A cause des crises de la listeria, de la vache folle, de la dioxine, de la pollution des nappes phréatiques..., le bio prend le dessus. Il est présent sur les affiches, dans les rayons des grandes surfaces. Il fait son entrée en restauration sociale et commerciale, dans les établissements des plus branchés aux plus traditionnels. Le bio n'est plus réservé ni aux écolos ni aux végétariens.
"La culture biologique est née en Suisse peu avant la Seconde Guerre mondiale"
Aujourd'hui, le bio est partout. Il a le vent en poupe. Les acteurs de l'agriculture biologique ont décidé de profiter de cet engouement pour organiser, avec le soutien du ministère de l'Agriculture et de la Pêche, une véritable campagne d'information pendant la semaine du 20 au 27 mai dernier : le Printemps Bio. Comme pour la Semaine du goût, de nombreuses animations et dégustations ont été organisées partout en France. La première édition de cette manifestation nationale avait pour but d'informer les consommateurs mais aussi de fédérer la profession autour d'une dynamique collective. Quelques semaines avant le Printemps Bio, Monoprix & Prisunic menaient aussi campagne pour le bio sur le thème "Le bio a sa place en ville". Ce slogan a couvert bon nombre d'espaces publicitaires, à Paris ou ailleurs. C'était une bonne façon d'attirer l'attention de ses clients sur une gamme de 70 références bio, du jus de pruneau au poulet à l'indienne, en passant par le café, l'huile d'olive et les pâtes. Le Monoprix de la rue de Rennes à Paris et celui de Boulogne sont allés encore plus loin dans la démarche bio, puisqu'ils se sont dotés d'un bar bio approvisionné par la société Odji (cf. page 40). La chaîne de magasin Carrefour, de son côté, vend annuellement 6 millions de pains bio. Chez Casino, on sélectionne actuellement par voie de coupon-réponse les 5 000 clients experts qui testeront bientôt les produits et recettes bio de la marque. Le phénomène semble émerger, pourtant il ne date pas de l'ère de la vache folle. La culture biologique est née en Suisse un peu avant la Seconde Guerre mondiale. En France, elle apparaît après la guerre avec des mouvements de consommateurs, soucieux d'hygiène de vie, et des paysans de plus en plus dépendants de l'industrie qu'ils nomment "agriculture chimique". La première loi visant à réglementer l'agriculture biologique ne fut votée qu'en 1980. Aujourd'hui, l'agriculture biologique est soumise à une réglementation européenne qui entre en vigueur en août 2000. Cette dernière est jugée trop souple par les producteurs bio français, la réglementation française étant la plus exigeante.
Une réglementation très stricte
Les produits bio, pour éviter les dérives, sont soumis à des conditions de production
très rigoureuses. Ces règles sont consignées dans des cahiers des charges établis par
les professionnels et homologués par l'Etat français et/ou l'Union européenne. Le
respect de ces cahiers des charges est vérifié par des organismes certificateurs
indépendants qui contrôlent chaque unité de production ou de transformation de produits
biologiques. Ce contrôle payé par le producteur ou le transformateur est effectué au
moins une fois par an. Il aboutit à la certification des produits qui peuvent être
identifiés par le logo AB. Le logo AB est pour le consommateur ou le restaurateur
la garantie que les produits qu'il achète ont été élaborés en respectant des cahiers
des charges rigoureux. Les agriculteurs bio s'interdisent d'utiliser des pesticides,
fongicides et engrais chimiques de synthèse. Ils pratiquent une rotation des cultures
afin de respecter l'équilibre des bactéries. Ils sèment des engrais verts comme les
algues marines, des débris végétaux ou épandent du fumier, du guano, de la poudre de
corne ou de sabot... Pour lutter contre les parasites ou les mauvaises herbes, ils mettent
en uvre des méthodes qui mobilisent une main-d'uvre importante (désherbage
mécanique ou thermique, protection des cultures contre les pucerons par des
coccinelles...). Les agriculteurs bio nourrissent leurs animaux essentiellement avec des
aliments biologiques (90 à 100 % selon les espèces). Ils leur assurent bien-être, dans
des bâtiments d'élevage, et accès au plein air. Ils limitent le recours aux
antibiotiques (plus de deux traitements par an retirent à l'animal sa qualité bio). Les
thérapeutiques alternatives, notamment l'homéopathie, sont fréquemment utilisées. Ce
type de culture et d'élevage demande beaucoup d'attention. Il exige, plus que tout autre
observations et préventions. Produire en bio n'est pas une solution de facilité. Mais
les agriculteurs et éleveurs bio ont en commun le souci de protéger la planète, de
rechercher la diversité dans leur production et de remettre au goût du jour des
variétés et des espèces peu communes ou oubliées. Il existe aujourd'hui plus de 2000
produits biologiques.
Une progression fulgurante
Malgré des prix plus élevés, la demande de produits bio en France et dans les autres
pays européens ne cesse de progresser. La production est soutenue par le ministère de
l'Agriculture et de la Pêche. En 1997, ce dernier a lancé un plan de développement pour
parvenir à un million d'hectares convertis en bio en 2005 (soit seulement 1 % des
surfaces agricoles). Entre 1995 et 1998, le nombre d'exploitations en agriculture
biologique s'est accru de 75 % et les surfaces qui y ont été consacrées de 85 %. En
1999, le mouvement s'est accéléré : 2000 producteurs ont entamé une reconversion à
l'agriculture biologique. 96 millions de francs ont été attribués dans ce cadre. La
France comptait fin 1999, 8 140 agriculteurs et éleveurs bio. Les surfaces cultivées en
bio atteignaient 316 000 hectares, soit 1,1 % des surfaces agricoles. L'objectif fixé
pour l'an 2005 est déjà dépassé. Le cheptel bovin bio a progressé de 40 %, le cheptel
ovin de 50 %, la production de porcs a doublé et la production de poulets bio poursuit sa
progression avec plus de 50 % de mises en place. Un doublement de la production en vins
bio est prévu d'ici 2002. Le sud méditerranéen, l'Ouest et l'Est constituent, depuis
plusieurs années, les trois principaux pôles de développement de l'agriculture
biologique. L'Aveyron et la Lozère comptent plus de 10 000 hectares en agriculture
biologique ou en reconversion. La Loire-Atlantique et le Maine-et-Loire comptent parmi les
premiers départements en élevage bovin et en céréaliculture biologique. En 1999, 4 700
transformateurs de toutes dimensions, de la boulangerie artisanale à l'atelier
industriel, ont élaboré des produits bio conformément au mode de préparation
biologique, ce qui représente un triplement du nombre de transformateurs en deux ans.
Malgré tout cela, la production française reste inférieure à la demande. La France,
pourtant en avance dans ce domaine, il y a vingt ans, s'est laissée distancer par ses
voisins européens notamment l'Italie avec 29 % de la production bio de l'UE et
l'Allemagne (18 %). Le champion européen de reconversion en bio est l'Autriche qui
consacre 10 % de sa surface agricole utile au biologique. Les importations en provenance
des pays tiers sont en pleine progression. Avec les risques que cela comporte. La
direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des
Fraudes mène actuellement une enquête sur un trafic de fausses céréales bio. Des
céréales conventionnelles achetées par un négociant, souvent en France, qui les fait
transporter vers l'Italie, les Pays-Bas ou la Belgique d'où elles reviennent
estampillées du logo AB. De telles pratiques font évidemment du tort au bio et donne des
arguments à tous ceux qui n'y croient pas. La profession réclame donc une obligation de
contrôle qui n'existe pas encore, ni pour les négociants, ni pour les intermédiaires
alors qu'elle est obligatoire pour les producteurs et les transformateurs. Elle tient
d'autant plus à cette obligation de contrôle que la loi européenne apparaît moins
exigeante que la loi française.
De plus en plus de restaurants bio
Plus de 40 % des produits bio se vendent en grande surface et leur part de marché
augmente sans cesse. Le reste est distribué dans les magasins coopératifs Biocoop, les
magasins spécialisés en alimentation naturelle, sur les marchés, les Min, les lieux de
production, voire par correspondance. Les distributeurs spécialistes de la RHF n'ont pas
encore intégré de produits bio dans leur gamme. Les restaurateurs qui ont décidé de
cuisiner du bio en tout ou en partie doivent donc faire appel à l'une ou l'autre de ces
sources d'approvisionnement. Toutefois, certains distributeurs pour magasins spécialisés
en alimentation naturelle livrent désormais la restauration. Par conséquent, à côté
des restaurants bio à caractère un peu écolo, voire austère, se développent de
nouvelles formules. Le bio n'est plus seulement végétarien. Il s'intègre dans la
cuisine traditionnelle, la cuisine du terroir, voire la cuisine gastronomique. Il
s'apprécie dans les crêperies, dans des formules sushis/salades ou en restauration
rapide... Le Leaders Club, qui chaque année met en valeur de nouveaux concepts de
restaurants, a retenu pour l'an 2000, sur sept candidats, un concept de restauration
rapide bio Odji. En fait, la restauration sociale va devancer la restauration commerciale.
