Marc Veyrat : la renaissance d'un chef heureux

Après cinq ans d'absence, le chef Marc Veyrat, 63 ans, assagit et visiblement heureux, fait son retour sur la scène gastronomique avec la Maison des bois. Il porte ce projet depuis trois ans : à Manigod, sur les terres de ses parents, il a construit un hameau traditionnel adouci d'une touche contemporaine, apporté par l'inox, le bois et le verre. Pour se plonger très vite dans l'univers du chef, les clients atteignent en calèche ce lieu magique situé face au Mont-Blanc. Au milieu des alpages, se dresse la ferme d'hôte avec ses cinq chambres et deux chalets annexes qui augmentent la capacité de 5 ou 6 personnes. Pour parfaire le tableau bucolique, rien n'a été oublié : une chapelle, un four à pain, des serres et un parcours botanique.

En outre, l'amphithéâtre Jacques Weber, installé dans la forêt, accueillera des spectacles créés par l'acteur éponyme. Le restaurant gastronomique y sert à un nombre de couverts limité, une cuisine minérale et environnementale voulue par le chef. "Ma cuisine sera environnementale ou ne sera pas, martèle Marc Veyrat. Il faut prendre conscience que l'on ne peut pas manger tout et n'importe quoi. Je privilégie une production locale et pastorale. Ainsi les fromages et le lait viennent de chez mon cousin, qui fait un travail exemplaire. Le poisson provient de mes étangs. Les serres produisent majoritairement les légumes servis en salle. Nous avons des animaux - pour la plus grande joie des enfants -, des poules qui pondent des oeufs bio." Des oeufs que le chef sert cuits dans de la glaise avec du carvi et de l'oxalis. "Voila un bel exemple de cuisine bio et minérale. Ici, nous avons la chance d'avoir des sous-bois qui nous donnent de l'humus, de l'écorce. Une volaille cuite dans de l'écorce de sapin, c'est vraiment autre chose." Le chef a élaboré un menu unique (à 300 €), baptisé 'cuisine minérale, légère et naturelle' et, pour les groupes, un menu table d'hôte de dix plats à 200 €, vins compris.

Des cuisiniers en salle

"Il n'y aura jamais un service sans que je sois là, insiste Marc Veyrat. On vient chez moi et non au restaurant." Ainsi, le chef a recruté des cuisiniers qui serviront en salle. Il n'y aura pas d'argenterie mais une belle vaisselle régionale, créée par son épouse Caroline Raphaneau. "Je veux que mes clients soient des hôtes heureux, les recevoir comme à la maison." Pour accentuer cette profession de foi, Marc Veyrat a installé sa chambre dans la salle de restaurant, une facétie qu'il dévoile avec beaucoup de sérieux. "Je suis là le premier et je pars le dernier, donc personne ne peut me déranger. Cela me permet aussi d'être toujours présent pour transmettre." Le restaurant accueille en effet une école d'application. De jeunes stagiaires étrangers, passeront six mois à se former en cuisine. Marc Veyrat a aussi créé un parcours botanique Laurent Gerra, du nom de son célèbre ami humoriste. Une centaine de plantes aromatiques de montagne y sont dévoilées, tous les mercredis et jeudis, aux enfants des écoles alentour. "La transmission, c'est important. Après un repas ludique, tous repartent avec un herbier pour connaître les plantes de montagne. Il faut revenir aux sources de la nature, lutter contre la malbouffe. On ne peut laisser nos enfants manger n'importe quoi, c'est un problème de santé publique. La Maison des bois concrétise cette philosophie. Aujourd'hui, je suis un chef et surtout un homme heureux."