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Claude Taffarello à Saint-Félix-Lauragais

Le chef s'investit dans l'auberge où il a fait son apprentissage

Originaire du Lauragais, Claude Taffarello a fait son apprentissage à l'Auberge du Poids Public, un restaurant voisin de la maison où il a grandi. Après dix-huit ans passés dans des restaurants réputés, il a finalement racheté l'établissement où il a débuté sa carrière

Claude Taffarello n'éprouve aucune honte à dire qu'il est issu d'un milieu rural et qu'il se complaît, dans son Auberge du Poids Public à Saint-Félix-Lauragais, à retranscrire une authenticité locale. "Je suis né dans une famille nombreuse du Lauragais, une région rurale, et nous étions 10 ou 12 à table tous les jours. J'ai toujours vu ma grand-mère passer ses journées à cuisiner au coin de la cheminée pour toute la famille. Je l'appelais d'ailleurs la grand-mère du feu." Conscient que les études longues n'étaient pas faites pour lui, il décide de passer outre le désaccord parental en interrompant sa scolarité pour embrasser une carrière de restaurateur. "Mes parents ne m'ont pas appuyé dans ma décision. J'étais trop jeune à 13 ans pour quitter l'école. Mon père m'a envoyé à Luchon pour y faire des saisons. Il croyait que j'allais capituler. Mais j'ai réussi, je me suis accroché pendant des mois sans un seul jour de congé." Aujourd'hui, à 43 ans, il reconnaît que cette immersion tout jeune a été une bonne expérience mais il émet tout de même quelques réserves. "C'est sûr, je ne suis pas pour l'apprentissage à 14 ans, car il faut que les jeunes aient un bagage scolaire minimum. Mais il est vrai aussi qu'en arrivant de plus en plus tard en apprentissage, ces jeunes ne se révéleront qu'à partir de 30 ans. C'est trop tard", commente Claude Taffarello qui s'interroge sur le renouvellement du potentiel des jeunes chefs.

Roger Vergé, son idole
Claude Taffarello débute donc son apprentissage à l'Auberge du Poids Public en octobre 1971. Son CAP, qu'il décroche en juin 1973 en candidat libre, l'incite à s'engager dans un tour d'Europe avec la ferme intention de travailler un jour aux côtés d'un grand chef. "Depuis mes premiers pas en cuisine, je vouais une véritable passion au travail de Roger Vergé. Il était mon idole et je voulais à tout prix travailler avec lui." Mais plutôt que de se rapprocher, Claude Taffarello part pour l'Europe du Nord. Il voyage ainsi de 1976 à 1978, au Grand-Duché du Luxembourg, en Allemagne et aux Pays-Bas "où il veut faire connaître la cuisine française" mais abandonne très vite cette idée considérant qu'il ne progresse pas. Il décide alors de revenir en France sur la côte méditerranéenne. De février à octobre 1979, il s'exerce d'abord en tant que chef de partie au restaurant Le Petit Nice à Marseille avec Jean-Paul Passedat. Son bonheur ne se fait pas attendre. En décembre de la même année, Claude Taffarello réussit à convaincre Roger Vergé de l'embaucher comme commis de cuisine au Moulin de Mougins. "Je faisais enfin mes premiers pas dans un très grand restaurant 3 étoiles Michelin." C'est là qu'il rencontrera aussi Denise Ehmer qu'il épousera. Elle l'accompagne aujourd'hui dans la gestion de l'Auberge du Poids Public.
Homme de défi, Claude Taffarello sent rapidement l'envie de monter sa propre affaire sur la Côte d'Azur. Il quitte le Moulin de Mougins en 1981, sillonne la région jusqu'en 1989 au Café de la Poste à Biot, au Mas Candille à Mougins, à l'hôtel Juana à Juan-les-Pins et au Baou à Ramatuelle.

Le retour aux sources
Les prix démesurés de la Côte d'Azur et ses origines lauragaises qui ne le lâchent pas le pousseront à revenir sur sa terre natale. D'autant qu'à 53 ans, Bernard Ougé, le propriétaire de l'Auberge du Poids Public, veut passer la main. Les deux hommes parviennent à s'entendre et en 1990 Claude Taffarello, après dix-huit ans d'exil, rachète pour 1,50 MF le fonds de l'Auberge du Poids Public qui dispose d'un restaurant et d'un hôtel de 13 chambres. Il ouvre en l'état. "Le décor était un peu rustique. Nous avons décidé de redécorer entièrement le restaurant. Pour l'hôtel, il aurait fallu tout raser et reconstruire. Mais nous voulions garder des prix sages. Alors nous avons rénové au fur et à mesure. Nous n'avons jamais passé une année sans travaux. Au printemps prochain, c'est la terrasse que nous allons refaire, car elle offre une vue imprenable sur toute la vallée du Lauragais."
Sa cuisine séduit rapidement la clientèle locale, déjà fidèle, et attire une clientèle de passage de plus en plus nombreuse grâce au développement du tourisme dans la région. "Notre chance, c'est que nous avons toujours été en progression. Et l'obtention d'une étoile au Michelin en 1995 a permis une certaine régularité dans la fréquentation", analyse Denise Ehmer. L'activité hôtelière est également très complémentaire surtout pour la clientèle étrangère qui découvre une cuisine régionale comme le Milla salé avec du foie gras chaud et sucré au beurre d'orange, dont le chef a fait sa spécialité. La cuisine actuelle, mélange de saveurs méditerranéennes et de légumes séduit davantage la clientèle de proximité. Un menu "tout légume" est même proposé à la carte.

Poids Public en chiffres

En 1998, l'Auberge du Poids Public a réalisé un CA de 6 MF hors taxe. Le ticket moyen est compris entre 270 et 300 francs par personne et une cinquantaine de couverts sont servis en moyenne chaque jour, jusqu'à 80 en été. L'hôtel enregistre un taux d'occupation de 60 % et accueille la clientèle pour de courts séjours. En majorité française, elle est aussi composée d'Anglais (20 %), de Belges et de Suisses (5 %). Le prix des chambres oscille de 275 francs pour une double à 550 francs pour une petite suite, climatisée. En 1998, Claude Taffarello a racheté pour 2,50 MF un second établissement près de Saint-Gaudens dans le Comminges. L'Hôtellerie des Cèdres propose, dans un superbe manoir du XVIe siècle entouré d'un parc de cèdres centenaires, une carte qui ressemble à celle de l'Auberge du Poids Public. Outre une clientèle de tourisme pour des séjours plus longs, la clientèle d'affaires est bien représentée grâce à l'aménagement de salles de séminaires. Pour sa première année d'activité, le manoir enregistre une progression de 21 % de son CA.


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L'HÔTELLERIE n° 2658 Hebdo 23 mars 2000

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