Ecoles hôtelières
Par Nadine Lemoine
Formation :
BEP hôtellerie/CAP cuisine et formation complémentaire pâtissier, glacier, chocolatier
obtenus au Lycée Jean Capelle de Bergerac (1). Aujourd'hui : cuisinier de collectivité à la maison de retraite de Cadouin. |
Que pensez-vous de l'enseignement que vous avez reçu ?
L'enseignement était trop scolaire. On est formé à un diplôme mais pas à être
professionnel. Il manque peut-être des stages. Sur le plan de la pratique et sur le plan
psychologique, les jeunes ne sont pas préparés à affronter les réalités du marché du
travail. Vous savez, un tiers de ma promotion a quitté le secteur. Mais ce n'est pas la
faute des professeurs, c'est le système. *
Avez-vous connu des difficultés pour trouver votre premier
emploi ?
Les professeurs nous ont conseillés de faire des saisons pour acquérir de
l'expérience. A part L'Hôtellerie et le bouche à oreille, je ne vois pas de
solution pour trouver un emploi.
Le marché de l'emploi aujourd'hui ?
On est né avec l'idée qu'il serait difficile de trouver du travail. Mais je pense
qu'on peut en trouver facilement si l'on est mobile.
Pourquoi avez-vous quitté la restauration traditionnelle ?
J'ai travaillé pendant plusieurs années dans un restaurant en Allemagne et je
voulais redescendre dans le Périgord tout en ayant des horaires plus réguliers et moins
contraignants. Alors, j'ai passé un concours administratif suite à une annonce de
recrutement pour un poste de cuisinier en milieu hospitalier. Il est certain qu'un
cuisinier dans un restaurant est plus créatif, mais je ne regrette rien.
(1) Jean-Christophe Roume est également président de l'Association des anciens élèves des Lycées Jean Capelle à Bergerac et Près de Cordy à Sarlat. Contact : 05 53 08 39 63.
Formation :
CAP cuisine obtenu au CFA de Rennes. Aujourd'hui : sommelier au restaurant La Poularde à Montrond-les-Bains. |
Que pensez-vous de l'enseignement que vous avez reçu ?
A l'époque, vous savez, c'était très bien. J'ai un souvenir fabuleux de l'enseignement
que j'ai reçu. Je suis sorti comme commis cuisinier à l'Auberge Saint-Sauveur à Rennes.
Avez-vous connu des difficultés pour trouver votre premier
emploi ?
Non, j'ai mis quinze jours en répondant aux annonces de L'Hôtellerie.
Que pensez-vous du marché de l'emploi aujourd'hui ?
Il y a du travail, mais ce n'est aussi facile qu'avant. Il faut être passionné et
travailleur. Ce n'est pas un chemin facile.
Avez-vous déjà songé à abandonner la restauration ?
Non, jamais. Il est vrai que c'est un métier ingrat où l'on n'est pas toujours
payé à sa juste valeur, où l'on a des horaires difficiles. Mais il faut dire aux jeunes
qui sont passionnés par ce métier qu'ils ne doivent pas s'arrêter à la première
impression. On devrait leur inculquer une notion de "résistance". Vous savez,
ceux qui veulent faire ce métier, ils l'ont dans le cur. Il y a une part de rêve
et de passion dans la restauration. Il faut persévérer car c'est un grand métier.
Formation :
Bac Pro hôtellerie obtenu au Lycée Jean Quarré à Paris. Aujourd'hui : gardien de la paix. |
Que pensez-vous de l'enseignement que vous avez reçu ?
J'ai passé quatre années formidables à Jean Quarré. Nous avions de très bonnes
relations avec les professeurs. J'ai eu une formation très complète qui nous donne les
bases nécessaires, mais c'est sur le terrain que l'on apprend la réalité du métier.
Avez-vous connu des difficultés pour trouver votre premier
emploi ?
Après mon BEP, je suis entré comme commis au Crillon. Mais la salle ou la
cuisine, je me suis vite rendu compte que je voulais en sortir. Je voulais m'orienter vers
la gestion, alors j'ai démissionné pour reprendre mes études. Après le Bac Pro, j'ai
fait l'armée, et je suis rentré chez Eurest. On m'a proposé un poste de chef de rang en
Angleterre. J'ai décidé d'accepter pour devenir parfaitement bilingue et avoir encore
plus de chance de progresser. Et là, après deux mois et demi en Angleterre, il y a eu un
déclic.
