Il y a quelque chose de changé face à la gare de Valenciennes. Le Grand Hôtel (100 ch. 3*) y tient depuis des lustres une place énorme. Mais dans l'atmosphère de crise de ces dernières années, on s'était habitué à voir sa façade grise se dégrader lentement. Et la voilà requinquée en un pastel presque blanc, un rien italienne de couleur sur les corniches et moulures soulignées de bistre clair. L'immeuble a retrouvé sa fière allure début de siècle. L'intérieur va de pair. 65 chambres sur 100 sont rénovées. "Rénover pour nous signifie tout casser et reprendre l'ensemble de la technique, eau et électricité, sanitaires autant que l'ameublement et la décoration", explique Jean Zillinger. Les couloirs et espaces publics sont repris les uns après les autres. Côté restauration, la salle de restaurant bourgeois avait été refaite voici quatre ans. Les Zillinger, alsaciens implantés de longue date dans le Nord, avaient déjà joué avec le style de leurs origines mêlé au souvenir du Paris des boulevards de fin du XIXème siècle avec du fer forgé et du faux marbre en abondance. Ils y insistent encore plus avec la " Brasserie Hans" attenante, placée sous la protection du populaire Hans in'Schnockoloch.
En fait, la rénovation de la façade en 1997 et la création de la brasserie Hans donnent un aspect spectaculaire à l'opération et soulignent l'accélération du mouvement. Mais le travail avait commencé discrètement depuis plusieurs années. Jusqu'à présent, ces rénovations avaient été exécutées une par une avec l'équipe d'entretien de la maison, des gens compétents "qui savent ce que sont les contraintes d'un hôtel", souligne Jean Zillinger. Une forte accélération sera donnée cette année dans la rénovation des chambres avec appel à une entreprise extérieure pour le gros œuvre. L'objectif est d'en finir ou presque avec les quarante chambres et suites qui restent à reprendre. Il restera au plus dix chambres non rénovées fin décembre. Pourquoi ce coup de collier ? Tant que le taux d'occupation moyen se traînait à 40% de moyenne voire moins, cela pouvait attendre. Le T.O moyen approche à présent les 60% sur un an (65 à 67% ces derniers mois) et il devient très difficile de renvoyer les clients qui ne veulent pas d'une chambre non rénovée. En fait, c'est une toute autre forme de gestion qui prend corps, avec une vraie volonté de progression à la base.
Une dynamique en train
Bien sûr, l'assainissement économique général, le succès de l'usine Sevelnord qui fabrique les monospaces et utilitaires de Peugeot Citroën et Fiat, la bonne santé de la sidérurgie qui a survécu aux restructurations, la bonne nouvelle Toyota, les espoirs que font naître l'université de Valenciennes et son pôle de recherche redonnent un certain tonus à l'agglomération. Le grand retour des Anglais avec une livre plus consistante à la main aident également beaucoup. Mais surtout, l'entreprise est globalement reprise en main. Par son patron d'abord. Jean Zillinger a abandonné à Charles Hurel la présidence du syndicat FNIH de Valenciennes afin de se consacrer à son affaire. Ensuite, il parle avec un bonheur manifeste de l'entrée de sa fille Brigitte Zillinger dans l'affaire. Celle-ci déploie ses talents notamment dans l'action commerciale, les relations publiques et l'animation. Et Jean Zillinger s'est adjoint les services de Jacques Verbaere, directeur de la restauration, ancien du Cornet d'Or (1* Michelin) de Bergues près de Dunkerque devenu enseignant entre-temps. La troïka fonctionne à l'évidence en collaboration étroite. La remise en ordre n'a pas été tout seul, notamment du point de vue du personnel. Il s'agit d'une affaire de 48 à 49 personnes à plein temps, aux deux tiers en restauration. Passer d'une ambiance de déclin résigné à un rythme d'expansion demande une remise en cause des habitudes pour chacun.
Le résultat semble là. Restaurant et brasserie tournent ensemble à plus de 80 couverts par service quelque 200/jour. La progression est de mille couverts/mois ces derniers temps par rapport à la même période de 96/97. A cela s'ajoute une bonne activité des salons et un chiffre d'affaires traiteur en complément. Il y avait une opportunité à saisir.
Côté hôtellerie, on retrouve une clientèle classique dans le Nord faite d'entreprises industrielles et de groupes de week-end. L'hôtel souhaite travailler davantage la clientèle individuelle internationale pour le passage. Voici quelques années, l'hôtel s'est séparé de l'enseigne Best Western. La bannière Logis de France ne correspond pas totalement à ses attentes, et on peut se demander si son image s'adapte bien à ce grand bateau de ville. Le Grand Hôtel vient de prendre l'affiliation Inter Hotel. L'interrogation des indépendants vis-à-vis des enseignes volontaires reste entière.
La façade du grand Hôtel place de la gare à Valenciennes. Une fière allure.
Rénovées ou pasLe Grand Hôtel affiche en semaine ses chambres rénovées single et doubles à 430 et 450 F, à 505 F en version balnéo. Les suites rénovées sont à 604 F et 655 F avec balnéo. Les chambres non rénovées sont encore proposées à défaut à 340 - 350 F. Bien entendu l'hôtel négocie avec les entreprises et propose des tarifs de week-ends à - 20%. Mais il semble bien que la clientèle ne veulle plus se passer du vrai confort. Non seulement elle ne veut plus des chambres non rénovées, même à prix cassé, mais certains clients à qui on a proposé une fois une chambre à baignoire balnéo pour l'essai y reviennent bien volontiers. Les temps sont peut-être durs mais le confort a le vent en poupe. |
L'HÔTELLERIE n° 2560 Magazine 7 Mai 1998
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