Pyrénées-Orientales
C'est un cuisinier de 37 ans, Yves Scorsonelli, autodidacte et homme du Sud, qui s'installe aux fourneaux des Feuillants, la table la plus cotée des Pyrénées-Orientales. Installé à Céret, au pied du Canigou, l'établissement a conquis au printemps 1997 une deuxième étoile dans le guide Michelin. Mais il a perdu depuis, à la suite de dissensions, ses quatre principaux cadres dont le chef de cuisine, Didier Banyols. En juillet dernier, le propriétaire des Feuillants, John Blume, a confié la direction de l'établissement à Georges-Marie Gerini, 50 ans, ancien directeur de salle au Louis XV, à Monte-Carlo. C'est lui qui vient de recruter Yves Scorsonelli. Crâne lisse, il vif, carrure de rugbyman, le nouveau chef des Feuillants n'est pas issu du sérail. Né à Marseille, il a débuté son parcours comme boulanger, à l'âge de dix ans. A trente ans, après deux saisons effectuées dans une pizzeria - « cela restait proche du pétrin et de la farine » -, il reprend un petit restaurant à Hyères, dans le Var. La connaissance de la cuisine ? « J'ai ouvert des bouquins, et j'ai appris. » Sa formation académique se limite à un stage de cinq jours chez Haeberlin, en Alsace. Trois ans plus tard, les guides nationaux intronisent le jeune chef de la Crêche Provençale. Ils saluent la précision de sa cuisine et le soin apporté dans le choix des produits. Informé par la rumeur, Georges-Marie Gerini, à la recherche d'un chef, fait étape à Hyères. Il est séduit par le charisme d'Yves Scorsonelli. « J'ai apprécié la passion qu'il a pour son métier, et son envie de la faire partager. » A sa table, il découvre « une cuisine pleine de saveurs et de goûts, une cuisine qui interpelle ».
Le Sud au menu
Les deux hommes vont aujourd'hui tenter d'écrire une nouvelle page de l'histoire des
Feuillants. L'orientation est choisie : c'est le Sud. La nouvelle équipe souhaite
promouvoir une cuisine très inspirée de la Méditerranée et affichant clairement son
identité catalane. Yves Scorsonelli compte pour cela tisser des liens étroits avec des
producteurs régionaux. « Nous pensons qu'il vaut mieux essayer de recommencer quelque
chose plutôt que de continuer sur un même élan », estime Georges-Marie Gerini. Le
nouveau directeur, pas plus que le nouveau chef, ne sous-estime l'ampleur du défi. Il
faudra trois ans pour en mesurer toutes les possibilités. D'ici là, les deux hommes ne
désespèrent pas de conserver ou de reconquérir l'une au moins des deux étoiles
acquises avec Didier Banyols. Même si Yves Scorsonelli refuse d'en faire une priorité.
« Notre premier objectif, dit-il, c'est de contenter les clients, et de leur
donner envie de revenir. J'aimerais que ce restaurant ait du caractère, qu'il laisse un
souvenir. »
L. Lelong
L'HÔTELLERIE n° 2597 Hebdo 21 Janvier 1999