être le siège de la fédération française
de Football, Bénédicte Haon, cherche désespérément un chef
de partie pour intégrer sa petite équipe (1 commis et 1
extra) et devenir à terme second. «Avec l’ANPE, j’ai vu
de tout, et beaucoup de gens non qualifiés. Avec les
annonces passées dans le journal local, les CV reçus ne
correspondaient pas au profil recherché. Idem avec une
agence locale d’intérim», confie la chef de cuisine.
Pourtant, il doit bien exister des candidats intéressés pour
travailler en étroite collaboration avec une chef de cuisine
gastronomique, avec à la clé des responsabilités de second,
pour un salaire entre 2 000 et 2 500 euros à 39 heures/semaine ?
Alors quelles sont les contraintes qui privent L’Ane et la
Mule de candidatures valables ? Bénédicte Haon l’explique de
plusieurs manières. D’une part, l’obligation d’être motorisé
en raison de l’absence de transports en commun. «Je propose
un logement sur place, mais il faut quand même que le
candidat puisse se déplacer en voiture pour son bien être
personnel», précise l’auvergnate. D’autre part, la
tranquillité des lieux, qui ne sied pas forcément aux jeunes
professionnels qui aiment souvent sortir et faire la fête
après le service. L’environnement conviendrait mieux à un
professionnel plus mature. Mais ils sont alors souvent
mariés et parfois parents. «Or, notre pic d’activité étant
le week-end, les 2 jours de repos consécutifs que nous
accordons sont en début de semaine, ce qui, de nos jours,
est problématique pour les familles.» Cela ajouté au fait
qu’à l’Ane et la Mule on travaille en coupure… et les
candidats potentiellement intéressants se réduisent à une
peau de chagrin. Bénédicte Haon est consciente que les
avantages accessoires au salaire souvent proposés par les
restaurants de chaînes servent parfois d’appât pour les
jeunes professionnels, plus exigeants qu’autrefois. «Par
contre, j’ai un atout contre lequel les chaînes ne peuvent
pas lutter, c’est la qualité de l’apprentissage technique
que je peux apporter : individualisé et transversal.» L’Ane
et La Mule s’astreint en effet à travailler des produits
frais de saison (gibier, lentilles, crustacées, boeuf
d’Aubrac…), le plus souvent issus de l’agriculture
biologique, avec un fournisseur par produit tel que Joël Thiébault pour les légumes, ou encore David Hervé pour les
huîtres d’été. «Je ne marie pas plus de 3 saveurs, et à
chaque fois, elles sont utilisée pour exalter la saveur
initiale du produit….». Plus encore, la cuisine de
Bénédicte Haon est engagée : «Dans mes plats, je tiens
absolument à retrouver l’authenticité des aliments de base.
Le souci de qualité et de traçabilité des matières est
l’illustration du respect que je porte à ma clientèle. Un
engagement envers l’être humain afin de ne pas lui faire
manger n’importe quoi», complète celle qui travaille en
collaboration avec l’associations Fruits oubliés* et
l’association Kokopelli**.
L'Ane et la Mule
1, rue de Rambouillet
78 120 CLAIREFONTAINE
Tél. : 01 34 84 53 59
restaurant-de-la-cite@orange.fr
lane-et-lamule.com
*l’association Fruits
oubliés : a pour objectifs de "conserver, sauvegarder et
promouvoir les espèces et variétés fruitières anciennes,
locales, traditionnelles ou en voie de disparition dans la
zone méditerranéenne"
http://pagesperso-orange.fr/association.fruits.oublies/
**Association Kokopelli :
défend la cause de la biodiversité et des Semences de Vie.
La très grande majorité des semences distribuées en Europe
par Kokopelli proviennent de leur propre réseau de
producteurs en France qui sont tous certifiés en Agriculture
Biologique. www.kokopelli.asso.fr/ |