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	du 25 novembre 2004	PLEINS FEUX

Parcours Cette petite rousse en tailleur et escarpins, hôtelière-restauratrice à Carcassonne et patronne de l'Umih 11, s'est vu récemment confier la présidence du comité régional du tourisme de Languedoc-Roussillon. Rien d'étonnant à cela quand on sait comment elle mène sa carrière dans la région et au niveau national. À 300 à l'heure. Le tout en privilégiant l'intérêt général et en conservant ses convictions. Rarissime.
CLAIRE COSSON

Christine Pujol une femme de parole

À peine sept ou huit petits jours de vacances par an à faire de longues balades sur les plages françaises de la côte atlantique. Une cure de thalassothérapie, quelques séances de gymnastique, et voilà la machine à nouveau prête à s'emballer. La semaine débute avec un voyage à Marrakech. But du déplacement : assister à l'assemblée générale des franchisés du groupe Accor, dont Christine Pujol fait partie puisque propriétaire d'un hôtel sous enseigne Mercure. Ensuite, direction Strasbourg, cette fois-ci pour le congrès annuel de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (Umih). Un rendez-vous que cette quinqua dynamique et lumineuse ne peut manquer sous aucun prétexte. C'est vrai ! Elle est membre du directoire de ce syndicat professionnel. Et, qui plus est, présidente de l'Umih de l'Aude.
Puis on enchaîne avec un rapport à boucler dans les plus brefs délais sur le soutien à l'hôtellerie traditionnelle pour le Comité national du tourisme (CNT) où elle siège depuis 2000. La date de remise du projet est programmée pour début décembre. Il y a moins de deux mois, cette mère de quatre enfants a présenté au pied levé un dossier sur la classification hôtelière européenne dans le cadre d'une réunion de l'Hotrec. Alors, pas de souci : là aussi, "ça va le faire", comme disent les jeunes d'aujourd'hui. "D'autant que Christine a un énorme pouvoir de concentration et d'analyse. Je dois bien l'avouer, je l'admire sur ce point. En fait, elle est ce que l'on appelle une bosseuse", précise René Escouroux, président de la chambre de commerce et d'industrie de Carcassonne. Et André Daguin, patron de l'Umih, de surenchérir : "C'est un véritable moteur. Une locomotive qui connaît ses dossiers sur le bout des doigts."
Reste que le marathon ne s'achève pas ainsi. Le temps pour cette jolie rousse à la voix chaude et chantante d'animer, aux côtés d'André Avinens, la commission régionale paritaire emploi formation de l'industrie hôtelière de Languedoc-Roussillon, et retour illico presto à Montpellier, au comité régional du tourisme (CRT).

"Les enjeux touristiques de la région Languedoc-Roussillon sont fantastiques. Tout est à construire", s'enflamme Christine Pujol.