Pourquoi avez-vous quitté la restauration ?
Je ne regrette pas du tout cette formation. Mais ce métier n'était pas pour moi.
Je trouve que la restauration est un métier trop routinier, trop répétitif. Les
horaires ne sont vraiment pas faciles surtout lorsque l'on songe à avoir une vie de
famille. A 18 ans, on ne se rend pas compte des contraintes, mais au bout de 5/6 ans...
Alors autant changer de voie quand on est jeune. Parmi mes collègues policiers, nous
sommes trois à avoir une formation en restauration. Je suis toujours en contact avec mon
ancien lycée et on m'a dit que sur ma promotion, cinq ans après, la moitié avait
quitté le secteur.
Formation :
CAP cuisine obtenu au CFA de Montferrand. Aujourd'hui : responsable commercial RHF chez Culifrance. |
Que pensez-vous de l'enseignement que vous avez reçu ?
Grâce à l'alternance, j'ai eu une formation très complète. D'un côté la
réalité de la vie d'un restaurant avec ses contraintes trois semaines par mois (deux
semaines en restauration classique et une semaine en brasserie) et une semaine par mois à
l'école pour aborder la technique théorique, les notions d'hygiène... Je ne regrette
pas l'apprentissage à 16 ans. Le monde des adultes, c'est dur, on se fait broyer, mais
cette formation sur le terrain est essentielle.
Il me semble que les professeurs devraient avoir une expérience du terrain et qu'ils
devraient faire des stages dans les établissements qui utilisent les nouvelles techniques
(sous vide, régénération) pour ne pas être en décalage avec le marché. C'est
l'avenir ! Les 35 heures, ce sont de nouvelles contraintes de temps qui vont encore
accélérer le développement de ces techniques. Il faut évoluer avec son temps.
Avez-vous connu des difficultés pour trouver votre premier
emploi ?
Pas du tout. J'avais remporté le concours des apprentis du département et je suis
rentré chez Clavé en 1983.
Le marché de l'emploi aujourd'hui ?
Tous les jours, les chefs me disent qu'ils cherchent des gens compétents. C'est la
formation qui ne correspond pas aux besoins. Les jeunes ne tiennent pas le coup. Ils
estiment qu'ils doivent vite passer à des postes à responsabilités, être chef en
quelques mois, mais il faut d'abord transpirer derrière les fourneaux.
Pourquoi avez-vous quitté la restauration ?
En 1989, j'étais chez Jean Bardet à Tours, j'étais chef de partie poissons.
J'avais envie de fonder une famille, d'avoir du temps à lui consacrer. A ce moment-là,
on entendait parler du sous vide et j'ai pensé qu'il y avait des choses à faire dans la
mise au point. J'ai démarché toutes les entreprises, j'ai été embauché chez
Culifrance (ex-Nouvelle Carte) et j'ai dû passer par tous les ateliers pour maîtriser le
procédé avant de devenir conseiller culinaire, puis responsable commercial RHF. J'aime
toujours autant la cuisine et j'ai la chance d'être en contact avec beaucoup de grands
chefs.
Formation :
BTS de gestion hôtelière obtenu à l'Ecole hôtelière de Paris. Aujourd'hui : directeur général adjoint (marketing et hébergement) de l'hôtel Hyatt Regency Istanbul. |
Que pensez-vous de l'enseignement que vous avez reçu ?
Il donne une bonne base de culture générale et professionnelle avec un emploi du
temps déjà très chargé qui rend compte des réalités de l'hôtellerie. L'EHP
préparait à être un bon hôtelier, un bon cuisinier, un bon serveur... de bons
techniciens. Je suis content de ma formation.
Avez-vous connu des difficultés pour trouver votre premier
emploi ?
Non, après un stage de 4 mois au Hilton Orly, j'ai été embauché au Holiday Inn porte
de Versailles comme attaché de direction. Je suis expatrié depuis huit ans.
Que pensez-vous du marché de l'emploi aujourd'hui ?
A ma connaissance, aucun de mes collègues n'est aujourd'hui au chômage. Il est
certain qu'il faut être plus mobile et plus fort qu'auparavant. En Asie, par exemple, on
était habitué à gérer dans l'opulence avec de nombreux expatriés. C'est fini ! Dans
toutes les chaînes, on resserre les coûts de la masse salariale en embauchant beaucoup
moins d'expatriés. Il ne faut pas avoir peur de se retrousser les manches. Ici, en
Turquie, le débat, ce n'est pas les 35 heures. 35 heures pour moi, ce serait un mi-temps.
