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Riccardo Danesi et Christian Peyre, Auberge du Roua à Argelès-sur-Mer (66)

L' étoile à quatre mains

C'est l'histoire d'un restaurant qui perd son chef pêcheur d'étoile et qui le remplace par un autre récompensé ailleurs de la même façon cette année. Original, inédit sans doute, et finalement moral pour les clients et le Guide Rouge.

m Jean Bernard

A l'écart d'Argelès-sur-Mer, au bout d'un chemin qui se perd au pied des Albères et d'un petit jeu de piste, la belle demeure a retrouvé vie il y a cinq ans. Cet ensemble de bâtiments du XVIIe siècle, fait de galets et de cayrous, ces fines briques rouges si typiques du Roussillon, était en effet fermé depuis plusieurs mois lorsque Riccardo Danesi a jeté son dévolu dessus.
Milanais installé en France, il se revendique, avec son accent charmeur, plus comme un scientifique du tourisme que comme un hôtelier-restaurateur. Mais c'est en professionnel qu'il a vite cerné les problèmes. "J'ai d'abord demandé le déclassement des 10 chambres pour les ramener de 4 à 3 étoiles et j'ai divisé les prix par deux. J'ai fait du restaurant une brasserie améliorée, et pour assurer un fonds de roulement financier, j'ai donné la priorité à l'hôtel." Il signe ainsi des accords avec quatre tour-opérateurs et son taux d'occupation passe de 25 à 75 % en l'espace de quelques mois. "En sachant qu'ici nous sommes également complets du 15 mai à fin septembre", ajoute-t-il.

Passation de pouvoirs en cuisine
"Une fois que nous avons assuré un bon niveau d'activité dans l'hôtel que nous avons agrandi avec quatre nouvelles chambres, nous avons investi dans le restaurant." Christian Vigier, un jeune chef qui a côtoyé Michel Del Burgo à Carcassonne, arrive en 1998 et donne un ton nouveau à la cuisine. L'Auberge du Roua, entreprise familiale où Riccardo Danesi a mobilisé sa mère et Marie-Hélène son épouse, commence à attiser la curiosité et à attirer les gourmets. Une ébauche de réussite qui n'empêche pas la séparation fin 2000. Christian Vigier s'en va. Trop tôt, malheureusement, pour savourer pleinement la récompense qui salue la qualité du travail réalisé dans cette maison.
"Cette étoile a surpris tout le monde, avoue sans fausse modestie le propriétaire. Quand on l'obtient alors que ce n'est pas ce que l'on recherchait, c'est encore plus beau !"
Mais avant de savoir comment il serait noté dans le Guide Rouge, Riccardo Danesi devait trouver un nouveau chef de cuisine. Et comme la maison a atteint une certaine réputation, il vise haut et imagine que Christian Peyre, ancien chef de La Balette à Collioure, parti quelques mois plus tôt dans le val de Loire, a peut-être le mal du pays. Les contacts aboutissent rapidement, et mi-février, l'Auberge du Roua peut préparer la saison l'esprit serein.
D'autant plus serein que Christian Peyre est déjà connu des inspecteurs du guide. Ils lui ont attribué en 1995 une première étoile qu'il a conservée jusqu'à son départ de La Balette, mais il fait également partie de la nouvelle promotion puisque cette année 2000, vécue loin du soleil catalan, il l'a passée au Domaine de Beauvois à Luynes. La continuité est au minimum assurée.

Confirmer pour conserver
Ce cuisinier, qui porte fièrement sur sa veste de travail un rameau d'olivier brodé, a fait ses premiers pas à l'école hôtelière d'Avignon avant de passer trois ans chez Hiély-Lucullus. Il connaît ensuite L'Escale à Carry-le-Rouet et surtout La Côte Saint-Jacques à Joigny. "A chaque fois, j'ai pris ce qu'il y avait de plus positif et je me suis plus impliqué qu'un salarié de base. En fait, par conviction, j'ai toujours travaillé comme si c'était pour moi." Une philosophie qu'il veut conserver dans ce Roussillon d'adoption. "Je suis aujourd'hui dans une maison qui a une âme mais aussi d'énormes possibilités. Le premier travail est cependant de confirmer l'étoile, mais surtout de continuer à donner du plaisir à une clientèle qui ne va pas forcément changer. Elle va simplement se laisser guider plus facilement et venir chez nous avec encore plus de confiance." n

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L'HÔTELLERIE n° 2716 Magazine 3 Mai 2001