Toujours fin prête au 'combat'
Georges Frêche, nouveau président de la région, lui a confié la présidence de l'organisme cet été, en plein mois de juillet. Pas question bien sûr de le décevoir. "Dans la mesure où je suis investie par les autres, je dois tout mettre en oeuvre pour tenir mes engagements", avoue Christine avec sincérité. Et lorsque cette native de Castelnaudary s'engage, autant dire que ça déménage !
Depuis l'adolescence, en effet, Christine Pujol fonctionne ainsi : en allant de l'avant. Toujours fin prête au 'combat'. Jamais de répit, aucune complaisance. "J'appartiens à la génération de 68", plaisante l'intéressée. "Elle sait surtout que la vie n'est pas simple, et qu'on ne lui fera jamais crédit d'emblée", ajoute un ami proche. Notamment dans le milieu des CHR, où les femmes n'ont en guère, jusqu'à présent le droit à la parole. Loin s'en faut… D'ailleurs, Christine se souvient encore très bien de la tête que faisaient certains professionnels du secteur lors de son intervention musclée au congrès de la FNIH, à Metz. à leur grande surprise, elle n'avait alors pas mâché ses mots.
"C'est quelqu'un qui s'investit effectivement de manière forte et déterminée dans ses engagements. C'est aussi avec pugnacité qu'elle défend les décisions que nous prenons collectivement pour la reconnaissance et l'évolution de notre profession dans le domaine de l'emploi et de la formation", souligne André Avinens, président de la commission régionale paritaire emploi formation de l'industrie hôtelière en Languedoc-Roussillon. Et Mme Géli, patronne de l'Hôtel du Canal à Castelnaudary, de compléter : "C'est une personne qui a le courage de ses opinions." Comprenez, la dame n'a pas sa langue dans sa poche et finit un jour ou l'autre par dire ce qu'elle a sur le coeur. Parfois, cela dérange ! Qu'à cela ne tienne, ceux qui la côtoient savent qu'elle ne prend jamais la parole par simple goût de la provocation. Bien au contraire. "Ces interventions sont toujours positives", indique Christian Lanoix, secrétaire général de la CCI de Carcassonne. Et puis, il faut l'avouer : ces derniers temps, Christine est devenue plus diplomate…
N'empêche. Préoccupée d'intérêt général, cette femme-là n'a qu'une seule idée en tête : lutter pour ses droits, et par-là même pour ceux de la profession et de ses concitoyens. Ce n'est d'ailleurs pas le fruit du hasard si cette amoureuse de la race féline dirige le syndicat départemental de l'industrie hôtelière de l'Aude depuis 1984 et occupe les fonctions de conseillère municipale à Carcassonne depuis presque 10 ans maintenant.
Comment dire… Sens de la justice, dévouement, altruisme ? Non, évidemment. Christine Pujol n'est pas une sainte. En réalité, elle se comporte comme le 'maillon' utile de la chaîne. Sa disponibilité et sa dévotion au bien du groupe sont du reste notées par tous. D'autant plus fortement qu'elle n'attend rien en retour, fait rarissime qui mérite d'être souligné. "Christine défend la cause commune sans aucun intérêt personnel", assure volontiers Jacques Bellin, patron du Groupement national des chaînes hôtelières. "Malgré toutes ses tâches quotidiennes, elle reste disponible. On a son numéro de portable, on peut la joindre au moindre problème… Elle est vraiment à notre écoute", raconte de son côté un adhérent de l'Umih 11.
Allez, si on poussait un peu plus loin l'analyse psychologique, on finirait bien par découvrir quelques secrets derrière cette dévotion. Du style angoisse laminante, jonchée de manques, de désirs, de volonté de toujours progresser et d'aller au bout de soi-même. Mais comme cette femme de caractère n'est pas du genre à se livrer, nous ne pousserons pas davantage l'introspection. En attendant, on a relevé tout de même quelques éléments intéressants.

