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du 29 novembre 2007
RESTAURATION

GRÂCE AU MICHELIN TOKYO

Joël Robuchon, le chef le plus étoilé au monde

Il ne voulait plus d'étoiles, plus de restaurant. Sortir de sa cuisine et en profiter pour voyager. Il a été l'un des pionniers dans la capitale nipponne. Son parcours cosmopolite a fait de lui celui qui arbore le plus d'étoiles au monde. Rencontre.
Propos recueillis par Nadine Lemoine


Joël Robuchon a récolté 6 étoiles à Tokyo et 3 à Las Vegas en 8 jours.

L'Hôtellerie Restauration : Tokyo est devenue la ville la plus étoilée de la planète, et vous êtes le chef le plus étoilé au monde. Combien d'étoiles ?
Joël Robuchon : 17. C'est pas mal pour quelqu'un qui avait dit qu'il ne voulait plus d'étoiles. Mais ce n'est pas moi qui ait décidé. Avec 150 restaurants étoilés, Tokyo devient la ville la plus étoilée au monde, et donc la capitale de la gastronomie mondiale par la quantité. Pas par la qualité, parce qu'il faudrait que ce soit la ville où l'on trouve le plus de 3 étoiles. Paris reste en tête.
Mon réel bonheur d'aujourd'hui, c'est que L'Atelier a obtenu 2 étoiles. J'ai même plus de joie d'avoir 2 étoiles à L'Atelier que 3 étoiles au Château. Ça peut paraître surprenant, mais le concept de L'Atelier, c'est mon bébé, et je suis heureux que le Michelin soit le premier à avoir reconnu le concept.
Il avait été reconnu au début par un grand journaliste du New York Times, M. Apple, disparu aujourd'hui, quelques semaines après son ouverture à Paris, en 1991. Il a écrit :
"J'ai vu la cuisine du futur, le restaurant du futur." La majorité des journalistes français n'avait rien compris. Ce sont les étrangers qui ont compris les premiers. Ce n'est pas nouveau. L'Atelier à Paris n'a qu'une étoile, mais c'est le restaurant qui y est le plus fréquenté avec une moyenne de 160 couverts par jour avec 36 places. Et on a sûrement la plus belle clientèle de la capitale. On a souvent dit - moi aussi - que le Michelin avait une image ringarde. Il prouve ces derniers temps qu'il est en train de se moderniser et de prendre de l'avance sur tous les autres guides français.

En deux semaines, vous venez de décrocher deux fois 3 étoiles, à Las Vegas et Tokyo. Selon vous, quel est l'impact de Michelin si loin de l'Europe ?
Au départ, Michelin n'était pas accepté aux États-Unis. Aujourd'hui, il a réussi à s'implanter, et les étoilés voient un impact important sur la clientèle. Ça signifie qu'il est reconnu dans le monde entier. Michelin amène 20 à 30 % de clients en plus partout dans le monde. Tokyo, on ne sait pas encore. Mais c'est vrai que le téléphone n'arrête pas de sonner. Il faut dire que nulle part dans le monde le guide a été autant médiatisé. On n'a jamais vu autant de presse. On ne parle que de ça. Je pense que c'est la ville où il devait être.

Quand vous êtes-vous intéressé au Japon ?
J'y viens depuis 1976. C'est Paul Bocuse qui m'y a envoyé, en 1976, effectuer une démonstration à l'école Tsuji. Je suis l'un des pionniers ici avec Raymond Oliver, Michel Guérard, Paul Bocuse, Louis Outhier, Jean Delaveyne. Je suis venu très jeune. Je suis l'un de ceux qui est s'est rendu le plus souvent dans ce pays. Je fais partie des cuisiniers qui ont amené l'estragon, l'échalote, le cerfeuil, la ciboulette, la moutarde, parce que ça n'existait pas. Avec Alain Chapel, on a été les premiers à amener la truffe fraîche.
Ce n'était pas le Japon d'aujourd'hui : les chefs d'alors étaient studieux, ne prenaient jamais de vacances. C'était un déshonneur pour eux de s'absenter de l'entreprise.  


Jean-Luc Naret et les 8 nouveaux 3 étoiles de Tokyo, dont Alain Verzeroli, chef du Restaurant Joël Robuchon (4e en partant de la droite).

La clientèle japonaise ?
Elle fréquente énormément les restaurants européens et attache beaucoup d'importance à la cuisine. Le Japonais n'a pas d'a priori. Au début, il se laisse influencer par tous les grands noms et il s'y rend. Mais il est prêt à tout essayer et se fait son jugement. Il sait reconnaître ce qui est bon, ce qui est beau. Mon conseil aux cuisiniers ? C'est bien de venir ici, en commençant par passer deux ou trois jours dans un riokan, où ils vont découvrir la cuisine Kaseiki, s'habiller en kimono, dormir sur le tatami, prendre des bains dans les eaux des volcans… pour percevoir un peu la culture japonaise, pleine de symboles, de rituels. Quand on a entrevu ça, on a une autre vision du pays. On n'arrive pas à le découvrir… À chaque fois que je viens, je vois que j'en
sais moins qu'au début.


De gauche à droite : Paul Bocuse, Joël Robuchon, Marc Haeberlin, Michel Troisgros, Pierre Gagnaire et Guy Savoy.

Engagez-vous des Français ?
C'est très difficile avec les visas, que ce soit aux États-Unis ou ici, au Japon. Il y a 6 Français à Las Vegas. Ils sont tous sur mon visa. Il faut prouver qu'ils ont travaillé longtemps avec moi, occupé une fonction importante, et que j'ai absolument besoin d'eux. Si demain mon visa tombe, ils doivent tous partir. Obtenir des permis de travail au Japon, c'est de plus en plus compliqué. Mais pour un cuisinier japonais, avoir aussi un visa en France, c'est quasiment mission impossible.
Pour moi, les meilleurs ouvriers aujourd'hui, les plus professionnels, ce sont les Américains. Ça étonne, mais pour moi c'est vrai. Demain, ils auront peut-être une autre profession, mais aujourd'hui, quand ils sont cuisiniers, ils le font avec rigueur. 

Le niveau de la cuisine à Tokyo ?
Les restaurants, les concepts, les décorations…, il se passe vraiment quelque chose aujourd'hui au Japon. On sent une révolution dans la cuisine et il existe un véritable esprit de compétition. Le niveau de la cuisine française aussi est très, très élevé. La cuisine espagnole est de très haut niveau également. Pour moi, c'est même à Tokyo qu'on trouve les meilleurs restaurants italiens. Et dans la cuisine japonaise, on voit des choses extraordinaires !
Avant, au Japon, les cuisiniers se succédaient non pas en fonction des compétences mais de l'ancienneté. Il y avait un tel respect de la hiérarchie… Maintenant, c'est fini, mais c'est récent, et on voit arriver des jeunes qui ont du talent et qui sont propulsés, comme ce jeune de 33 ans à Quintessence.
Il y a derrière une réserve de chefs de très grande qualité. Les Japonais sont venus en France depuis une trentaine d'années. Ils ont appris et ça porte maintenant ses fruits. Il n'y a aucune autre ville au Japon qui a ce niveau.

Quelle ville d'Asie pourrait concurrencer Tokyo ?
Hong-Kong est en train de dépasser Tokyo en matière d'architecture, et ça, c'est un signe. De plus, le pouvoir d'achat est le plus fort d'Asie, à mon avis. C'est là qu'au déjeuner, dans mes restaurants, je vois des femmes couvertes de diamants. Là-bas, c'est 16 % d'impôts, et plus vous gagnez d'argent, moins vous en payez. Alors ça se répercute tout de suite sur la consommation. Les gens dépensent. Le prochain guide Michelin devrait être à Hong-Kong avant tout autre ville au monde. Mais je ne donne aucun conseil. zzz22v zzz99

Sortie du Michelin Belgique et Luxembourg 2008

Ce jeudi paraît le Michelin Belgique et Luxembourg 2008 avec sa sélection de restaurants (1 038 en Belgique, 79 au Luxembourg). Pas de remue-ménage dans les étoiles : toujours deux 3 étoiles (De Karmeliet et Hof Van Cleve). En revanche, en 2 étoiles, on note la promotion du restaurant 't Zilte à Mol (11 au total) et un espoir à 2 étoiles : L'Air du Temps, Eghesée à Noville-sur-Mehaigne. treize nouveaux 1 étoile (88 en tout) font leur entrée ainsi que 21 Bib Gourmand. Plus de 750 hôtels, 80 Bib Hôtels et 94 Maisons d'hôte complètent le nouveau millésime. Prix : 19,90 E.


Et du Michelin Nederland 2008

Aux Pays-Bas, 696 restaurants font partie de l'édition 2008 du guide. Comme en Belgique, toujours deux 3 étoiles (Oud Sluis à Sluis et De Librije à Zwolle). Tandis que ça bouge en 2 étoiles avec 2 promus : Ciel Bleu à Amsterdam (Zuid am West) et De Leuf à Ubachsberg. Il y en a maintenant 10 en tout. Cinq 1 étoile et 17 Bib Gourmand entrent dans la sélection 2008.

Pour retrouver d'autres conseils et reportages sur le Japon : cliquez ici

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L'Hôtellerie Restauration n° 3057 Hebdo 29 novembre 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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