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Editorial

Délire

Pour la Coupe du Monde de Football, la capitale l'affiche : "Bienvenue à Paris" et pour que le message soit encore mieux perçu par les Parisiens que l'on veut motiver autour de l'événement, la mairie de Paris s'est offert une campagne d'affichage d'envergure, photos à l'appui. Une manière édifiante de comprendre comment la mairie de Paris imagine l'accueil : une concierge comme on n'en fait plus depuis longtemps a laissé son balai pour poser en collier de fleurs, des concierges comme ça d'ailleurs, on n'en a jamais vues, même à Paris... ; le chauffeur de taxi est devenu polyglotte et a appris 32 langues en deux mois, surdoués les taxis parisiens cachaient bien leur jeu jusqu'à la Coupe du Monde !

Mais le plus étonnant concerne l'idéal de l'accueil dans les cafés, hôtels et restaurants, jugez un peu : la terrasse du "Père Tranquille" est vide et, comme sortie d'un songe d'une nuit d'été, une top modèle déambule, en tenue de soirée, un plateau à la main, pour servir, gantée tout haut, une carafe d'eau à un visiteur fantôme, on se demande bien qui a osé l'embaucher celle-là !... Côte limonade, il ne faudra pas espérer faire trop de chiffre avec elle, elle se prendrait vite les pieds dans sa robe longue ! Quant à l'hôtel que l'on a choisi pour représenter le nec plus ultra de l'accueil à Paris, c'est un gentil deux étoiles qui affiche un store tout neuf "Hôtel Restaurant" et un panneau précisant : prix modérés (qui a dit que les tarifs des hôtels parisiens flambaient ?), chauffage central (à cette époque-là, on aurait préféré l'air conditionné), eau courante chaude et froide, salle de bain (au singulier) et téléphone ! Autant dire : tout le luxe dont peut rêver un touriste ! Un bout de tapis rouge descend les quelques marches du perron où vous accueille tout sourire, un jeune couple un bébé dans les bras ! Lui toqué, de blanc vêtu, a dû rencontrer sa belle à l'école hôtelière toute proche où pendant qu'il découvrait les secrets de l'oeuf mollet florentine, elle apprenait la correspondance hôtelière, le raccommodage et le ménage. Autant dire qu'ils sont fins prêts pour accueillir "le monde" comme on dit à la mairie de Paris et que le monde en a rêvé d'un gentil accueil comme ça ! Un peu irrité que l'on ait choisi de jouer une carte aussi minimaliste, on essaye de comprendre où les publicitaires ont bien pu dénicher à Paris, cet hôtel-là ! En cherchant bien, on trouve, c'est écrit en tout petit au bas de l'affiche... et de comprendre la supercherie ! Cet hôtel-restaurant-là, certainement lassé des palaces parisiens, Jean Tibéri avait dû en rêver... Alors, on le lui a fait et de transformer très vite l'hôtel Caulaincourt qui n'a jamais eu de restaurant, en hôtel-restaurant le temps d'un cliché, de lui rajouter les étoiles qu'il n'a pas et de faire poser un couple déguisé en hôteliers devant l'établissement !... Drôle de pratique tout de même qui laisse imaginer la piètre image qu'ont les élus parisiens des hôtels, cafés et restaurants de la capitale pourtant fort nombreux à pouvoir prétendre être mis en avant pour leur modernisme et le professionnalisme de leurs prestations. Etre allé monter de toutes pièces des images aussi délirantes laisse imaginer que la mairie de Paris aborde les acteurs du tourisme parisien avec le dédain d'une fille de roi envers un scribe à gages !

PAF


L'HÔTELLERIE n° 2560 Hebdo 7 Mai 1998

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