Ceci dit, c'est un job très enrichissant intellectuellement et humai-
nement qui m'a permis de faire le tour du monde. C'est un secteur où il y a de l'avenir.
L'industrie du loisir est en pleine croissance. La crise, c'est pour ceux qui ont envie
d'être en crise. Il faut s'adapter.
Avez-vous déjà songé à quitter l'hôtellerie ?
Ça m'a effleuré mais jamais au point d'entreprendre des démarches sérieuses.
Formation :
BTS de gestion hôtelière à l'Institut Vatel de Lyon. Aujourd'hui : attachée commerciale salons dans une société d'édition. |
Que pensez-vous de l'enseignement que vous avez reçu ?
Nous avons reçu une très bonne formation au niveau des techniques. Mais on nous a
fait croire qu'on aurait des postes de direction. Il ne faut pas mentir aux jeunes. La
réalité, c'est qu'il faut se battre.
Avez-vous connu des difficultés pour trouver votre premier
emploi ?
Aucun. J'ai travaillé au Ramada Bruxelles comme assistante maître d'hôtel, puis
au Hilton Bruxelles, mais aussi à l'hôtel L'Igloo à Megève. J'ai travaillé aussi bien
dans les chaînes que chez les indépendants. Je n'ai pas eu de problème pour trouver du
travail.
Que pensez-vous du marché de l'emploi aujourd'hui ?
Il n'y a pas de pénurie de postes. C'est le personnel compétent qui manque,
peut-être parce que l'hôtellerie en France ne paye pas assez. Le problème, ce sont les
salaires de misère. On exploite les jeunes dès le CAP/BEP, mais il faut dire que les
charges sont trop lourdes. Il faut trouver une solution.
Pourquoi avez-vous quitté le secteur ?
Pour moi, l'hôtellerie, ce n'est pas fini. Cela fait un an que j'ai quitté le
métier mais je vais y revenir. Quitter le secteur, c'est une démarche volontaire pour
voir autre chose, apprendre encore plus sur le plan commercial et pour préparer le futur.
Mon but, c'est d'ouvrir mon hôtel-restaurant à l'étranger.
Formation :
CAP cuisine et BEP cuisine et collectivités obtenus au Lycée hôtelier du Touquet. Aujourd'hui : restaurateur, propriétaire depuis le 2 avril 1998 du restaurant La Table d'Yves à Cagnes-sur-Mer. |
Que pensez-vous de l'enseignement que vous avez reçu ?
Moi, j'étais bien préparé. Les profs, qui avaient tous travaillé en brigade,
nous avaient bien formés. Par contre, chez les jeunes, je trouve qu'ils ne sont pas
prêts psychologiquement. On les bichonne un peu trop. Ils ont des idées fausses sur le
métier. Ils pensent décrocher un poste à responsabilités dès la sortie de l'école,
mais le chemin de la vie active est différent. Les professeurs devraient les prévenir.
Autre exemple, il y a beaucoup de filles aujourd'hui dans les formations de cuisine, or,
il y a peu de places qui leur sont proposées dans les brigades. On devrait peut-être
songer à les orienter vers les métiers de l'accueil et de la réception. Il n'y aura de
la place que pour les plus fortes.
Avez-vous connu des difficultés pour trouver votre premier
emploi ?
Non, j'étais major de promo donc j'avais le choix. Je suis rentré chez Lucas
Carton et j'y suis resté 4 ans.
Que pensez-vous du marché de l'emploi aujourd'hui ?
Il y a beaucoup de travail, mais les gens doivent s'adapter aux besoins. Il faut
accepter de partir. En sortant de l'école, ils veulent des horaires limités, un salaire
motivant et surtout travailler au coin de la rue. 1998 a été une bonne année sur la
Côte d'Azur. Il y a du travail. Or, j'ai plein de collègues qui n'ont pas trouvé de
personnel cet été. Pour l'avenir, je suis optimiste. Les gens qui font de la qualité
travaillent toujours.
Avez-vous déjà songé à quitter la restauration ?
Non, parce que j'ai mené ma carrière comme je l'ai souhaité. Je suis toujours
arrivé à faire ce que je voulais. C'est vrai qu'il faut aussi avoir la chance de
rencontrer des professionnels qui vous font confiance et qui vous aident.
L'HÔTELLERIE n° 2587 Supplément Emploi 12 Novembre 1998