Contre une intervention excessive de l'Etat
C'est l'inquiétude
provoquée par le texte de la seconde loi sur les 35 heures qui a mis le feu aux poudres
et résolu le Medef mais aussi la CGPME à mettre sur pied cette opération de
mobilisation générale de grande envergure. Ce texte dont la discussion à l'Assemblée a
commencé mardi dernier est encore à l'état de projet mais il suscite de nombreuses
inquiétudes quant à sa mise en uvre dans un contexte de concurrence
internationale. Car l'enjeu clairement affiché par le patronat c'est la lutte contre un
alourdissement des charges salariales fatales à un bon positionnement concurrentiel des
entreprises françaises par rapport à leurs rivales directes et notamment européennes.
Les participants venus en masse ne s'y sont pas trompés et c'est à plusieurs reprises
que l'évocation des noms de Lionel Jospin et de Martine Aubry ont déclenché une
déferlante de huées et de sifflements railleurs voire franchement hostiles. C'est dans
ce climat et avec vigueur que Lucien Rebuffel, président général de la CGPME, a
rappelé de quelle manière cette loi était accueillie par M. Schroeder qui a déclaré :
"La loi sur les 35 heures en France, c'est la meilleure nouvelle que nous ayons
entendue en Allemagne depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale." Il a
également tenu à rappeler l'inadéquation de la loi avec la réalité économique de
notre pays dont le tissu industriel est constitué d'une grande quantité de petites et
moyennes entreprises. "C'est l'embauche forcée non liée à l'activité réelle
de l'entreprise sur laquelle compte la loi." Bien au contraire, pour Lucien
Rebuffel, "le chef d'entreprise y répugnera. Il n'augmentera pas sa masse
salariale car il s'agit du budget le plus lourd dans son exploitation".
Quelques minutes plus tard, c'est le patron du Medef, Ernest-Antoine Sellière, qui s'est
exprimé s'adressant directement à la ministre Martine Aubry : "Votre loi, tout
le monde le sait est une erreur. Votre loi est ringarde." Alors que l'assistance
scandait "dans la rue, dans la rue", il a conclu en rappelant que la
liberté d'entreprendre, et à travers elle celle des chefs d'entreprise, était porteuse "de
la modernité et de la réussite de la France".
Au-delà du projet de loi sur la réduction du temps de travail, c'est bel et bien contre
une intervention systématique et autoritaire de l'Etat dans la marche des entreprises que
les patrons manifestaient lundi dernier. Une mobilisation d'autant plus exceptionnelle
qu'elle réunissait au moins 25 000 patrons, plus souvent d'ailleurs de petites
entreprises, qui ont peu l'habitude de se mobiliser pour faire entendre leur voix. Ils
dénonçaient un alourdissement des charges et une modification des règles définies par
la 1re loi, règles à partir desquelles des accords ont déjà été signés alors qu'ils
pourraient être remis en cause si le Parlement décidait de durcir le dispositif de la
loi. Quelle place resterait-il dans ces conditions pour une négociation pourtant prônée
par Martine Aubry ?
25 000 personnes environ, en majorité des patrons de petites et moyennes
entreprises.
L'HÔTELLERIE n° 2634 Hebdo 7 Octobre 1999