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Restauration

Patrick Henriroux (Vienne)

Le Tribunal le choisit pour La Pyramide

Directeur-chef de cuisine salarié de «La Pyramide» depuis le 19 juin 1989, Patrick Henriroux en est aujourd'hui propriétaire. Le Tribunal de commerce de Vienne a accepté son plan de reprise de l'établissement mis en redressement judiciaire le 8 mars 1995.

A quelques jours de son trente-huitième anniversaire, Patrick Henriroux s'est vu offrir le plus beau des cadeaux. Le Tribunal de commerce de Vienne (Isère) a jugé que son plan de reprise de La Pyramide était le plus cohérent pour assurer la pérennité de l'entreprise et le sauvetage de la quarantaine d'emplois, lui permettant ainsi d'acheter le fonds du restaurant dans lequel il s'est investi depuis 1989.

«C'est la fin d'un cauchemar» n'hésite pas à dire Patrick Henriroux à propos d'un établissement mis en redressement judiciaire le 8 mars 1995. Ce jour-là, le directeur de La Pyramide avait pu avoir le sentiment que le ciel lui tombait sur la tête et que tous ses projets d'avenir étaient réduits à néant...

Au fil des années, une véritable histoire d'amour s'était nouée entre un chef, son équipe et la maison historique dont Fernand et Mado Point assurèrent la réputation pendant plus d'un demi-siècle !

Pour Patrick et Pascale Henriroux, l'aventure débute le 19 juin 1989. Ce jour-là, le couple qui s'est connu une dizaine d'années plus tôt à l'Auberge Bressanne de Bourg et a depuis fait route commune (1), s'installe à La Pyramide. L'illustre restaurant de Vienne vient d'être racheté par la Foncière des Champs-Elysées de Dominique Bouillon (2).

Au début, tout se passe plutôt bien. Un vaste programme de rénovation a été entrepris, les résultats sont bons et Patrick Henriroux ne tarde pas à confirmer sa réputation (3).

Redressement judiciaire

Le 8 mars 1995, pourtant, tout s'écroule. Dominique Bouillon est mis en faillte personnelle et le Tribunal de commerce de Vienne déclare La Pyramide en redressement judiciaire. Patrick Henriroux bénéficie pourtant d'une période d'observation d'une année. Puis, les problèmes juridiques n'étant pas résolus, de 8 mois supplémentaires le 5 mars 1996.

A l'échéance voici quelques jours, il n'imaginait qu'une seule solution pour sauver l'entreprise et maintenir les 39 emplois : présenter un plan de reprise cohérent en se portant acquéreur du fonds de commerce.

«En mars 1995, cette hypothèse ne nous est jamais venue à l'idée, car c'était trop lourd et trop important. Très vite pourtant, j'ai senti un formidable soutien des clients qui nous disaient de ne pas abandonner et de mon équipe qui est toujours restée soudée. Dès lors, je me suis senti une responsabilité. Et partant du principe qu'un capitaine n'abandonne pas le navire pendant la tempête, j'ai décidé de faire tout ce que je pouvais pour que La Pyramide reste ce que nous en avions fait.»

S'il a choisi de ne pas baisser les prix pour tenter de drainer une nouvelle clientèle, Patrick Henriroux a insisté sur un niveau de qualité encore supérieur pour fidéliser des clients qui ont adhéré à sa démarche. «Nous avons ouvert tous les jours en été, et cela a permis de compenser la perte de chiffre d'affaires des premiers mois (+ 10% au bout du compte en 1995). Tout le monde a compris la décision, comme celle d'abandonner notre fermeture annuelle de février qui risquait d'être enregistrée par certains comme une fermeture définitive.»

Le politique était bonne, et les résultats n'ont pas tardé (+ 32% de CA en 1996). Avec le soutien financier à 100% du Crédit Agricole de l'Isère, Patrick Henriroux pouvait donc présenter son plan de reprise au Tribunal de commerce de Vienne.

Le Groupe O.H.R. qui possède des restaurants à Angers et en Normandie et M. Human, propriétaire du restaurant Beau Rivage à Condrieu étaient également sur les rangs. Malgré une «moindre solidité financière», préférence a été donnée à Patrick Henriroux et sa SA commerciale à caractère familial où s'est investi l'ensemble de sa famille (Patrick et Pascale Henriroux détiennent 90% des parts de la SA Point-Pyramide).

La décision du tribunal lui permet désormais d'être propriétaire du fonds de commerce, des licences, du mobilier, du matériel et de la cave de 20.000 bouteilles environ, mais aussi des noms Fernand Point et La Pyramide.

«Nous devrons rembourser 50.000 francs par mois pendant 7 ans. Cela doit nous permettre d'assurer la pérennité de l'entreprise en travaillant avec une équipe qui a su rester fidèle à cette maison. En ce qui me concerne, je finirai désormais ma carrière ici où j'ai la volonté de poursuivre avec le même souci de qualité. Nous travaillerons désormais dans la sérénité, ce qui n'était pas toujours le cas ces derniers mois. C'est le gros problème lorsque les soucis financiers dépassent les soucis du cuisinier. Pour moi, mon épouse et ma famille, ce fut une période très difficile à vivre. Et pour le personnel aussi, qui ne pouvait plus faire le moindre projet avec cette épée de Damoclès au-dessus de la tête. Tout le monde s'est battu pour que cette maison fonctionne, et c'est une grosse satisfaction d'avoir obtenu un dénouement heureux.»

Pour l'heure, le rachat des murs-que l'on peut estimer entre 10 et 12 MF-, n'est pas d'actualité. Mais s'il trouve un efficace soutien financier, Patrick Henriroux n'écarte pas l'idée de plancher sur le sujet.

«Cette année, nous avons refait la salle de restaurant en autofinançant les 500 000 francs nécessaires. Et dans l'avenir, nous souhaitons développer l'hôtel pour qu'il corresponde davantage à nos envies qu'à celle des architectes qui l'ont conçu.» dit-il enfin.

J.-F. Mesplède

(1) Après un BEP à Luxeuil-les-Bains, le parcours de Patrick Henriroux passe par l'Auberge Bressanne à Bourg, l'Hostellerie du Château d'As à Beaumes-les-Dames, l'Hôtel du Goyen à Audierne, Georges Blanc à Vonnas et La Ferme de Mougins à Mougins.

(2) Pour le fonds et les murs (rachetés à Marie-José Eymin, la fille de Fernand et Mado Point) et les travaux, l'enveloppe globale était de l'ordre de 40 millions de francs.

(3) Première étoile Michelin en mars 1990 et 18/20 chez Gault/Millau, deuxième étoile en mars 1992 et chef de l'année Gault/Millau en novembre 1995.

«Je finirai désormais ma carrière ici où j'ai
la volonté de poursuivre avec le même souci de
qualité».

LES CHIFFRES DE LA PYRAMIDE

Les chiffres de La Pyramide (restaurant et 24 chambres 4 étoiles pour un prix moyen de 800 francs et un TO passant de 40 à 46% entre 1995 et 1996) sont significatifs de l'influence de Patrick et Pascale Henriroux sur la bonne marche de l'établissement. En misant sur un excellent rapport qualité/prix (TM 600 francs en 1996), Patrick Henriroux n'a cessé d'augmenter le CA de la maison dont il est désormais propriétaire (il est P-dg de la SA Point-Pyramide, Pascale Henriroux en étant le directeur général).

De 10 MF pour la première année d'exercice, le CA est passé à 13,2 MF (HT) en 1994, puis à 14,5 MF (HT) en 1995 et se situera à 17 MF (HT) en 1996.

Le prix des menus est à 275 (au déjeuner, vin et café compris), 430, 530 et 630 francs.



L'HÔTELLERIE n° 2483 Hebdo 14 novembre 1996

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