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du 13 avril 2006
VINS

lors d'un débat au sirest des restaurateurs et des acteurs du vin témoignent

LUDIQUE ET AU JUSTE PRIX, LE VIN A ENCORE DE L'AVENIR EN RESTAURATION

Au Vin Chai Moi, dans le XXe arrondissement de Paris, Luc Menier sort le vin des sentiers battus en le servant notamment avec des sirops à l'apéritif, et ça marche. Au Relais Napoléon à Compiègne (60), Christian Aguzzoli a augmenté ses ventes de vin de 30 % en élargissant sa gamme et en créant le Smart Bag. À L'Auberge Saint-Roch, dans le Ier arrondissement, Stephan Martinez n'hésite pas à changer une bouteille de vin si la référence ne séduit pas totalement le client… Chez eux, une certitude, le vin est sur toutes les tables.   
Débat animé par Sylvie Soubes


C'est dans le cadre du Sirest, à Paris, que s'est déroulé ce débat sur le vin en restauration. Intervenants de gauche à droite : Samuel Benis, Claire Yverneau, Stephan Martinez, Luc Menier, Christian Aguzzoli, Francis Sellam et Bernard Quartier.

Luc Menier :
J'ai décidé de me lancer en choisissant une approche ludique. Je crois que pour sensibiliser les gens au vin, il faut commencer par les mettre à l'aise. Pour moi, ça commence par un endroit convivial, chaleureux, avec une très bonne cuisine. L'idée étant de faire consommer le vin aussi bien à l'apéritif qu'après le repas. Au Vin Chai Moi, le vin est proposé au verre, en bouteille, en carafe. Chaque personne qui n'a pas fini sa bouteille peut repartir avec. Au moment de l'apéritif, j'ai cherché à jouer sur le gustatif et la mémoire olfactive. Nous proposons le vin avec une association de sirop : vin rouge chocolat-menthe, poire-airelle et vin rosé. Il y en a pour tous les goûts. Ce qu'il faut, c'est attiser la curiosité et faire goûter. Nous avons une palette d'environ 70 cocktails. Un jeu s'installe avec les clients. On demande aux gens de retrouver les arômes, on crée une animation autour des cocktails. /font>

Francis Sellam :
Effectivement, dès qu'il y a un aspect ludique, on arrive à capter notre public et à transmettre un message. Aujourd'hui, l'approche que nous avons se fait au travers des sensations organoleptiques. On va d'abord utiliser des produits que les jeunes connaissent comme le coca-cola ou l'Orangina. On fait des tests à partir de ces produits, et ensuite on transfère le principe au vin. On travaille aussi sur la fabrication. Toutes les classes de première font leur vin. Les approches se font aussi par internet. /font>

Samuel Benis :
Chez Nicolas Feuillatte, nous avons également travaillé l'aspect ludique avec le One Four. Ce sont deux quarts (20 cl). En brut, l'habillage est bleu et en rosé, il est rose. Nous avons voulu désacraliser la consommation du champagne et cibler des consommateurs plus jeunes et plus branchés. Ce format s'adresse aux soirées à thème, il inspire d'autres modes de consommation. Il y a une dragonne et on peut se promener avec la bouteille à la main.

Bernard Quartier :
Le vin et les restaurants sont très liés. Personnellement, je crois que si le vignoble français est à ce point diversifié, c'est grâce à la restauration. C'est vrai aussi qu'il faut sans doute une lecture plus moderne du vin. Le fait qu'on peut ramener sa bouteille ou le développement du vin au verre sont de réels progrès qui vont dans le bon sens.

Christian Aguzzoli :
Au Relais Napoléon, nous avons augmenté le nombre d'appellations et on est monté aussi en qualité. Le vin coûte cher, c'est vrai. C'est pourquoi nous avons ouvert une cave dans le hall de l'établissement. Beaucoup de restaurants ont des problèmes parce qu'ils ne peuvent pas assumer un stockage. Est-ce que les distributeurs seraient prêts à faire du dépôt-vente ? Je ne sais pas, mais je pense que c'est une piste à creuser. Il faut que les restaurateurs puissent continuer de faire découvrir le vin. Quant à Smart Bag, c'est un concept que j'ai lancé après avoir constaté que la clientèle suisse partait volontiers avec leur bouteille qui n'était pas terminée. Comme tout bon Français, au début, je trouvais ça un peu vulgaire comme démarche. Et à force d'être choqué, je me suis rendu compte que c'est moi qui avais tort et eux raison. J'étais là à trouver le vin cher et paradoxalement j'étais incapable de repartir avec la bouteille qui n'était pas terminée. J'ai donc pensé à ce concept de sac à vin, un sac intelligent, qui porte un nom. Il faut qu'il y ait une pédagogie du restaurateur. Ce n'est pas au client de demander, c'est au restaurateur de proposer. J'ai mis en place ce concept dans mes trois établissements. Depuis l'élargissement de ma gamme et Smart Bag, j'ai augmenté mes ventes de vin de 30 % en 2 ans.

Stephan Martinez :
Le midi, à L'Auberge Saint-Roch, ce sont des hommes d'affaires. Ils vont sur des gammes légères, comme le gamay. Les seuls clients qui emportent les bouteilles, ce sont les étrangers.

Luc Menier :
Je ne suis pas trop d'accord avec une large gamme. Avoir 70 ou 120 références, ce n'est pas pour Vin Chai Moi. Nous avons une carte d'environ 40 références. La diversité s'installe automatiquement parce qu'on fait tourner les vins. On peut faire une action avec 60 bouteilles. On a une carte des vins atypique. Tous les vins sont expliqués par nos soins. On n'a pas de bordeaux, on a un seul bourgogne. On travaille principalement avec la vallée du Rhône, le Languedoc, les vins de pays. Aujourd'hui, après quelques mois d'activité, on a instauré une certaine confiance, et on vend ce qu'on veut. Nous avons aussi une petite carte de grands vins : le principe, c'est d'acheter une bouteille à 50 E et de la revendre à 70 E maximum. Une bouteille achetée 110 E sera revendue à 130 E. L'important, c'est de donner au client l'occasion de boire une grande bouteille et de se faire plaisir.

Samuel Benis :
Même si le brut sans année représente 80 à 85 % des ventes, nous avons une gamme très large qui permet de bien adapter le vin aux besoins de l'établissement. Il faut pouvoir répondre à la diversité de la restauration. Nous avons une grande variété d'approvisionnements et cela nous permet d'offrir une palette de produits. Il y a des restaurateurs qui ne savent pas ce qu'ils vont faire. On discute alors avec eux, on regarde avec quel coefficient ils veulent pratiquer, dans quelles fourchettes de prix ils veulent se situer, s'ils veulent mettre l'accent sur un champagne d'apéritif ou de table…

Attention au prix !

Claire Yverneau :
Une des grosses problématiques du champagne, c'est le prix. Ce qui tue les ventes, ce sont souvent les coefficients. Les restaurateurs rémois l'ont compris. Ils vendent énormément de champagne, mais ils pratiquent un coefficient qui est très faible. Et si l'on raisonne en volume annuel, ils gagnent bien leur vie. Si l'on veut vendre du champagne, il faut être raisonnable sur les coefficients.

Francis Sellam :
Comment faire passer le message ? Je le vois, à Jean Quarré, on fait de plus en plus appel à nous pour donner une vision du marché. On s'associe d'ailleurs avec des groupes, comme Nicolas Feuillatte, ou avec les comités interprofessionnels pour utiliser les nouveaux produits. Les élèves comme les adultes qui viennent en formation chez nous repartent avec une idée précise du marché. On sort de plus en plus des connaissances généralisées. Ces connaissances, elles sont accessibles dans les livres. Ce qu'il faut, c'est donner des éléments nouveaux, montrer les solutions qui existent. Le principe du Smart Bag entre tout à fait là-dedans.

Stephan Martinez :
Le soir on frôle les 50 % de clientèles étrangères. La clientèle japonaise connaît le vin et sinon, c'est le prix qui fait la différence. Les Américains restent très chardonnay lorsqu'ils prennent du blanc. Les Italiens et les Espagnols sont sur des vins plus charpentés. On apporte tous les mois un vin nouveau. On fait tourner. Sur des grands vins, on applique un coefficient de 2. zzz46v zzz46d zzz22v zzz46f zzz46o

Le vin au verre, une solution miracle ?

Luc Menier :
Pour le déjeuner, c'est la solution adaptée. Aujourd'hui, il n'y a pas une seule personne qui ne prend pas un verre de vin, on met aussi le vin dans la formule en faisant des associations mets/vin. On est entre 10 et 15 vins au verre. Tous les vins de la carte peuvent être servis au verre.

Francis Sellam :
On parle prix de vente, on leur explique que tout ce qui est liquide présente des marges plus importantes parce que ce n'est que du stockage. On travaille en collaboration avec le professeur de gestion. À l'heure actuelle, on parle marge, chiffre d'affaires, volumes. Avant, c'est vrai que tout tournait autour des coefficients. Je voudrais revenir sur la carte. Je pense qu'il faut retravailler le classement des vins sur les cartes, les présenter autrement. Qu'il faut sortir de la rigueur de la sommellerie à l'ancienne pour aller vers le public.

Luc Menier :

Il faut trouver d'autres manières de parler du vin. Il faut trouver des solutions pour que le consommateur soit à l'aise, c'est certain. Le vin au verre, je le présente par son cépage dominant. Sur un mâcon, je vais d'abord parler chardonnay, sur un minervois je vais évoquer la syrah ou le grenache. C'est aussi une approche pédagogique. Les gens connaissent un peu les noms de cépage, mais ils ne savent pas à quoi ça correspond. En commençant par quelque chose qu'ils connaissent, ça permet de leur donner des repères. /font>

Stephan Martinez :

On ne peut pas forcer les gens à boire du vin quand ils n'en veulent pas. Par contre, le restaurateur doit aller au-devant d'eux. À L'Auberge Saint-Roch, ça ne nous embête pas d'ouvrir une bouteille, et si ça ne plaît pas, eh bien on change le vin. L'important, c'est que le client soit content, qu'il ressorte satisfait de notre établissement.

Ont participé à cette table ronde
- Samuel Benis, Champagne Nicolas Feuillatte
- Christian Aguzzoli, Au Relais Napoléon à Compiègne (60)
- Stéphan Martinez, l'Auberge Saint-Roch à Paris (Ier)
- Luc Menier, Vin Chai Moi à Paris (XXe)
- Bernard Quartier, président de l'Institut pour le développement des cafés et des cafés-brasseries
- Francis Sellam, professeur de restauration au lycée Jean Quarré (Paris)
- Claire Yverneau, Champagne Nicolas Feuillatte

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L'Hôtellerie Restauration n° 2972 Hebdo 13 avril 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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