du 15 novembre 2007 |
RESTAURATION |
INTERVIEW AVEC L'AUTEUR DE LA 'VIE EST UNE PART DE GÂTEAU' (ÉDITIONS RAMSAY)
PATRICK SCICARD : "TOUT EST POSSIBLE DANS NOS PROFESSIONS"
Il est jeune, pressé et séduisant. Il est curieux de tout, n'a peur de rien. Il a envie d'avoir envie et croque la vie à pleines dents (les macarons aussi). Une vie qu'il n'avait probablement jamais imaginée aussi riche. Riche de rencontres avec des hommes et des femmes uniques en leur genre. De Johnny Hallyday, Salvador Dali, Jean-Claude Brialy, Antoine de Caunes, Liz Taylor en passant par René Traversac, Gaston Lenôtre, Paul Dubrule, Gérard Pélisson ou bien encore Félix Coto, Philippe Mazetti, Serge Perrot… Patrick Scicard connaît un fabuleux destin. Mais cet ancien élève de l'école hôtelière de Paris Jean Drouant qui préside aujourd'hui le directoire de la célèbre maison Lenôtre est surtout d'une fidélité absolue à son père, Aristide, pâtissier à Montfort-l'Amaury. Sans tomber pour autant dans le pathos, il raconte un rêve devenu réalité. Rêve qui selon lui peut se réaliser aujourd'hui encore.
Propos recueillis par Claire Cosson
L'Hôtellerie
Restauration : Pourquoi un livre
maintenant ?
Patrick Scicard,
président du directoire de Lenôtre :
J'ai 52 ans, je compte bien
travailler encore au moins vingt ans. Loin de moi l'idée donc d'écrire
une biographie. Simplement, les circonstances de la vie ont fait que c'était
le moment opportun pour moi de dresser un bilan. Il est parfois bon de regarder
en arrière pour aller de l'avant. Je voulais également montrer aux jeunes
que tout est possible dans nos professions !
Tout est possible ? Y compris pour les jeunes
qui se lancent dans le secteur aujourd'hui ?
Bien sûr ! L'hôtellerie et la restauration
offrent un avenir sans limites aux jeunes qui veulent s'investir. Regardez les marchés
colossaux qui s'ouvrent en Chine, par exemple, ou bien en Inde et ailleurs. Il faut
savoir saisir sa chance, oser pousser la porte et donner de soi.
Quels conseils donneriez-vous aux jeunes ?
Ne négligez sous aucun prétexte les
langues étrangères. Faites preuve de modestie à la sortie des écoles
en acceptant les postes que l'on vous propose. Une carrière se construit étape
par étape… N'oubliez jamais de faire grandir vos collaborateurs. Ayez
de la considération, prenez soin d'eux ! Car sans eux, vous n'êtes rien.
Soyez sincères parce que l'hypocrisie ne paie jamais. Et surtout, même
avec du talent, restez humble.
Quel est votre meilleur souvenir
?
Sincèrement, j'en ai des dizaines…
mais ce qui me fait le plus de plaisir, c'est de savoir que ceux qui ont déjà
lu mon livre l'ont aimé.
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Au cours de votre vie professionnelle, vous avez croisé
des centaines de personnalités hors du commun. Quels sont les personnages
qui vous ont le plus marqué ?
Difficile de répondre à cette question
tant j'ai rencontré de gens brillants et généreux. J'avoue toutefois
que j'ai été bluffé par le perfectionnisme de René Traversac,
fondateur de Châteaux Hôtels. Pour décider de l'emplacement d'un
lit - dont il voulait qu'ils aient tous la meilleure vue possible -, il s'allongeait
par terre puis dessinait à la craie, sur le sol, le lieu exact où il
devait être installé. Même démarche pour installer à
la bonne hauteur le porte-papier toilette ou bien encore les cendriers, les miroirs.
J'ai beaucoup appris avec cet homme. Tout comme avec les cofondateurs du groupe
Accor, Paul Dubrule et Gérard Pélisson,
que
j'ai découverts avec le temps. Voilà un tandem inoubliable qui m'a fait
autant grandir dans ma vie d'homme que mûrir dans ma vie professionnelle.
Sans oublier leur sens de l'humour absolument fabuleux.
Ils sont géniaux mais ne se prennent pas au sérieux !
S'agissant des artistes, c'est Jean-Claude
Brialy qui m'a le plus marqué. C'était un grand monsieur d'une générosité,
d'une douceur, d'une intelligence incroyable.
Quel est l'épisode le plus cocasse de votre
vie, dont vous vous souviendrez toujours ?
C'est une anecdote mais je ne l'oublierai jamais.
La scène se passe au Meurice, à l'occasion d'un stage. Je suis affecté
à la conciergerie auprès de M. Gillet, membre des Clefs d'or.
Le téléphone sonne. Je décroche : "Bonjour monsieur, pouvez-vous
me dire si mon mari est venu chez vous, mercredi dernier ?" Je fonce consulter
le cardex sans en référer à personne. Et au final, je lui confirme
la venue de son époux. Mon chef, M. Durand, assiste à la scène.
Deux minutes plus tard, il m'entraîne dans son bureau. Primo : lorsque quelqu'un
vient dormir chez nous plutôt que chez sa femme, c'est qu'il a de bonnes raisons
de le faire. Secundo : nous sommes comme un curé au confessionnal, nous ne
répétons rien à personne, excepté au bon Dieu. Tertio : ce
que tu as fait est très grave. Mais c'est à ça que sert ton stage.
Si tu recommences, tu es viré et tu ne remettras plus les pieds dans un palace.
Si ça te sert de leçon, peut-être en dirigeras-tu un jour.
zzz22v
HISTOIRE D'UN P'TIT
GARS "La vie est une part de gâteau"
Quand on est natif de La Queue-lez-Yvelines (78), fils du pâtissier du village, pas très attentif à l'école et plutôt porté sur les éclairs au chocolat et l'odeur de la brioche que sur les équations et les fables de La Fontaine, pas évident, cinquante ans plus tard, d'être le président de Lenôtre, traiteur mondialement connu, propriété du groupe Accor, fier de ses 120 ME de chiffre d'affaires. Patrick Scicard vit sa vie comme un rêve, même
si elle tourna parfois au cauchemar comme cela nous arrive à tous. Et il
a bien fait de nous en faire part dans ce livre au titre gentiment proustien, La
Vie est une part de gâteau. |
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L'Hôtellerie Restauration n° 3055 Hebdo 15 novembre 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE