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Jeunes professionnels

Quand l'envie d'entreprendre les tient...

Ils sont nombreux, anonymes et passionnés à se donner chaque jour à leur métier. Après quelques années passées auprès d'autres professionnels pour apprendre leur métier, l'envie de s'installer les tenaille, ils sautent le pas et prennent tous les risques pour faire le métier qui les passionne. Ils sont plein d'idées... Le Bocal à Rennes

Une installation prometteuse

Planté discrètement dans une petite rue rennaise, le restaurant Le Bocal ne paye pas de mine. Rien de tape à l'œil, pas d'ambitions démesurées non plus. Le logo n'affiche-t-il pas "Le Bocal, P'tyt resto" ? Mais, en ouvrant justement ce bocal, on découvre un parcours original et plein d'enseignements. Parce qu'il nous parle de l'installation d'un jeune couple, qui de surcroît, n'a aucun lien à l'origine avec la profession. "En fait, nos parents sont fonctionnaires de l'Education nationale", lancent Claire Millet et Michel Le Cam, les deux propriétaires. Originaires pour l'un de Rennes et pour l'autre de Mayenne, ils se croisent pour la première fois à Dinard, au sein de l'école hôtelière, avec chacun un bac général en poche, économique pour Michel et littéraire pour Claire. "En effet pour Claire comme pour moi, notre objectif était de monter un restaurant. C'est une idée que nous avions en tête depuis longtemps déjà", explique Michel Le Cam. Ils intègrent donc l'école hôtelière de Dinard forts d'un projet d'entreprise bien spécifique. "Nous avons fait une année de remise à niveau et ensuite deux années pour décrocher un BTS." Ce premier vrai contact avec la profession, ou en tout cas l'antichambre de la profession, ne laisse pas un souvenir impérissable dans l'esprit des deux jeunes restaurateurs. "Pour la pratique, nous avons bien appris, précise Michel qui ajoute sans détour, mais en ce qui concerne la théorie je dois dire que nous sommes restés sur notre faim, compte tenu de nos attentes bien précises. C'était léger du point de vue gestion, création d'entreprise. Après un bac général, le niveau est même lamentable !" Et Michel de revenir sur ses confrères de promotion qui "en dehors des fils de professionnels qui reprennent généralement un établissement, le pourcentage de personnes optant pour la création d'entreprise reste infime". Le cuisinier de 28 ans intégrera même à l'issue de cette formation un stage "création d'entreprise" à la CCI de Saint-Malo. "Là c'était du pratique, on vous donne de bonnes bases et un enseignement pertinent."

Une cuisine retour de marché
Au sortir de cette école hôtelière, Claire et Michel affinent toutefois leur projet. Michel sera en cuisine et Claire en salle. Ils peaufinent également leur formation par des saisons sur la côte d'Emeraude. "Claire travaillant en salle, ses contrats se limitaient à la saison alors que moi en cuisine, je pouvais prolonger au delà." Les années passent sans leur apporter réellement une opportunité d'installation. Claire démarre même une année d'université en psychologie. Et en 1999, un local attire leur attention. Sur Rennes, "puisqu'en fait nous en avions un peu marre de Dinard et de la côte. Nous voulions un établissement assez intime, de caractère et soigné afin d'y délivrer une cuisine familiale, retour de marché sans prétention." La rôtisserie d'Argentré, du nom de la rue, se libère. "L'établissement correspondait vraiment à ce que nous cherchions du point de vue volume." Cet ancien restaurant dispose par ailleurs de tout l'équipement nécessaire et aux normes. L'affaire se conclut pour 350 000 F. "Nous avons connu un parcours assez difficile avec les banques. Nous avions un apport de 200 000 F. A chaque fois on nous demandait la caution des parents et nous ne souhaitions pas la demander." Une banque dont le siège se situe à proximité du restaurant connaît néanmoins l'affaire et donne son aval en une semaine. Avec les frais, les jeunes entrepreneurs déboursent moins de 500 000 F. Le rêve se réalise enfin après un peu plus d'un mois de travaux.
Le Bocal prend forme avec sa décoration très personnalisée, à l'ambiance bords de mer. Beaucoup de bois comme ce vieux vaisselier, une multitude de bocaux bien entendu, des bouées accrochées au mur, une vieille carte de France... mais également des cadres et des lampes, couleurs vives et style naïf, conçus par Claire et Michel. "Nous sommes assez bricoleurs. Entre la période où nous avons terminé l'école et la reprise du Bocal, nous avons réalisé beaucoup de cadres et de lampes que nous exposons d'ailleurs à Saint-Malo dans une galerie." L'investissement déco devient de fait peu onéreux. La cuisine donne sur la salle de 29 couverts. Le cadre posé, il restait à accueillir et à se composer une clientèle. Ce qui n'a pas été de tout repos, "puisque nous avons dû faire le ménage vis-à-vis de l'ancienne clientèle. Nous n'avons fait aucun compromis avec ces gens du soir qui viennent au restaurant sans réelle envie mais juste pour éponger une soirée trop arrosée. Dans ce cas il n'existe pas de démarche spécifique pour se rendre au restaurant".

