ENTRE LES
CHAMPS-ÉLYSÉES ET LA MADELEINE
"Ne jamais recruter à
l’extérieur une compétence que nous avons déjà en interne"
À l’Hôtel Astor
Saint-Honoré à Paris VIIIe, c’est au poste de
réceptionniste que les difficultés de recrutement se
font cruellement sentir. Ceci malgré des actions
spécifiques destinées à motiver les collaborateurs.
Propos recueillis par Tiphaine Beausseron

Laurent Fava. |
Pouvez-vous nous présenter
l’hôtel ?
Avec 130 chambres réparties sur 7 étages au carrefour du
quartier des Champs-Élysées et de La Madeleine, notre hôtel
qui a fêté ses 100 ans en 2007, accueille une fidèle
clientèle d’affaires et touristique, française et
internationale. L’Hôtel comporte un restaurant
gastronomique, un bar et 5 salons de réunions pouvant
accueillir de 8 à 50 personnes.
Quel est votre effectif et
le volume moyen d’embauche ?
Nous employons environ 85 personnes réparties à raison de
60 % pour l’hébergement et de 40 % pour la restauration. Près
de 90 % sont embauchées en CDI à temps complet (39 heures).
Nous recrutons en moyenne 20 personnes par an pour faire
face au turn-over habituel.

La réception. |
Quels sont
les postes qui
souffrent le plus du turn-over et comment l’expliquez-vous ?
C’est au poste de réceptionniste que nous avons vraiment du
mal à trouver des personnes dont le profil correspond aux
exigences du métier. Cette fonction exige, outre une
excellente présentation et des prédispositions certaines
pour les contacts, la connaissance de plusieurs langues (au
minimum l’anglais), une certaine maîtrise de l’informatique
et une certaine facilité avec les chiffres. À cela s’ajoute
des qualités d’endurance car c’est également un métier
physique.
Toutes ces exigences doivent pouvoir se conjuguer à des
salaires d’entrée proches du Smic.
Nous souffrons aussi comme beaucoup d’autres du turn-over
pour les postes en salle et cuisine car même dans ces
métiers où la flexibilité est une tradition, les nouvelles
générations acceptent de moins en moins certaines
contraintes telles que les horaires de coupure ou le travail
le week-end.
Avez-vous mis en place des
outils pour motiver et fidéliser vos collaborateurs ?
Oui. Comme nous ne pouvons pratiquer des augmentations de
salaires systématiques, nous avons recours à d’autres moyens
qui permettent de valoriser et récompenser les
collaborateurs les plus impliqués. Nous avons par exemple
créé des 'Incentives' de ventes à la réception. Il s’agit
d’inciter le réceptionniste à proposer à nos clients des surclassements payants dont il percevra une partie du
produit de la vente qu’il ou elle aura réalisée. Ce système
permet aux réceptionnistes d’augmenter sensiblement leur
salaire de base.

Une chambre
prestige. |
Avez-vous d’autres outils
RH destinés à fidéliser l’ensemble du personnel ?
Oui, nous venons de relancer le programme de «l’employé du
mois», désigné par l’ensemble des chefs de service.
L’employé sélectionné se voit remettre un bon d’achat de 150
euros ainsi qu’un diplôme. À la fin de l’année, les chefs de
service désignent parmi les 12 employés du mois, l’employé
de l’année, qui, lui, bénéficie d’un chèque cadeau de 300
euros. Nous n’avons rien inventé mais ce système nous permet
de mettre en lumière les compétences et de créer une
émulation en valorisant nos employés les plus méritants.
Favorisez-vous l’évolution
interne ?
Bien sûr. Nous avons pour devise de ne jamais recruter à
l’extérieur une compétence que nous avons déjà en interne.
D’une part, c’est un gain de temps incontestable,
d’autre
part, elle est facteur de motivation et d’implication du
personnel. Cependant, force est de constater qu’il y a un
décalage entre les attentes des employés et le rythme des
évolutions que nous sommes en mesure de proposer.
Aujourd’hui, il n’est pas rare que des employés souhaitent
grimper dans la hiérarchie au bout de 6 mois de présence.
Ils n’ont pas conscience que, dans notre métier et au sein
d’une structure comme la nôtre, l’évolution interne prend
nécessairement plus de temps. C’est l’une des spécificités
des nouvelles générations pour lesquelles tout doit aller
très vite. Bien qu’elle n’ait pas de bases techniques
solides.

Une des chambres de
l'hôtel Astor. |
Pensez-vous que les chaînes
d’hôtels avec leur image de grand groupe, rendent les
recrutements plus difficiles dans des hôtels indépendants
comme le vôtre ?
Incontestablement, les chaînes attirent les candidats grâce
à des avantages tels que par exemple, une mutuelle, un 13e
mois, un système de participation ou d’intéressement… Ce
sont des avantages que nous n’offrons pas et qui s’ajoutent
aux doléances des candidats ‘nouvelle génération’ qui dès
l’entretien de recrutement n’hésitent pas à aborder les
questions de la durée du travail, des journées de repos et
des éventuels avantages liés au poste recherché.
Certains disent que le
profil des directeurs d’hôtels a évolué ces dernières années : alors qu’il y a encore 5 ans, les directeurs d’hôtels
étaient pratiquement tous issus de parcours très hôteliers
(école hôtelière + échelon gravis un à un dans
l’hôtellerie), il semblerait que de plus en plus de
directeurs d’hôtels soient issus de formation commerciales ?
Qu’en pensez-vous ?
Je ne suis pas un bon exemple, puisque je suis moi-même issu
du sérail purement hôtelier. Après une brève formation
hôtelière en 1986, j’ai commencé comme night-audit, puis ai
gravi les échelons jusqu’à mon premier poste de directeur
d’hôtel. Cependant, il est indéniable qu’aujourd’hui,
l’environnement commercial n’a jamais été aussi
concurrentiel et agressif dans notre profession. Il est donc
particulièrement important de savoir insuffler un fort
esprit commercial à ses équipes avec tout ce que cela
comporte d’opportunisme, d’anticipation et de réactivité…
d’où l’importance grandissante des compétences commerciales
aux postes de directeurs d’hôtels.
Comment résumeriez-vous
votre hôtel en 3 mots ?
Exception, Charme parisien et Personnalité. |