Périgeux
En reprenant un café historique, Pascal Mémain conserve la mémoire périgourdine et continue d'écrire l'aventure d'un établissement pas comme les autres...
Pascal Mémain a bien conscience que le petit café qu'il vient de reprendre a un lourd passé et une histoire très originale dont il compte d'ailleurs se servir. Installé au centre de Périgueux dans le quartier des Halles, le petit estaminet de 60 m2 a été créé par un curé. L'histoire devenue légende remonte au début du siècle. Noël Chabot a ouvert ce comptoir en 1917 après avoir été obligé par la hiérarchie ecclésiastique d'abandonner l'habit. Cet homme passionné de vins sortait un peu trop des sentiers habituels de la prêtrise : enseignant au Mexique, officier durant la Grande Guerre et photographe. Il écrira et éditera aussi un peu plus tard un ouvrage très connu en Dordogne, Moi, Noël Chabot, Curé Bistrot. "Reprendre un établissement qui est au centre d'une telle histoire, c'est forcément continuer un peu cette aventure. C'est cet aspect des choses qui m'a séduit." Il faut dire aussi que Pascal Mémain connaissait l'histoire de ce café puisqu'il était auparavant patron du Brabant, à Brasillac, en périphérie de Périgueux. Pour concrétiser son rêve et faire revivre le Café du Curé, ce jeune homme de 34 ans a investi plus de 210 000 francs, hors achat du fonds.
Reproductions d'affiches
Rebaptisé Le Coderc, du nom de la place sur laquelle il est implanté, le Café du Curé
a revêtu de nouveaux habits avec de nombreux espaces vitrés et une décoration composée
en majorité de meubles en fer forgé. La terrasse peut accueillir les soirs d'été une
trentaine de personnes, le bar a été entièrement reconstruit, et la décoration revue
pour aller vers plus de modernité, tout en conservant des agrandissements de vieilles
cartes postales mettant en scène l'ancien propriétaire. A en juger par ces quelques
reproductions, le curé Chabot était très attiré par les bons vins. "Au point
que certaines affichettes de mon curé se sont retrouvées à Berlin pour illustrer une
pièce de théâtre inspirée du personnage de Bacchus", commente avec un sourire
Pascal Mémain. Mais au-delà de la curiosité pour ce personnage très original, Le
Coderc bénéficie également d'autres atouts pour faire sa place dans le paysage local.
"Nous sommes dans un quartier très populaire et marchand, précise le nouveau
patron. Très touristique également, car intégré dans les ruelles de la vieille
ville. Mon grand-père avait déjà son étal de maraîcher à 50 mètres de là, et j'ai
toujours vu ce café plein de monde."
Rentabiliser une image
Pour séduire une clientèle de plus en plus nombreuse, Pascal Mémain s'apprête à
lancer une carte de cocktails qui permettra peut-être de toucher une cible plus large que
celle des traditionnels bars-tabacs. La terrasse de l'établissement pourrait également
accueillir des musiciens en été. "Tous les jours, des gens s'arrêtent, entrent,
s'étonnent devant des affiches et des reproductions." L'endroit suscite
l'intérêt. Depuis le curé Chabot, une seule famille a occupé ce lieu, les Dupuy.
"A présent et à mon tour, je compte bien écrire une longue page de l'histoire
de ce café avec des recettes peut-être un peu plus modernes." Ouvert six jours
sur sept, dès six heures du matin jusqu'à une heure du matin maximum, fermé en été
quand il n'y a plus personne, Le Coderc reste avant tout un petit bistrot de pays. "Il
faut savoir conserver ses souvenirs et son héritage. Je n'ai pas l'intention de changer
la vocation de ce bar qui restera un lieu de rencontre et une affaire modeste en termes de
chiffre. Mon personnel est réduit à un serveur, et mes objectifs forcément limités.
Nous ne serons jamais une grande brasserie, mais à Périgueux, tout le monde vient au
bistrot du curé."
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L'HÔTELLERIE n° 2669 Hebdo 8 Juin 2000