du 13 décembre 2007 |
RECRUTEMENT |
S'INSTALLER ET TRAVAILLER À NEW YORK
Le rêve américain, à portée de fourchette
Avec les 'success stories' de chefs français aux États-Unis, le rêve américain a encore de beaux jours devant lui. Mais avant d'atteindre les étoiles, pour les candidats au départ, formalités riment souvent avec difficultés.
Daniel Boulud, Jean-Georges Vongerichten, Éric Ripert, autant de réussites américaines qui suscitent des vocations parmi les jeunes dans l'industrie de la restauration. "Ce qui m'a incité à venir, c'est de travailler dans un grand restaurant, dans une grande ville. New York est une ville impressionnante, surtout quand on vient d'une petite commune de la région du Havre. On rencontre beaucoup de gens", explique Benjamin Tremauville, 20 ans, en contrat de formation au restaurant Daniel, avec des étincelles dans les yeux.
Postuler
L'arrivée peut être
à la fois intimidante et excitante. Mais avant d'y parvenir, le parcours
est parfois chaotique d'autant que les places sont rares. Il y a des étapes
auxquelles les toques en herbes n'échappent pas. La première d'entre elles
: la candidature. "Les CV des Américains sont très compétitifs",
avertit Cynthia Billeaud, directrice des ressources humaines du groupe Dinex,
l'empire de Daniel Boulud. Le groupe qui réunit les restaurants Daniel, DB
Bistro Moderne, Café Boulud, compte environ 90 % d'Américains dans ses
effectifs. En dépit de l'aura de la gastronomie française aux États-Unis,
la 'French Touch' ne suffit pas pour être recruté. Mieux vaut donc ne
pas tout miser là-dessus. "Les atouts que l'on recherche sont une très
bonne formation et un bon temps de travail chez un très bon chef. Ce n'est
pas en dansant d'un restaurant à l'autre que l'on peut apprendre, dit
Daniel Boulud. Et d'ajouter : Il y a d'excellents chefs dans les
régions de France qui font
un travail extraordinaire même s'ils ne font pas du foie gras ou de la truffe
blanche."
Vaut-il mieux arriver à New York au tout
début de sa carrière ou avec un bagage professionnel ? Tous les cas de
figure semblent être possibles, même s'il vaut mieux avoir un peu de
bouteille et avoir travaillé pour d'autres chefs d'abord. "L'idéal
est d'arriver vers 25 ans. On peut commencer comme chef de partie, puis devenir
sous-chef, senior sous-chef, et chef . Si l'on arrive trop jeune, on ne peut pas
évoluer aussi vite. Après, il est peut-être plus difficile de s'adapter",
explique Daniel Boulud, qui est lui même venu aux États-Unis à
cet âge-là. Laurent Tourondel a travaillé pour Joël
Robuchon ainsi qu'au restaurant 3 étoiles Michelin, le Relais &
Châteaux Troisgros, avant de débarquer outre-Atlantique. Nicolas Cantrel,
chef du restaurant Bobo, a passé neuf ans au service de 'Monsieur Ducasse'
avant de venir pour l'ouverture du restaurant d'Alain Ducasse Mix, qui a fermé
depuis.
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Nations-Unies de la gastronomie
Il existe une fenêtre
d'ouverture pour les plus motivés, Français et internationaux : le groupe
Dinex veut accueillir des profils variés et cosmopolites. "La clientèle
new-yorkaise est très à l'écoute des différentes cultures",
dit Cynthia Billeaud. Le restaurant Daniel est d'ailleurs une sorte de Nations-Unies
de la gastronomie, de nombreuses nationalités étant représentées.
Le groupe Dinex a un programme qui permet d'offrir une structure au candidat étranger.
Après un entretien téléphonique positif, Benjamin Tremauville a été
invité à passer trois jours à New York (le billet n'était
pas payé) pour un 'shadowship' ou il a observé chaque geste, dans l'ombre
(shadow, en anglais) de l'employé, la rôtisserie étant sa spécialité.
Pendant ces trois jours, ses compétences techniques ont été testées
et il a suivi ensuite un entretien de personnalité. Cette étape préliminaire
permet de savoir si le groupe correspond aux attentes du candidat et vice versa,
et ainsi de limiter les risques pour les deux parties.
Si les profils internationaux
sont appréciés, la question du visa est souvent un frein pour les employeurs.
"Depuis le 11 septembre, les visas sont délivrés au compte-gouttes",
explique Cynthia Billeaud. Pour les gens dans l'industrie de la restauration, il
existe une large palette de visas. Le plus courant est le J1, un visa de dix-huit
mois, accordé pour une première expérience aux États-Unis.
Laurent Tourondel, chef français aux États-Unis depuis quatorze ans,
à la tête de l'empire BLT (Bistro Laurent Tourondel) explique être
passé "par toutes les lettres de l'alphabet" (tous les types de visas)
au cours de sa carrière américaine. Il est maintenant citoyen américain.
Lost
in translation
La langue est ensuite une
barrière qui pousse souvent à postuler à des offres en dessous
de vos qualifications et il faut faire preuve de flexibilité. "À
cause notamment de la barrière de la langue, il est indispensable de redescendre
un peu de son grade, pour apprendre et comprendre", dit Daniel Boulud. La parade
? Londres représente une excellente première étape pour tester sa
capacité à s'adapter à l'étranger. "Si l'on ne réussit
pas à Londres, ce n'est pas compliqué de rentrer en France, tandis qu'aux
États-Unis, ça l'est déjà un peu plus", explique Xavier
Herit, bartender au restaurant Daniel. Laurent Tourondel conseille également
Londres comme 'tremplin' pour apprendre la langue. Il y a fait un séjour initiatique
dont il garde un très bon souvenir.
L'installation
Viennent ensuite les 'joies'
de l'installation à New York : trouver un appartement dans la jungle new-yorkaise
lorsque l'on n'a pas un gros budget relève du parcours du combattant. Entre
les sites de colocation tels que Craigslist ou les appartements avec frais d'agent,
mieux vaut faire preuve de pugnacité. Le doux nom d''open house' ne renvoie
pas à la notion d'hospitalité mais à une réalité bien
plus difficile : une cinquantaine de personnes postulent pour une même chambre.
La chambre en question s'avère bien souvent être un placard lorsqu'elle
est située à Manhattan. La colocation est tout de même la solution
la plus fréquente : le jeune Benjamin partage un deux pièces avec un autre
jeune du restaurant Daniel. Laurent Tourondel raconte avoir habité chez son
patron à ses débuts américains, tandis que Nicolas Cantrel se souvient
de ses débuts mémorables sur un matelas gonflable dans le Queens. Au nombre
des autres réjouissances : ouvrir un compte en banque, avoir un abonnement
de portable et un numéro de sécurité sociale.
Mais la difficulté principale
est d'adapter sa cuisine au palais américain "différent, plus sucré",
selon Laurent Tourondel. D'autant plus que la clientèle new-yorkaise est extrêmement
exigeante, renchérit Nicolas Cantrel. "Il m'arrive de changer quasiment
le menu pour une seule personne." Son restaurant Bobo étant situé
dans le West Village, un quartier chic de New York, il a dû adapter sa cuisine
à la clientèle de mannequins pour qui le beurre et la crème ne
sont pas une option. "Il n'était pas évident d'élaborer le menu",
soupire-t-il. En dépit de toutes les difficultés, le jeu semble en valoir
la chandelle. "New York, on n'aime pas ou on adore. Vous savez tout de suite
si c'est fait pour vous ou pas", dit Nicolas Cantrel avec un large sourire.
Le coup de foudre semble faire oublier toutes les galères et même le
matelas gonflable paraît douillet…
Laure
Guilbaut
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Complément d'article 3059p34
Les différents types de visas :
Le J1, un visa de dix-huit mois, pour
une première expérience aux États-Unis. Le programme de formation (‘management
training program’) proposé par le J1 est le plus approprié pour les étudiants ou
professionnels qui ont une expérience limitée. Pour l’obtention de ce visa, le
candidat doit trouver une entreprise qui va l’accueillir et le sponsoriser.
L’entreprise doit être accréditée par un organisme reconnu par l’Etat (du type
YMCA, ISE). Le coût du visa d’environ 2 100 $, qui couvre les frais médicaux,
est à la charge de l’employeur, du candidat, ou bien des deux parties. Il s’agit
d’un échange culturel pour développer des compétences. Attention, ce visa n’est
pas renouvelable.
Le O1. Beaucoup plus rare, le O1 est décrit par l’administration américaine
comme “le visa des gens de renommée nationale ou internationale dans le domaine
des lettres, sciences, arts” (en bref, le visa des stars). “Celui-ci est
davantage justifiable pour les chefs, chefs pâtissiers, et sommeliers”, dit
Cynthia Billeaud. Il est valable pendant trois ans, renouvelable.
Le H3 également un ‘management trainee visa’, il s’agit d’un visa de deux ans,
pour un niveau d’expérience plus élevé. Il y a une obligation de rentrer dans le
pays d’origine à la fin de cette période.
Le H1B requiert douze ans d’expérience minimum ou bien cinq ans d’expérience,
ainsi qu’un MBA. Il donne l’opportunité de faire une demande de carte verte, est
soumis à des quotas, 65 000 personnes par an. “En 2007, ce quota a été atteint
en dix jours. Il faut ensuite s’en remettre à un tirage au sort”, dit Billeaud.
Adresses web des établissements cités et
organismes utiles
Daniel Boulud :
www.danielnyc.com
Laurent Tourondel :
http://www.bltrestaurants.com
Nicolas Cantrel :
http://www.bobonewyork.com
Trouver un organisme :
http://www.internationalymca.org/TraingAndInternships/Home.shtml
http://www.internationalstudent.com/
Le visa :
http://www.amb-usa.fr/consul/niv/typevisas/default.htm
Se loger :
http://newyork.craigslist.org/
Avec frais d’agent :
http://www.nyhabitat.com/
http://www.urbanliving.net/
Trouver son bureau pour obtenir un numéro de
sécurité sociale :
https://secure.ssa.gov/apps6z/FOLO/fo001.jsp
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L'Hôtellerie Restauration n° 3059 Hebdo 13 décembre 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE