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Banquiers moins frileux mais plus tatillons

Si depuis 1997 la reprise de l'activité hôtelière s'accélère, la relance des investissements dans le secteur n'est pas encore arrivée au même stade. Il faut dire que les banquiers, qui gardent les stigmates de la crise passée, restent prudents et réclament désormais davantage de garanties aux opérateurs hôteliers.

Un jeune hôtelier-restaurateur, désireux de créer son affaire et en proie aux refus des banquiers de l'aider à la financer, s'insurge : "Messieurs les banquiers, vous êtes mauvais. Les gens ne sont pas que des suites de chiffres. Cette vieille phrase du discours populaire qui dit 'on ne prête qu'aux riches', que je pensais sans fondement en l'an 2000, quand l'économie va mieux et quand les banques vous attirent avec leur slogan de fille du quartier, demeure malheureusement toujours d'actualité. L'ensemble des banques françaises est encore très méfiant à notre égard." Ce témoignage illustre bien l'attitude actuelle du milieu bancaire face à la reprise hôtelière. Les banquiers restent échaudés par leurs échecs passés dans l'hôtellerie.

Moins de demandes de financements
Paradoxalement, alors que le marché hôtelier n'a jamais été aussi prospère depuis longtemps, l'investissement sur le secteur demeure relativement limité, principalement dans le cadre des créations. "Contrairement à ce qu'on aurait pu penser, la reprise de l'activité hôtelière et la baisse des taux d'intérêt ne se sont pas accompagnées, comme dans la majorité des autres secteurs, d'une augmentation significative des flux de prêts bancaires", remarque un expert financier. "Malgré tout, cette frilosité n'est pas uniquement le fait des banquiers. Les professionnels du secteur, qui ont survécu à la crise, ont également évolué et réfléchissent maintenant à deux fois avant d'engager de nouvelles dépenses lourdes", conclut-il. La mise en place des CDEC, tout d'abord, a naturellement réduit le nombre de projets de création d'hôtels. Il est plus commode de reprendre un bâtiment existant que de construire du neuf, surtout en centre-ville. De plus, la crise a permis d'assainir quelque peu le marché hôtelier. La plupart des non-professionnels écartés, le secteur se compose désormais d'opérateurs beaucoup plus réalistes et raisonnables face aux investissements.

De plus en plus de dossiers de transmission
"Si le nombre de dossiers de création s'est quelque peu réduit depuis la sortie de la crise, on note en revanche un accroissement sensible des dossiers de financement de transmission qui s'accompagnent le plus souvent de programmes de rénovation", observe Richard Livet, de la BDPME. Ce constat s'explique par deux raisons principales. La première est liée à la typologie même des exploitants. Une grosse partie des petits et moyens établissements hôteliers en France est dirigée par des personnes de la génération baby-boom. Approchant l'âge de la retraite, et parce qu'ils ne trouvent pas de repreneur au sein de leur propre famille, bon nombre d'entre eux se retrouvent contraints de vendre leur exploitation. Parallèlement, le marché de l'immobilier repart, ce qui facilite enfin les ventes des établissements hôteliers. Mais le retour de la demande vers une hôtellerie de centre-ville facilite aussi ces transactions. "Désormais, les hôtels trouvent plus facilement des acheteurs. Bien que les prix aient retrouvé leur niveau d'avant la crise, tout se vend. Aucune région ni aucune catégorie ne sont réellement sinistrées", constate Yves l'Alouette, chargé d'affaires au groupe CCF. Pour exemple, dernièrement le fonds de commerce d'un hôtel 3 étoiles de 100 chambres, en région Rhône-Alpes, s'est vendu 11 millions de francs, alors qu'il y a 4 ans, il n'avait trouvé aucun acquéreur à 6 millions de francs.
Si le type de dossiers que reçoivent les banques s'est quelque peu modifié depuis la reprise économique, il en va de même pour les banquiers qui n'abordent plus le secteur de l'hôtellerie de la même façon.

Des banquiers plus pointilleux
Aujourd'hui, ils exigent davantage de garanties de la part des investisseurs. Il faut dire que dans l'euphorie des années 80, certaines banques avaient accordé beaucoup de dossiers de financement à des non-professionnels du secteur, ou à des clients disposant de très peu d'apports en fonds propres. On a couramment vu des contrats de prêt se signer avec seulement 10 à 15 % d'apports. De nombreuses sociétés financières se sont ainsi cassé les dents car les projets soutenus n'étaient pas très bien gérés, ou n'avaient tout simplement aucun avenir, faute de marché. Pour s'investir, le banquier veut être davantage rassuré aujourd'hui. Dorénavant, un opérateur ne peut plus espérer obtenir de prêt s'il n'apporte pas au moins 35 à 40 % de fonds personnels. Par ailleurs, il est jugé sur son professionnalisme. S'il n'a pas de solides références dans le secteur, l'opérateur doit être porté par une chaîne ou un groupe hôtelier qui a déjà fait ses preuves. En outre, il devra le plus souvent présenter une étude de marché et de faisabilité, aux conclusions favorables, pour son projet. Enfin, il devra se porter caution de ses dettes. Ce n'est que sous ces conditions que les banquiers, aujourd'hui, acceptent de se lancer dans un projet hôtelier et, encore, avec un oui prononcé du bout des lèvres. Malgré tout, il faut bien se rendre à l'évidence, le secteur de l'hôtellerie - et du tourisme d'une manière générale- ne sera jamais vraiment un marché très prisé du milieu bancaire. Celui-ci le juge trop incertain. "Sans doute parce qu'ils n'ont pas encore compris comment fonctionnent le tourisme et l'hôtellerie", ironise un hôtelier strasbourgeois. Il n'en demeure pas moins que les professionnels ont aujourd'hui l'impression qu'une majorité paie pour les écarts ou les abus de la minorité d'entrepreneurs qui ont roulé les banquiers dans la farine. A charge maintenant pour les professionnels de trouver des financements ailleurs que chez leur banquier.
G. M.


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L'HÔTELLERIEn° 2691 L'Hôtellerie Économie 09 Novembre 2000


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