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Le Clos des Cyprès à Graveson

La tradition au service de l'ambition...

Après avoir fait leurs armes dans plusieurs bonnes maisons, en France et à l'étranger, Stéphane et Valérie Bettinelli ont réalisé leur rêve : à trente ans à peine, ils ont construit, à la frontière du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône, un petit mas provençal où se niche "leur" restaurant. Le classicisme et le bon goût discret du cadre, élaboré par Valérie, et de la cuisine, concoctée par Stéphane, ont été payants. Loin des "extravagances", ils ont déjà séduit une clientèle plus nombreuse qu'ils n'espéraient.

Par Lisa Casagrande

Ils ont trente ans tous les deux. Lui, rêvait depuis son apprentissage d'officier d'être un jour dans les cuisines d'un restaurant bien à lui, en Provence, au pays de son enfance. Elle, avait beaucoup voyagé pour apprendre d'abord l'anglais puis l'allemand tout en exerçant son métier de réceptionniste dans des Relais & Châteaux de France, d'Angleterre et d'Autriche. Et puis, un jour, ils se sont rencontrés chez Pic, à Valence, se sont mariés, ont économisé sou à sou et ont ouvert, au printemps dernier, le Clos des Cyprès à Graveson, dans le Pays d'Arles. "Qui ne tente rien, n'a rien", commentent ces jeunes propriétaires, Stéphane et Valérie Bettinelli.

Grâce à leur épargne, à l'aide de leurs familles et à un emprunt sur quinze ans, le jeune couple a pu investir de l'ordre de deux millions de francs pour construire, sur un terrain d'un hectare acheté six ans auparavant par Stéphane, un petit mas provençal ocre-rose, au bout d'une allée entourée de jeunes cyprès.

Pas d'enseigne pour que le client se sente "comme à la maison"

La propriété est close par un mur bas que perce un vaste portail vert amande et sur lequel le nom du restaurant est inscrit en grosses lettres, de manière à être lisible par les nombreux automobilistes qui fréquentent le CD 25 en retrait duquel s'abrite le Clos des Cyprès.

Le couple a délibérément choisi cet emplacement, d'abord parcequ'il est tout près de Rognonas, le village de Stéphane, ensuite parce que dans les environs, n'est installé aucun établissement de qualité, et enfin, parce que c'est un lieu de fort passage, le CD 25 reliant Avignon à Arles et Tarascon. "Nous avions fait une petite étude de marché, évoque Valérie, et nous avons appris que 8.000 voitures par jour passaient devant le terrain que nous avions repéré."

Le couple vit à l'étage et a installé son restaurant, qui peut accueillir 50 couverts maximum en banquet et 25 à 30 en temps normal, au rez-de-chaussée. Il est ouvert sept jours sur sept et fonctionne midi et soir. Dans l'entrée, est installée la réception où le client pénètre en poussant une grosse porte en bois que ne surmonte aucune enseigne.

"Nous avons tous les deux travaillé dans de bonnes maisons. Nous avons donc voulu faire un restaurant de qualité, classique mais chaleureux, où le client se sente chez lui, qui soit comme sa maison", commente Valérie, en évoquant cette absence d'enseigne.

Meubles Louis XV, tentures murales d'un jaune chaud, tringles de rideaux en fer forgé, nappes blanches et porcelaine de même couleur, discrètement ornée d'un filet vert olive, couverts en argenterie, petite poterie d'Anduze accueillant fleurs en été et plante verte en hiver, posée sur chaque table..., la salle à manger, bordée sur un côté par de grandes baies vitrées ouvrant sur le jardin où, à la belle saison, un auvent de tuiles abrite 35 couverts supplémentaires, allie tradition, style provençal, simplicité et bon goût discret. Des peintures, réalisées par une artiste de la région qu'apprécie Valérie, sont exposées.

Beaucoup de poissons, de mer et de rivière, cuits sous toutes ses formes...

Le cadre est en harmonie avec la cuisine qu'aime préparer Stéphane dans son laboratoire flambant neuf de 100 mètres carrés, prévu en fonction du développement espéré de la maison et entièrement équipé aux nouvelles normes européennes.

"Je ne fais pas de choses extravagantes. J'aime travailler les plats très classiques qui correspondent à mon parcours professionnel , en les mariant avec des légumes -petits artichauts, céleri, endives...- et en variant les sauces, qu'elles soient à la crème, au vin rouge, ou qu'il s'agisse seulement d'un petit jus accompagné d'une salade tiède. J'utilise les herbes de manière traditionnelle mais rarement les épices. J'adore travailler le poisson de toutes variétés, de mer (filet de dorade aux morilles, cassolette de langoustines, sabayon gratiné de noix de Saint-Jacques, fricassée de Saint-Pierre...) et de rivière lorsque cela est possible (brochet, sandre, truite), et sous toutes ses formes : rôti, poêlé, poché, grillé, etc. Ce sont des plats très prisés par les clients car ils n'ont pas l'habitude d'en préparer à la maison...", commente le jeune homme

Une cuisine sans risque qui n'exclut pas pour autant quelques touches inventives : les pigeonneaux sont désossés, farcis aux champignons de Paris et aux girolles, cuits en cocotte et servis avec une escalope poêlé de foie gras ; les poissons sont également farcis mais avec des juliennes de légumes et des truffes ou servis dans des papillotes croustillantes faites de feuilles de brick très légères. Stéphane est particulièrement fier de son foie gras frais de canard, servi sur une assiette à la fois en terrine mi cuite et en escalope poêlée, et de son turbotin poêlé avec duxelle de truffes, compotée de choux et fumet réduit au vin rouge puis monté très légèrement au beurre. A l'automne, il propose un peu de gibier, tel le dos de lièvre à l'ancienne avec un croustillant de châtaignes à l'armagnac, ou du perdreau.

Quant aux desserts, la spécialité maison est un fondant chaud au chocolat mi amer, une sorte de mousse cuite à l'extérieur mais fondue à l'intérieur.

Le bouche à oreille a fonctionné et les résultats sont meilleurs que prévu...

Stéphane et Valérie Bettinelli proposent deux formules : un menu-carte, qui change tous les mois, pour le soir et les week-ends avec un choix de trois entrées, trois poissons, trois viandes, quatre desserts et un assortiment de fromages (190 F et 270F, selon que l'on prenne un ou deux plats principaux) et un petit menu à 155F à midi, vin et café compris, pour une entrée, un plat et un dessert au choix. La viande est achetée chez un boucher de Tarascon, le poisson arrive de Marseille, les légumes de saison sont achetés sur le marché local. Quant aux vins, ils sont fournis par un petit caviste de Maillanne, un village voisin, et sont exclusivement des vins de propriétaire venant des six grandes régions vinicoles de France, même si le choix de vins locaux est plus vaste (Baux-de-Provence, Coteaux d'Aix, Châteauneuf du pape, etc.). La fourchette de prix va de 75 F la bouteille à 600 F.

Moins d'un an après son installation, le jeune couple, qui travaille avec deux apprentis, un en cuisine et un en salle, se dit heureux : les résultats sont meilleurs que prévu, bien que, faute de moyens, il n'ait pas eu recours à la publicité, hormis dans deux petits journaux locaux gratuits. Mais le bouche à oreille a marché et, qui plus est, le Clos des Cyprès est déjà sur deux guides dont le Gault et Millau, avec une note de treize.

"Le jour d'ouverture, se souvient Valérie, nous n'avons eu que quatre couverts. C'était l'angoisse... Mais dès le mois de mai, nous avons été submergés : tout le monde voulait venir voir ! Puis nous nous sommes faits une clientèle d'habitués : des gens des villes alentours, dans un rayon d'une trentaine de kilomètres, comme Tarascon, Saint-Rémy de Provence, Avignon, Arles... A midi, nous travaillons beaucoup avec les entreprises qui invitent leurs clients. Le soir, en hiver, c'est calme, mais le week-end, nous avons beaucoup de familles. Nous faisons aussi pas mal de banquets, pour les communions, les mariages, les repas de famille, ce qui représente environ 50% de notre chiffre d'affaires. Au total, en moyenne hivernale, nous servons environ quinze couverts par jour. Cela nous suffit pour tourner..."

Stéphane et Valérie Bettinelli ont par ailleurs eu la bonne idée d'adjoindre à leur salle de restaurant, une petite salle de séminaire pouvant accueillir de 30 à 35 personnes. "C'est un plus certain, constate Stéphane, je m'en étais rendu compte chez mes anciens employeurs.. Cela attire beaucoup de laboratoires médicaux qui tiennent leur réunion avant de manger. Mais si on avait su on aurait fait cette salle un peu plus grande. Nous la remplirions..." Mais c'est là bien le seul regret des jeunes époux.


Le soir, une petite lumière douce, au bout de l'allée , accueille les clients. Mais pour qu'ils se sentent "comme chez eux" la porte n'est pas surmontée d'une enseigne...

 
Valérie et Stéphane Bettinelli : "Les banquets représentent 50% de notre chiffre d'affaires."


L'HÔTELLERIE n° 2555 Magazine 2 Avril 1998

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