Clientèle féminine
Aujourd'hui par contre, il faut vraiment se mobiliser pour manger au Bocal. Midi comme soir, la réservation est de rigueur. "Le bouche à oreille a magnifiquement fonctionné." La clientèle est à l'image du quartier. "Une moyenne d'âge de 35/50 ans, des gens assez branchés culture mais sans m'as-tu-vu", et dotée d'un pouvoir d'achat conséquent. Le midi, Le Bocal attire étrangement une clientèle très féminine et habituée. "On ne sait pas d'où cela vient, mais c'est vrai que certains midis, nous n'avons que des femmes à manger. Elles réservent et viennent entre amies", selon Michel. Le cadre explique sans nul doute cet intérêt féminin, mais la cuisine également, réalisée à partir de produits frais et maigres. A l'image de ce Gratin de haddock à la crème d'aneth, le Gâteau de mérou à la tomate, la Seiche marinée et grillée au beurre de citron... Michel décline sa cuisine en diverses formules, avec un plat du jour systématique, des entrées, des plats, et entre les deux, des "petits plats" comme ce muffin au poulet et au cheddar. Le midi, le plat du jour, le dessert et le café se dégustent pour 59 F ou le soir, un plat et une entrée ou un dessert pour 85 F, ou un petit plat avec une entrée ou un dessert pour 65 F, "la moyenne au couvert est de 75 F le midi et de 110 F le soir". Très raisonnable. Et Michel se félicite de cette clientèle qui colle parfaitement à sa cuisine. "Ici à Rennes, la clientèle est curieuse. On peut essayer des plats qui ne marcheraient pas ailleurs. Je pense notamment à un Gâteau de carottes râpées au chocolat qui n'a pas marché à Dinard contrairement à ici. Les gens ont confiance et se laissent facilement guider par les propositions de Claire en salle."
Aujourd'hui, les deux jeunes propriétaires se félicitent du démarrage de leur affaire. "Nos prévisions étaient en deçà de ce qui se passe." Un fait d'autant plus réjouissant que l'effet de curiosité est désormais tombé et, en si peu de temps, le restaurant a réussi à fidéliser une clientèle. "C'est aussi un quartier en devenir, qui s'anime de plus en plus." Restaurants traditionnels, à thème, cafés, café-théâtre... se côtoient "sans pour autant se faire de la concurrence. Nous sommes tous un peu différent, explique Michel. J'ai ressenti une bonne ambiance entre nous." Pour autant tout n'est pas gagné loin de là et Claire reconnaît "qu'il va falloir que l'on se renouvelle dans les formules, les plats etc. pour satisfaire nos clients". Mais quoi qu'il en soit, pas question de multiplier les services. "On ne renouvellera pas pour faire plus de couverts. Nous conservons notre ambiance. Sans stresser les clients. Ils doivent se faire plaisir."
O. Marie

 
Le Bocal prend forme avec sa décoration très personnalisée,
à l'ambiance bords de mer. Beaucoup de bois, une multitude de bocaux bien entendu, des bouées accrochées au mur, une vieille carte de France...


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L'HÔTELLERIE n° 2676 Hebdo 27 Juillet 2000


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