Naissance au Café de l'Arcade
Christine est née voilà 56 ans, au Café de l'Arcade, en plein coeur de la ville du cassoulet. Sa mère, décédée alors qu'elle était encore adolescente, exploitait ce gentil petit commerce tandis que son père travaillait pour sa part à la SNCF. De sa jeunesse, notre protagoniste garde un souvenir ému, plus qu'elle ne veut bien l'admettre. Hormis cela, rien ne la destinait réellement à embrasser le métier d'hôtelière. Du reste, peu de temps après son mariage en 1973, lorsque Renaud, son époux, lui confie la responsabilité de l'Hôtel du Donjon que détenait sa famille à Carcassonne, Christine dit franchement s'y être installée "à reculons".
"À l'époque, j'aspirais à autre chose", confesse-t-elle. Une maîtrise d'anglais et un diplôme d'interprète de Paris-Dauphine en poche, la jeune femme avait logiquement envie de voir du pays et de faire une carrière internationale. Mais quand on aime, on ne compte pas… Alors, elle va au final assez vite se piquer au jeu de l'hôtellerie à l'occasion notamment de l'extension de l'Hôtel du Donjon, qui passe de 16 à 36 chambres au début des années 1980. "Tout en allaitant mes enfants, je posais les moquettes et j'achevais les peintures comme si j'aménageais ma maison", se rappelle tout sourire la présidente déléguée du CRT Languedoc-Roussillon. Une formation sur le tas qui, accompagnée d'un sens aigu de la gestion et d'une implication de tous les instants, va rapidement payer. La preuve : outre l'Hôtel Le Donjon-Les Remparts, membre de la chaîne Best Western dont le taux d'occupation moyen annuel atteint les 70,46 %, celle que l'on appelle désormais 'Madame Pujol' gère aujourd'hui deux autres établissements au coeur de la cité médiévale restaurée par Viollet-le-Duc : le Mercure Carcassonne Porte de la Cité (fréquentation de 75 %) et la Brasserie du Donjon. Trois exploitations qui génèrent des recettes globales de l'ordre de 4,33 millions d'euros (2003). Plutôt pas mal en ces temps de morosité économique généralisée. Tout comme le nombre d'adhérents de l'Umih 11, qui a littéralement explosé : de 80 en 1997, il frôle la barre des 380 à l'heure actuelle.
Christine n'en demeure pas moins modeste. Elle ne récite pas ses exploits. Grande humaniste, elle ne se targue pas de défendre des collègues en mauvaise posture. Ne se vante pas non plus d'avoir participé à la création de la commission régionale paritaire emploi formation de l'industrie hôtelière en Languedoc-Roussillon en 1993, ou bien d'avoir suscité des vocations. Encore moins de s'être vu décorer de l'ordre national du Mérite. Mais pourquoi donc ? Tout simplement parce que, même si les lauriers tombent, cela ne l'empêche pas de douter ni de vouloir faire encore mieux - "trait de caractère qui la rend parfois un peu impatiente", note un de ses proches collaborateurs.

À la recherche d'une quatrième affaire
Il est vrai que cette femme ne passe pas une seule minute sans se poser des questions fondamentales et sans se préoccuper de l'avenir. "Christine est indiscutablement habitée par la réflexion. Je crois que c'est parce qu'elle est sensible aux autres et tournée vers le monde extérieur", remarque Jacques Bellin. Des qualités personnelles qui, associées à un professionnalisme reconnu et des idées politiques clairement affichées, ont su séduire le grand Georges Frêche.
D'ailleurs, à écouter Christine parler de sa région, l'homme a de toute évidence visé juste. "Les enjeux touristiques de la région Languedoc-Roussillon sont fantastiques. Tout est à construire, s'enflamme la nouvelle élue. Il est impératif que nous menions une enquête de fond sur les attentes des touristes de demain, afin d'adapter notre offre et de mieux communiquer. Notre objectif est de donner une vraie identité à la région autour de la Septimanie."
Voilà donc un combat de plus pour Christine Pujol. Un combat pour lequel elle frissonne déjà… Tout ce qu'elle aime, en vérité. Forte de son expérience, elle admet toutefois qu'il va lui falloir choisir entre ses différentes activités. Pour autant, elle n'exclut pas de racheter une quatrième entreprise et sillonne de long en large le département à cette fin. L'idée la taraude aussi d'ouvrir un bistrot des terroirs, juste en face de l'Hôtel Le Donjon-Les Remparts. Établissement qui - au passage - se prépare à subir une nouvelle restructuration. Sans compter d'autres projets en cours… Tel celui, peut-être, de travailler un jour en famille.
Après tout, son fils aîné, Hadrien, diplômé de l'Institut de management international d'hôtellerie (Imih), effectue en ce moment ses armes au sein d'un célèbre cabinet d'audit anglais. Et l'une de ses filles a rejoint l'entreprise au mois d'octobre dernier. "Je n'ai jamais incité mes enfants à travailler dans le secteur. Ils y viennent finalement petit à petit", indique Christine. Reste qu'eux aussi devront faire leurs preuves. Rien n'est jamais acquis d'avance pour Christine Pujol ! < zzz18p

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L'Hôtellerie Restauration n° 2900 Magazine 25 novembre 2004 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE