du 3 juillet 2003 |
DERNIÈRE MINUTE |
Ils étaient plus de 5 000 buralistes à défiler, lundi dernier, dans les rues de Strasbourg, à l'appel de la Confédération des débitants de tabac de France. Inquiets pour l'avenir du secteur, les buralistes réclament notamment l'harmonisation européenne des taxes sur le tabac.
À l'origine de la
manifestation, la fédération d'Alsace-Lorraine, confrontée à des chutes d'activité
régulières. Une baisse "alarmante" selon les responsables qui pointent
du doigt le développement de la contrebande sur le territoire français et des ventes
transfrontalières, conséquences directes de la hausse du prix du tabac. De nombreux
départements se sont ralliés à leur cause sous le slogan "Nous sommes tous des
frontaliers". Nicole et Roland Goulley, propriétaires du Café de la Place, dans
l'Essonne, ont fermé leur établissement pour participer à cette marche. "La
profession va mal. On nous a retiré les vignettes, les timbres fiscaux vont sans doute
être abandonnés. Et les hausses du prix du tabac créent un climat d'insécurité. Nous
sommes conscients qu'une politique de santé publique doit être menée, mais il faut que
le gouvernement nous aide à assurer notre survie. Nous sommes, il faut le rappeler, un
service public." Vers 14 heures, à deux pas de la cathédrale, sous un soleil
estival, quelque 5 000 personnes attendaient le signal de départ. Haute-Vienne, Indre,
Puy-de-Dôme, Bouches-du-Rhône, Var, Hautes-Alpes, Allier, Cantal, Paris, Oise...
Regroupés par département, ou par région, comme le Pays Basque ou la Bretagne, les
buralistes étaient décidés à faire entendre leur différence. "On n'est pas
dealers", "Nous sommes tous des commerces de proximité",
"Fiers d'être buralistes", criaient-ils. Sur les pancartes, d'autres
messages mettaient à jour un profond sentiment de frustration. "Pardon de bien
faire notre métier", "Pardon pour le service rendu", "Pardon
d'être le premier commerce de proximité", pouvait-on lire. "Nous sommes
sans doute beaucoup plus à l'écoute de la population que n'importe quel politicien, lance
amèrement un buraliste du Nord. Si l'Etat avait un peu de jugeote, il ferait un peu
plus attention au rôle social que nous tenons. Quand un bar-tabac ferme, c'est la mort
d'un village ou la déchéance d'un quartier."
Reçu le matin par Yves Bur, député du Bas-Rhin, et par Gérard Cherpion, député
des Vosges et rapporteur du projet de loi sur l'interdiction de vente de tabac aux moins
de 16 ans, le tout nouveau président de la Confédération, René Le Pape, estime avoir
été "entendu". "Monsieur Cherpion accepte que les termes de la
loi soient revus", a-t-il déclaré. Les premières moutures prévoyaient des
sanctions de plusieurs milliers d'euros et des peines de prison avec sursis à l'encontre
des buralistes contrevenants. Interrogé sur les pertes et les manques à gagner
enregistrés par le secteur, René Le Pape se retourne vers le gouvernement. "Que
veut-on faire de nous ? Il nous faut des réponses", objecte-t-il. Au programme
des futurs débats : le montant de la commission et de nouveaux services au sein des
établissements, comme des points poste.
Les buralistes alsaciens ont vu leur chiffre d'affaires chuter de 5 % en 2002
Le cas alsacien
La France compte actuellement 34 000 buralistes dont 771 en Alsace. Pour la
Confédération, les mesures prises ces dernières années ont créé une véritable "déstabilisation
économique" du réseau. "La diminution de fréquentation se répercute
sur l'ensemble des activités d'un buraliste frontalier. Car si le poste tabac enregistre
la plus forte chute (- 10 % en valeur pour l'année 2002 - alors qu'en moyenne
nationale, la vente du tabac a connu une hausse de 4,7 % en valeur et - 19 % pour le seul
mois de janvier 2003), c'est l'ensemble des activités annexes qui est touché, par
ricochet." Parmi les exemples donnés, les achats d'impulsion (type confiserie)
sont "en nette diminution". Jusqu'à - 39 % dans certains débits. Les
jeux sont en régression également, autour de 3,27 %. "Globalement, les
buralistes alsaciens ont vu leur chiffre d'affaires chuter de 5 % en 2002." En
2003, les premières estimations indiquent une baisse moyenne de 12 % sur la seule partie
tabac. "Ainsi, une dizaine de buralistes ont déjà dû fermer leurs portes cette
année pour raisons économiques", s'insurgent les représentants du réseau.
Gérard Bohelay, président de la section parisienne, était présent à Strasbourg.
Celui-ci, comme ses troupes, revient sur le rôle du réseau lors du passage à l'euro. "Compte
tenu des plages horaires que nous effectuons, compte tenu de la proximité que nous
entretenons, nous avons été un pilier essentiel dans le passage à l'euro. Nous avons
prouvé notre utilité. Notre service au citoyen. Il est urgent, pour éviter ce qui se
passe en Alsace et dans les autres régions frontalières, de travailler à une
harmonisation des taxes à l'échelle européenne." La manifestation s'est
conclue devant le Parlement européen. Reste maintenant aux pouvoirs publics de prendre
acte. La profession bat rarement le pavé. Et même si l'ambiance était bon enfant à
Strasbourg, malaise il y a.
S. Soubeszzz16 zzz32
René Le Pape, président de la Confédération des débitants de tabac de
France.
En dehors de l'Alsace... è Le grand Sud-ouest compte 6 150 débits (soit un peu plus de 17 % du nombre total de la profession). Les ventes transfrontalières se ressentent dans un rayon de 50 à 100 km. Le phénomène de contrebande s'est accru depuis le début de l'année. Petits et grands trafics sont au rendez-vous. Des étudiants bordelais se feraient pas mal d'argent de poche auprès de leurs compagnons d'université. Des cartouches rapportées frauduleusement d'Espagne peuvent rapporter gros... è Dans les Pyrénées-Atlantiques, des baisses de volume de 60 % ont été constatées dans des établissements situés dans des villes frontalières. è En Haute-Garonne, près de 83 % des buralistes ont connu une évolution de leur rémunération sur la vente du tabac inférieure à celle du marché national. è Les tabacs des Pyrénées-Orientales, sur la route de l'Espagne, affichent une baisse des ventes de 20 % depuis le début de l'année. |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2828 Hebdo 3 Juillet 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE