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du 26 février 2004
L'ÉVÉNEMENT

Baisse de la TVA en restauration

L'ALLEMAGNE NE S'OPPOSE PLUS, MAIS IL FAUT TOUJOURS L'UNANIMITÉ

L'Allemagne n'oppose plus de veto à la baisse de TVA en restauration pour 2006, mais il reste encore à obtenir l'accord à l'unanimité des 15, voire des 25 ministres des Finances de l'Europe. S'il s'agit d'une avancée, la bataille est encore loin d'être gagnée pour les restaurateurs.

Mercredi 18 février à Berlin, Jacques Chirac annonce qu'il vient d'obtenir le soutien du chancelier allemand Gerhard Schröder pour une baisse de la TVA à 5,5 % dans la restauration en France, mais pour 2006. Et d'aucun de conclure trop vite que les restaurateurs venaient d'obtenir la baisse de TVA, même si cela était prévu pour 2006.
Mais c'est loin d'être le cas. Car si l'Allemagne était le plus important opposant à la baisse de TVA en restauration, il n'était malheureusement pas le seul pays à s'y opposer. On constate toujours une très vive opposition du Danemark et de la Suède notamment. En outre, l'instauration de la baisse de TVA en restauration ne peut résulter d'un simple accord franco-allemand. La France doit obtenir l'accord des 15 ministres des Finances européens en sachant qu'à partir du 1er mai 2004, ils seront rejoints par 10 autres ministres. Et ce qui est difficile à négocier à 15 risque d'être encore plus difficile à 25, pour ne pas dire impossible. D'autant que le dossier TVA qui doit être négocié ne concerne pas uniquement la restauration. En effet, il s'agit pour les ministres des Finances de se mettre d'accord sur une nouvelle directive européenne ; l'annexe H qui définit les secteurs d'activités pouvant bénéficier de l'application d'un taux de TVA réduit et dans laquelle il est prévu d'inclure la restauration. Si la France veut intégrer la restauration dans cette liste, d'autres pays comme l'Irlande et la Grande-Bretagne voient d'un mauvais œil la suppression de leur taux zéro pour les chaussures et vêtements d'enfants. Ce qui veut dire qu'on repart pour une discussion globale de cette liste avec toutes ces tractations pour obtenir gain de cause.
Les discussions pour l'élaboration de cette nouvelle annexe H avaient commencé en septembre 2003 et, faute d'un accord en décembre de la même année, le conseil des ministres européens passant outre la volonté de la commission européenne, s'est donné un délai supplémentaire de 2 ans pour examiner cette nouvelle liste. Ils ont donc jusqu'au 31 décembre 2005 pour la définir. Il y a ainsi peu de chances qu'ils puissent parvenir à un consensus d'ici le 1er mai de cette année, date d'entrée de nos 10 nouveaux partenaires. n**

< Pour André Daguin, président de l'Umih
"Le combat n'est pas encore terminé"

"Le combat n'est pas encore gagné, mais il n'a jamais été aussi près de l'être. Les restaurateurs ne doivent pas se décourager, mais il ne faut pas non plus les leurrer : le combat n'est pas terminé même si beaucoup de batailles ont été gagnées. C'est une guerre qui continue. Il faut que les troupes gardent le moral. Cela veut dire que, maintenant, la TVA à taux réduit est envisageable pour 2006 et au mieux en 2004.
En attendant, nous avons obtenu 1,5 milliard d'euros d'allègement de charges que nous n'acceptons qu'à la condition que ce soit transitoire et momentané avant la baisse de TVA. C'est pourquoi nous proposons une autre idée : économisez ce que vous avez mis sur les allègements de charges et donnez-nous la TVA dès cette année. Si on nous donne la TVA avant la fin de l'année 2004, cette mesure n'aura pas d'impact sur le budget de 2004 de Francis Mer ce qui va lui permettre d'économiser 500 Me pour cette année, qu'il va pouvoir mettre de côté pour amortir le coût de la baisse de la TVA en 2005." zzz66f

 

Entretien avec Noëlle Lenoir ministre déléguée aux Affaires européennes
"Je suis très contente du ralliement de l'Allemagne à la demande française"

L'Hôtellerie : Etes-vous satisfaite du dernier rebondissement du dossier TVA en restauration ?
Noëlle Lenoir : Je suis très contente du ralliement de l'Allemagne à la demande française, parce que je pense qu'il s'agit d'une décision très équilibrée et qui évite des conflits entre Etats. On peut penser, bien que la négociation soit loin d'être terminée, que les autres partenaires européens vont accepter de nous suivre. Le président de la République a été suffisamment convaincant pour expliquer les raisons qui nous poussent à vouloir appliquer un taux réduit de TVA au secteur de la restauration. C'est un secteur qui n'a plus les mêmes facilités qu'il y a quelques années. Il n'y a pas de sens à empêcher une profession, qui a un encrage national très fort, de faire face à ses difficultés économiques et sociales. Notre argument de création d'emplois, d'insertion des jeunes ainsi que celui de la lutte du travail au noir ont fini par porter ses fruits auprès de nos partenaires allemands. Nous souhaiterions à terme qu'il y ait une plus grande harmonisation fiscale en Europe, que ce soit la fiscalité de la TVA, mais aussi celle de l'entreprise et de l'épargne.

L'Hôtellerie : Vous dites que les négociations vont prendre plusieurs mois, c'est-à-dire ?
Noëlle Lenoir : Comme vous le savez la révision de la directive TVA et son annexe H relative aux secteurs et produits qui peuvent bénéficier d'un taux de TVA réduit est en cours et nécessite encore des débats, vu le nombre de secteurs concernés. Cela va encore demander quelques mois et cela risque de devoir être une négociation à 25 pays, car il sera difficile de finaliser la négociation avant le 1er mai prochain, date de l'élargissement. Parmi les 10 pays qui vont entrer dans l'Union européenne, il y en a 4 qui appliquent déjà le taux réduit à la restauration et ont obtenu de la garder jusqu'en 2007. Or, la commission avait retenu et soutenu la proposition française de réduire le taux de TVA de la restauration au nom du principe d'équité qui doit guider la politique en matière d'harmonisation fiscale. En effet, sur les 15 Etats qui composent l'Union européenne, 8 étaient autorisés à bénéficier du taux réduit et 7 ne l'étaient pas. Maintenant on va avoir 8 + 4 soit 12 pays sur 25, ce n'est pas tout à fait la moitié, mais presque, et d'autres pays nous soutiennent.  

L'Hôtellerie : La décision peut-elle être prise lors de l'Ecofin du 9 mars prochain ?
Noëlle Lenoir : Il y a des procédures, des navettes à respecter, cette décision ne peut pas être prise tout de suite. La commission a aussi proposé, à la demande de la France, un système beaucoup plus souple afin de laisser aux Etats membres plus de liberté pour la fixation du taux de TVA de certains services. Elle considère que pour les services de contact direct personnalisé à une clientèle, telle que les services de gardes d'enfants, de personnes âgées, les coiffeurs, les restaurateurs... il ne serait pas inopportun de rendre aux Etats la liberté de fixation du taux de TVA en ce qui concerne ce type de services. C'est ce qu'on appelle la subsidiarité.  

L'Hôtellerie : Pourquoi en 2006 et pas avant ?
Noëlle Lenoir : 2006 est une date qui est apparue raisonnable compte tenu des délais de négociations et des difficultés financières des uns et des autres et notamment de l'Allemagne. La baisse de TVA crée des emplois, mais en revanche entraîne une augmentation des dépenses publiques et donc du déficit qui est aujourd'hui supérieur à 3 % du PIB en France comme en Allemagne, donc l'arbitrage s'est fait sur la base de l'année 2006.

L'Hôtellerie : Etes-vous satisfaite de l'évolution de ce dossier ?
Noëlle Lenoir : L'évolution de ce dossier montre qu'il ne faut jamais désespérer du dialogue européen. Une situation n'est jamais définitivement bloquée. La solution qui est adoptée par le gouvernement est raisonnable, car elle permet dans un premier temps d'expérimenter la baisse des charges, à compter de juillet et ce pendant un an et demi. Cette baisse des charges donne un bon signal, et surtout elle répond à une absolue nécessité pour les PME dont les charges sont bien trop élevées. Puis la TVA baissera en 2006. C'est une solution qui s'annonce non conflictuelle.
On n'avait pas envie d'un bras de fer avec nos partenaires. Et enfin, cela permettra peut-être d'avancer sur deux autres dossiers fiscaux européens à plus long terme. C'est-à-dire restituer aux Etats une part d'autonomie en matière de TVA sur la base de la subsidiarité concernant certains services et surtout obtenir que les décisions fiscales soient prises non à l'unanimité, mais à la majorité qualifiée dans certains secteurs.
Propos recueillis par Pascale Carbillet

 

Interview de Jacques Borel, président du Club TVA
"Je ne suis pas inquiet par l'arrivée des 10 nouveaux pays"

L'Hôtellerie : Que pensez-vous du revirement de position de l'Allemagne ?
Jacques Borel : Je suis très satisfait de cette décision de l'Allemagne, qui ne pouvait continuer à s'opposer. Aujourd'hui, nous n'avons plus que trois oppositions, le Danemark, la Finlande et la Suède. Il s'agit du clan des scandinaves, qui sont opposés -pour des raisons dogmatiques, de déficit budgétaire que ne respectent ni la France ni l'Allemagne d'ailleurs -et qui trouvent scandaleux dans le même temps que la France veuille prévoir une mesure qui augmenterait ce déficit. Je pense qu'à la prochaine réunion Ecofin du 9 mars, nous obtiendrons l'autorisation d'élargir l'annexe H à partir de 2006.
Ce sujet a été débattu jeudi 19 février lors de la réunion préparatoire du comité de la fiscalité indirecte. L'annexe H doit être révisée avant le 31 décembre 2005. Si on a perdu du temps au niveau des discussions, c'est en raison de l'augmentation du déficit budgétaire de la France.
A partir du moment où la France fera baisser son déficit, l'accord de nos partenaires suivra et le clan des scandinaves va se rallier au camp des partisans d'un taux réduit de TVA pour le secteur de la restauration.

L'Hôtellerie : Ne faut-il pas craindre l'arrivée de ces 10 nouveaux pays dans l'Union européenne ?
Jacques Borel : Aujourd'hui, je ne suis pas inquiet par l'arrivée des 10 nouveaux pays alors que je l'étais il y a encore un mois. En effet, il faut savoir que parmi les 10 nouveaux pays, 4 bénéficient d'un taux de TVA réduit pour la restauration. Il s'agit de la Hongrie, la Pologne, Chypre et la Slovénie. Ils ont donc demandé à pouvoir continuer à appliquer ce taux réduit à titre dérogatoire jusqu'en 2007. Quant à la République Tchèque, elle bénéficie elle aussi du taux de TVA réduit, mais lors de sa demande d'adhésion à l'Union européenne, elle a oublié de préciser sur les formulaires qu'elle souhaitait conserver le taux de TVA réduit pour la restauration à titre dérogatoire jusqu'en 2007. Ce qui veut dire qu'à partir du 1er mai, ce pays ne devrait plus appliquer un taux de TVA réduit et taxer son activité de restauration à taux normal.
Quant à la Slovaquie qui est soumise à un taux normal de TVA, elle se trouve géographiquement coincée entre deux pays qui bénéficient d'un taux réduit de TVA, la République Tchèque et la Hongrie. Elle aussi voudrait bénéficier d'un taux réduit de TVA. C'est en raison de ces différents éléments que je ne crains plus l'arrivée de ces 10 nouveaux pays.

 

< Pour Jean-François Girault, président de la CPIH
"Nous somme extrêmement déçus"  

Nous sommes extrêmement mécontents. La TVA était quasiment acquise et aujourd'hui, on la repousse en 2006. C'est la 'politique du yoyo' qui est pratiquée à l'heure actuelle. Nos adhérents ont l'impression d'être pris pour des pantins. Un jour c'est non, le lendemain c'est oui. Nous sommes d'autant plus perplexes que ces annonces ont lieu en pleine période électorale. Aujourd'hui, la baisse des charges sociales c'est bien, si celle-ci ne se réduit pas à une peau de chagrin.
En effet, cette mesure profitera beaucoup plus aux gros établissements qu'aux petits qui n'ont pas beaucoup de personnel et utilisent déjà des contrats aidés, comme les contrats d'apprentissage. Ce sont aussi ces petites entreprises qui pratiquent des prix peu élevés, qui vont pâtir de la situation. Les négociations sont toujours en cours pour la mise en place du dispositif de charges sociales et on va essayer de tirer la meilleure part du gâteau. zzz66f

 

< Pour Jacques Mathivat, président de Synhorcat
"Le seul point positif est la supression du veto allemand"

Il nous reste encore un espoir de voir débloquer la situation, lors de la prochaine réunion Ecofin, le 9 mars prochain. Nous sommes toujours en période électorale. Le seul point positif aujourd'hui, c'est la suppression du veto allemand. Mais il ne s'agit toujours que d'une possibilité et non d'une certitude d'obtenir la baisse de TVA en 2006. Nous sommes en plein montage médiatique à l'approche des élections régionales. Actuellement, nous sommes actuellement en réunion, afin de définir les modalités du dispositif d'allègement de charges sociales. Or, sur les 200 000 entreprises du secteur des CHR, 65 000 n'ont pas de salariés (soit un 1/3), et, par conséquent, ne vont pas pouvoir bénéficier du dispositif. Nous essayons de trouver une solution pour ces entreprises. Ma grande crainte est qu'en raison de la complexité du dispositif et de son champ d'application, le Conseil d'Etat annule la mesure. Il faut savoir que ce plan d'allègement de charges est difficile à codifier et à redistribuer aux entreprises. On ne peut bien sûr refuser une telle mesure, mais ce n'est pas celle que l'on attendait. zzz66f

 

< Pour la Fagiht (fédération autonome générale de l'industrie hôtelière touristique)
Satisfaction

La suggestion puis l'approbation par la Fagiht de trouver une solution alternative et transitoire à la baisse du taux de TVA de 19,6 % à 5,5 % dans la restauration française ont abouti, la semaine dernière, à la décision du Premier ministre d'attribuer 1,5 milliard d'euros à la profession en faveur d'une baisse des charges sociales.
Dès lundi 16 février, les syndicats patronaux de l'industrie hôtelière, dont la Fagiht, travaillaient au cabinet de Renaud Dutreil pour trouver les meilleurs critères possibles d'application.

Et ce délai nouveau pour obtenir l'accord de l'Allemagne, principal opposant à la réduction du taux de TVA, a été bien utilisé par le président Jacques Chirac et a porté ses fruits en entraînant un accord de l'Allemagne pour 2006. Ainsi, les mesures en faveur de la restauration française pour réduire ses charges, la rendre plus compétitive, lui permettre de se développer et donc d'embaucher, seront à double détente : dans le domaine des charges sociales, sans doute le 1er juillet 2004 ; dans le domaine du taux de la TVA en 2006.
La Fagiht est satisfaite et fera tout pour que les objectifs et les délais fixés soient respectés. zzz66F

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L'Hôtellerie Restauration n° 2861 Hebdo 26 février 2004 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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