Ses clients, soucieux de leur santé, veulent consommer bio. Ainsi, Odji dans le cadre de
son activité traiteur fournit des restaurants d'entreprise en plats bio. Sogeres
Ile-de-France, Provence-Bouches-du-Rhône et Côte d'Azur ont participé au premier
Printemps Bio. Durant cette semaine, Sogeres a proposé à 90 000 de ses convives, sur 5
jours en restauration d'entreprise et à 10 000 enfants en restauration scolaire, des
repas réalisés à partir de produits frais issus de l'agriculture biologique. A cette
occasion, Sogeres a distribué un dépliant de 16 pages sur le bio. Sogeres, la première
entreprise de restauration sociale à développer la découverte du bio, a mis en place en
juin dernier en Ile-de-France trois certifications "pilotes" de "transformation
de produits bio en plats biologiques". Ceci lui permettra de proposer
régulièrement des plats bio avec un agrément officiel, le logo AB. Les Civam du Gard
(Centres d'initiatives pour valoriser l'agriculture en milieu rural) ont imaginé le
concept "Manger Bio". Depuis 1993, dix établissements gardois et héraultais
servent régulièrement des repas bio. Ainsi, en 1999, 300 000 repas bio ont été servis
dans ces établissements. Notez aussi que le lycée Charles de Gaulle à Sète a introduit
le bio dans le référentiel de l'examen bac pro restauration. Au programme : une semaine
de stage de découverte de l'agriculture bio et une semaine de menu bio au restaurant
d'application. Décidément le bio est tendance. On pourrait citer ici beaucoup d'autres
initiatives aussi bien en restauration d'entreprise qu'en restauration scolaire. Habitués
à manger du bio au restaurant d'entreprise, gageons que ces consommateurs voudront aussi
en manger au restaurant. Ne laissez pas passer ces nouvelles attentes de vos clients.
Mettez-vous au bio ! * zzz22t
Printemps Bio : chaque année, la fête du bio pendant une semaine.
La campagne de Monoprix & Prisunic pour le bio.
Le logo AB est une garantie pour
le consommateur.
Manger bio, est-ce bon pour la santé ?A propos du bio, certains sont pour, d'autres contre. Certains y
croient, d'autres n'y croient pas. |
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Il y a bio et bioOn peut classer les produits issus de l'agriculture biologique en trois catégories
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La biodynamie repose sur une idée centrale qui considère la ferme comme un être vivant, un organisme agricole. On parle aujourd'hui d'écosystème. La ferme optimale, équilibrée, est une ferme qui pratique de la polyculture et de l'élevage.
Ainsi, on peut nourrir les animaux avec les céréales et les herbages que l'on produit. En contrepartie, les lisiers des animaux servent d'engrais aux cultures.
En agriculture conventionnelle, schématiquement, un éleveur spécialisé dans les volailles ou les porcs produit des lisiers qu'il n'utilise pas et qui polluent les sols et les eaux ; le producteur de céréales est obligé d'acheter des engrais chimiques également polluants parce qu'il n'a pas de lisier à sa disposition.
Par conséquent, une agriculture diversifiée est une base propice à l'équilibre écologique, agronomique et économique. Les crises actuelles du porc, de la volaille, des ufs montrent bien la fragilité des systèmes en monoproduction. L'agriculture biologique et tout particulièrement l'agriculture biodynamique cherchent à développer au maximum la diversité de leurs productions.
Stimuler les processus d'équilibre du monde vivant
L'introduction d'une préparation d'ortie et de pissenlit dans un tas de fumier
agit comme du levain dans le pain. Elle dynamise sa fermentation afin
d'obtenir des éléments utiles aux plantes.
L'agriculture biodynamique ne "chosifie" pas les plantes, les animaux. Elle ne prend pas une approche industrielle. Elle n'oublie pas qu'elle agit dans le monde du vivant et elle l'approche d'une façon globale. Elle stimule donc les processus d'équilibre de la terre, des plantes et des animaux. Pour cela, elle utilise des "stimulants" en doses infinitésimales préparées à base de plantes, de bouses de vaches, de minéraux... Ainsi, pour optimiser la transformation du fumier, l'agriculteur en biodynamie ajoute quelques grammes par m3 d'un mélange d'orties et de pissenlit. Ce mélange agit un peu comme le levain dans le pain. D'autres préparations sont utilisées pour stimuler la vie du sol ou la fonction chlorophyllienne des plantes. Le tout est de favoriser un équilibre optimal de la plante ou de l'animal en tenant compte des spécificités des sols et des climats.
Tenir compte des rythmes cosmiques
L'utilisation de ces préparations stimule les réactions des plantes aux influences
cosmiques. Les paysans d'autrefois connaissaient bien les influences de la nouvelle lune
ou de la pleine lune. En agriculture conventionnelle, les plantes ne réagissent plus à
ces influences. Un agriculteur en biodynamie sait, par exemple, à quel moment il doit
semer ses radis pour que ce soit les racines qui se développent et non les feuilles ou
les graines.
Une autre façon d'exercer son métier
Un agriculteur qui travaille en biodynamie établit avec les plantes, les animaux et
les hommes, une relation tout à fait différente. Il est attentif à leur croissance,
leur développement et leur bien-être.
Synthèse réalisée en collaboration avec M. Seignez, agriculteur en Limousin.
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L'HÔTELLERIE n° 2673 Magazine 6 Juillet 2000