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Italie

La restauration trouve ses marques

En dix ans le marché de la restauration commerciale italienne est passé de l'artisanat aux temps modernes...
ou presque.

Pour les restaurateurs italiens, l'an 2000 ne sera pas seulement la première année du siècle. Car le jubilé drainera en terre vaticane, en plus des visiteurs ordinaires, 30 millions de pèlerins du monde en quête de nourritures spirituelles et terrestres.
Pour accueillir tant de personnes dont une bonne partie sera probablement nourrie et logée par les voies infinies du seigneur et de ses prêtres, toutes les ressources de la restauration moderne seront mises à contribution. Mais comme ces ressources risquent de ne pas suffire, le Vatican a fait appel à un consortium de frères ennemis composé de Gemeaz, Pellegrini, Cremonini, Autogrill qui, avec le concours de Nestlé, prévoit un volume de service repas de l'ordre du milliard de francs.
Un événement qui donne l'occasion de faire le point sur l'évolution du marché italien.

Essor des bars-restaurants
Le marché de la restauration commerciale dispose dans la péninsule d'un potentiel extraordinaire qui se chiffre à 3,5 milliards de repas par an (contre 2,5 en France) du fait de la relative faiblesse de sa cousine collective (2 milliards de repas contre 3,5 en France), de la percée des titres-restaurant et de l'esprit d'initiative des gérants de bars. Une récente enquête publiée par Nomisma évalue le volume d'affaires annuel des repas hors foyer à 230 milliards de francs dont la part du lion est réservée à la restauration rapide nationale (bars, pizzerias et paninothèques) qui en représente 25 % tandis que le fast-food made in USA ne passe pas le cap des 4 %.
On estime en effet que 60 % des bars se sont mis, au cours des dernières années, à servir des repas simples et économiques à base de plats surgelés ou livrés en liaison froide ou chaude.
Un phénomène qui explique d'une part la croissance modeste du fast-food, d'autre part la faiblesse de la restauration à thème.
A cela, il faut ajouter le succès persistant de la pizza, présente au menu dans 53 % des établissements, qui, depuis quelques semaines, se prolonge par le démarrage des premières entreprises de livraison à domicile, et l'activité soutenue des restaurants d'hôtels qui servent plus de la moitié des touristes nationaux et internationaux.
Quant à la trattoria, formule emblématique de la restauration traditionnelle, elle poursuit une régression plus ou moins évidente selon les régions.

Impact des enseignes
Il y a dix ans, il n'existait que deux entreprises ayant une politique d'enseigne efficace : Autogrill, dominateur sur l'autoroute et en phase de lancement dans les centres urbains et le groupe Cremonini, n° 1 du fast-food, avec sa chaîne d'hamburgers restaurants Burghy, qui reléguait McDonald's à une position inhabituelle de n° 2. A ce jour, les leaders ont consolidé leur position. Autogrill bien sûr. Et McDonald's qui, après son acquisition de la chaîne Burghy, a atteint une dimension appréciable avec 150 points de vente, plus de 500 milliards de lires de vente et un programme d'ouverture qui annonce 200 unités en l'an 2000.
Mais de nombreuses sociétés ont suivi leur exemple en créant des enseignes et en entreprenant un développement en chaîne qui, selon un scénario comparable à celui de la grande distribution, devrait aboutir à une restructuration au cours des dix prochaines années.
Dans cette recherche de marques fortes, les opérateurs les plus convaincus viennent du secteur de la distribution (Pam avec Brek, Finiper avec Risto, Auchan avec Flunch) et du secteur des collectivités (Sodexho, Camst, Chef Italia, Onama).
Quant aux enseignes internationales, elles restent discrètes. L'exemple de La Croissanterie n'a pas été suivi par les autres chaînes françaises du grignotage et Planet Hollywood en est encore à ses premières vacances romaines.
Mais à l'occasion de l'ouverture de l'aérogare de Milani Malpensa, les Italiens ont eu la possibilité de découvrir ce qui les attend avec la concentration, dans les satellites, des marques d'Autogrill (Spizzico, Cia, Monte Bianco), de Compass (Salmon House, Caffé Taveggia, Pizza Leone, Café Select), de Chef Italia (Pizza Chef, Gran Café, Peck, Harry's Bar, Crazy Bull) et de Sodexho.

Restauration de voyage
Avec Autogrill, la restauration moderne italienne était née dans le monde du voyage. Elle s'y est développée en réalisant une percée sur les routes, les autoroutes, les navires de croisière, dans les gares et les aéroports. McDonald's à travers des accords de partenariat avec Esso et Agip. Autogrill en implantant ses formules traditionnelles de bar et de restaurant et sa chaîne Spizzico sur tous les sites concédés qui passent à sa portée.
Mais d'autres sociétés ont également choisi le marché des transports pour lancer leur marque. C'est le cas d'Agape avec Chef Express dans les trains et les gares. Et dans les aéroports, de Ligabue, de Ristochef et la filiale Air Chef de Ristochef.
Cette entente cordiale entre voyage et restauration moderne qui caractérise le marché national s'est d'ailleurs transposée sur les marchés européens avec la première initiative internationale des chaînes italiennes : celle d'Autogrill qui, en perdant le droit au monopole que lui assurait son statut d'entreprise du secteur public au profit de celui de filiale du groupe Benetton, s'est découvert des ambitions de raider. Ambitions déjà largement assouvies sur les autoroutes de France, d'Espagne et de l'Europe du nord, et dans le secteur des buffets de gare après la récente acquisition des activités de Frantour.
Autogrill a d'ailleurs franchi un nouveau pas dans son développement international en concluant avec Burger King des accords de coopération qui devraient aboutir, au cours des 5 prochaines années, à l'ouverture de 500 hamburgers-restaurants au sein des food- courts Autogrill.
L'autre catalyseur de la restauration moderne est la grande distribution qui, sans atteindre une pénétration comparable à celle réalisée en France, a conquis une part de marché significative : il existe 525 centres commerciaux dont 10 % ont des surfaces de vente supérieures à 25 000 m².

Restauration rapide
Dans les galeries marchandes de ces structures se sont imposées les enseignes de restauration rapide. McDonald's, dans 40 galeries marchandes, dépasse 100 milliards de lires de vente. Et son grand rival Autogrill est présent dans 36 galeries avec ses free-flow Ciao, ses bars Motta et ses fast-foods pizza Spizzico. Mais d'autres opérateurs ont également choisi ce créneau. Le meilleur rapport qualité/prix est sans contexte celui des free-flow Risto, des bars et des pizzerias de la société Vera, filiale du groupe de grande distribution Finiper. De son côté, Flunch exploite 7 restaurants, 7 bars et 3 points de vente pizza. Et des sociétés de restauration collective comme Camst, Chef Italia et Cir sont également très actives dans ce secteur.

Succès de la franchise
Le dernier volet de cette nouvelle restauration italienne est de développement de la franchise. McDonald's a ouvert une voie dans laquelle s'engagent Autogrill (Spizzico), Chef Italia (Pizzachef), plusieurs enseignes pizza (Pizza Doc, Runner Pizza, Pizza Point et Tipico pour le service à domicile) et des brasseurs comme Peroni (Crazy Bull Café). Sur la restauration commerciale qui, il y a 2 ans encore, ne donnait pas signe de changement, souffle aujourd'hui un vent de modernisation. Les protagonistes principaux demeurent encore les opérateurs nationaux. Mais dans les pays où individualisme et régionalisme n'ont jamais permis à l'Etat d'imposer sa loi, l'Europe va rapidement changer les règles du jeu et ouvrir la porte à la modernisation. Et, l'euro aidant, le marché de la restauration et de l'hôtellerie du Bel Paese ne manquera pas d'offrir dans un proche avenir de belles opportunités aux investisseurs internationaux.
G. Garcin

Le nouveau restaurant Autogrill de la Galleria de la Piazza Duomo à Milan.

L'HÔTELLERIE n° 2629 Hebdo 2 Septembre 1999