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Bruxelles en croissance

La fin de l'indépendance

En proie à la globalisation, le marché bruxellois voit les marques européennes et mondiales s'attaquer aux derniers îlots d'indépendance hôtelière.

Le siècle se termine bien pour l'hôtellerie bruxelloise. Les 14 000 chambres de la région Bruxelles capitale et du proche Brabant ont terminé 1999 légèrement au-delà de 70 % de taux d'occupation, à un prix moyen de 570 à 600 F (les chiffres définitifs ne sont pas encore connus). Le TO était déjà bon en 1998, mais le prix moyen a légèrement augmenté, alors que le parc a continué de s'accroître très progressivement. Pour Jean-Claude Robinet, du cabinet de consultants et de gestion hôtelière Business Hospitality Management (BHM), "la conjoncture actuelle devrait durer au moins jusqu'en 2003, et si le parc ne grandit pas de plus de mille chambres par an, le cycle positif pourrait se poursuivre jusqu'à 2008". Ce pronostic suppose une croissance de la demande de l'ordre de 4 à 6 % par an. Il s'appuie sur les perspectives d'extension de l'Union européenne et sur l'implantation quasi continue de sièges sociaux européens d'entreprises. L'aéroport de Bruxelles est devenu l'un des plus importants du continent. Il a enregistré 19,58 millions de passagers en 1999 pour une hausse de 10 %. Les investissements s'y poursuivent et les 20 millions de passagers ne seront qu'une étape.

Importance des institutions politiques de la clientèle d'affaires
Tout cela explique une activité du voyage sans commune mesure avec la taille de l'agglomération, guère supérieure au million d'habitants.
Le marché hôtelier bruxellois est avant tout animé par les affaires et les institutions politiques. On y compte 120 à 130 jours de travail intense, 150 jours de fins de semaines, de vacances d'été et de mois plus ou moins creux, et entre les deux, une plage de quelque 80 à 100 jours qui mobilisent l'attention du marketing et des yield's managers. Pendant cette période, on rivalise de calculs pour passer de 80 à 100 % de taux d'occupation, et surtout pour capter la clientèle individuelle qui permet de maintenir les coûts. La concurrence est acharnée sur ce marché sans vrai palace, mais où dominent à 80 % les hôtels d'affaires de 3 à 5 étoiles avec un prix moyen pour les meilleurs de l'ordre de 1 000 à 1 300 francs (pour des prix affichés à 2 000 francs et plus), ne permettant pas de pousser le service au niveau requis dans un véritable hôtel grand luxe.
La ville travaille dur à faire de Bruxelles une destination touristique et à réduire le creux des fins de semaines et des mois d'été. Elle s'est offert un "city marketer", André Vrydagh, qui a entrepris la difficile croisade de forger une image internationale à Bruxelles. Une image qui ne soit pas uniquement celle de la capitale européenne, mais aussi celle d'une ville d'art, singulièrement d'art surréaliste, d'une ville de la musique, d'une ville d'art de vivre et de sortir, petite sœur sans complexe de Paris pour les spectacles comme pour la gastronomie. Une ville où l'on sait accueillir l'étranger, souvent dans sa langue. Mais malgré le relatif succès de trois rétrospectives des peintres Delvaux, Magritte (pour lequel les Français ont répondu présents) et Ensor, le chemin reste long.
Mais un aéroport majeur et le statut de capitale européenne suffisent à obliger les grandes marques hôtelières à poser leur drapeau à Bruxelles. En voisin, Accor a pris la tête avec 14 hôtels Ibis, Novotel, Mercure et Sofitel pour près de 2 000 chambres. La tête, mais non un pouvoir dominant. Le groupe français est néanmoins le seul à déployer aussi largement une stratégie multimarque, dans une ville où il manque des deux étoiles, notamment dans le centre.

Des marques internationales, et un syndrome ethnique
Derrière, la concurrence s'organise, avec une accélération très nette ces deux dernières années. Bass est présent en cinq adresses avec les marques Crowne Plaza (un hôtel), Holiday Inn et Holiday Inn Express (deux hôtels par marque). Golden Tulip en deux ans a pris quatre emplacements sous ses deux marques, auxquelles s'ajoute un Summit Hotel. L'Allemand Dorint a pris place en 1998, comme Swisshotel. Le Suédois Scandic, après le rachat du Finlandais Arctia, s'installe en deux emplacements, l'un en 1999 et l'autre en 2001. L'Espagnol Sol Melia s'est implanté cette année. Parmi les grands des quatre et cinq étoiles, on remarque particulièrement l'absence de Marriott et Hyatt. Mais Starwood est présent depuis longtemps avec deux Sheraton, dont un de plus de 500 chambres, en concurrence frontale avec le Hilton International de même capacité. Le haut de gamme est notamment tenu par un Conrad, un Méridien, le Royal Windsor, le Radisson SAS, autant d'unités de plus de 200 chambres. RF Hotels de sir Rocco Forte vient de s'offrir l'historique Amigo qui devra être rénové. Les marques ne cessent donc de progresser, avec un aspect propre à la capitale européenne : un côté ethnique qui fait que chaque chaîne leader dans son pays, Espagne, Suède, Allemagne, Norvège (avec le Bristol Stéphanie), Italie (avec les Jolly) ou Suisse, veut offrir son cachet propre à ses ressortissants de passage à Bruxelles.

Aucun groupe ne domine le marché
Mais nul ne peut prétendre dominer ce marché bouillonnant. Les investisseurs professionnels ont conquis les murs, les marques envahissent l'exploitation. Restent des exceptions. Un notaire avisé, M. Delcroix, a créé un groupe hôtelier régional, le groupe Belhotel, du deux étoiles bureau du centre-ville au resort quatre étoiles voué aux séminaires et aux eaux, au cœur d'une forêt du Brabant wallon, à 20 kilomètres du centre. Le Plaza reste l'un des tout derniers grands établissements de luxe, l'une des dernières propriétés familiales à résister à l'assaut des marques et des institutionnels. Ce cinq étoiles entièrement rénové, pour ne pas dire reconstruit sur l'inspiration du George V, a rouvert grâce à la volonté de son propriétaire, le baron Van Gijsel. A force de métier, de volonté et de précision dans l'ingéniosité, ces établissements trouvent et développent leurs clientèles. Cela dit, verra-t-on encore beaucoup de ces tours de force personnels : "De 5 à 10 % du taux d'occupation il y a encore cinq ans, le poids de la marque et de la centrale de réservations progresse à 15 % voire davantage chez les grands noms internationaux les plus efficaces. Si on compare ce ratio aux résultats des mêmes marques aux Etats-Unis, la marge de progression reste toutefois considérable. Ces champions sont aussi les plus rapides dans le décollage de l'Internet, même si un indépendant comme le Plaza a créé un site remarquable. L'avenir du business et du politique semble assuré. Mais ces gestionnaires d'obédience internationale sauront-ils vendre Bruxelles en même temps que leurs hôtels à l'étranger selon l'image voulue par son city marketer ?" André Vrydagh lui-même veut faire du nouveau maître-mot de la ville, "Bruxelles ma découverte", non pas un slogan, mais une marque qui monte en puissance. On sait qu'allier les marques n'est pas chose aisée. Nul ne lâchera prise pour tenir le haut de l'affiche.
A. Simoneau


L'Ibis Grand Place affiche 700 francs, et ne vend guère moins cher que ses voisins mieux classés.


Dans le secteur Rogier, à un quart d'heure à pied au nord de la Grand Place, le Sheraton et le Crowne Plaza sont voisins.


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L'HÔTELLERIE n° 2651 Hebdo 3 Février 2000

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